Le pétrole à 100 dollars le baril ?

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Le pétrole à 100 dollars le baril ? Pourquoi pas ? Le Brent est actuellement au-dessus de 67$ le baril (159 litres) contre 19$ fin avril 2020. Une belle remontée qui pourrait continuer, malgré la pandémie.

Le pétrole à 100 dollars le baril ?

 

Le pétrole à 100 dollars le baril ? Pourquoi pas ? Le Brent (nom d’un gisement pétrolier découvert en 1971, au large de l’Écosse) est actuellement au-dessus de 67$ le baril (159 litres) contre 19$ fin avril 2020. Une belle remontée ! Pourquoi donc ne pas continuer ainsi et retrouver le niveau de fin août 2014 ? Il ne s’agit certes pas de rêver aux plus hauts de mai 2014, vers 115$, juste avant cette chute précipitée vers 30$ fin janvier 2016, mais quand même. Pourquoi donc le pétrole ne pourrait-il pas refaire la part de chemin qui lui manque, pour s’approcher davantage de son maximum précédent ?

 

Le pétrole à 100 dollars ? Mais vous n’y songez pas, en pleine crise du COVID-19 : regardez donc les chiffres de l’emploi ! Certes, plus de vaccins dits efficaces ont été trouvés, mais les doses ne sont pas encore là, malgré les promesses. Donc la maladie avance, même si c’est plus lent. Regardons, pour preuve, ce qui se passe sur l’emploi. Certes, le taux de chômage est redescendu à 6,3% de la population active en janvier aux États-Unis, loin des 14,8% d’avril 2020, mais loin aussi des 3,5% de mars 2020. Surtout, ce taux de chômage qui a baissé de moitié ne nous dit pas que 10 millions de personnes sont sans emploi, contre 5,7 à l’époque, mais surtout avec peu d’espoir pour le futur. Les pertes d’emploi continuent dans les hôtels-restaurants, les commerces ou les transports. Plus grave, nombre de personnes qui songeaient à rejoindre le marché du travail avant la pandémie s’en sont retirées, sans doute durablement. Même si l’activité américaine repart, les chiffres de l’emploi montrent la profondeur de l’entaille dans la croissance et, plus encore, sa permanence, du côté des salariés comme des entrepreneurs.

 

Les chiffres de l’emploi montrent que cette même semi-reprise se produit en France : elle devrait donc peser aussi sur le prix du pétrole. Le taux de chômage mesuré par l’Insee (selon les normes du BIT) retrouve actuellement son taux d’avant COVID (7% en métropole), mais calculé à partir de personnes toujours sans emploi, et surtout, qui ont mené des efforts de recherche bien plus faibles. En France métropolitaine, il faut compter :

  • 7% de chômeurs au sens du BIT
  • + 5% de personnes sans emploi qui n’ont pu mener de recherches, dont beaucoup du fait du confinement
  • + 10% en sous-emploi, n’ayant pu travailler aussi longtemps qu’elles le souhaitaient.

22% de la population active française est en fait affectée, le triple du taux de chômage dont on parle !

 

Le pétrole à 100 dollars ? Ce ne sera donc possible qu’avec des économies en reprise, en Asie notamment, et dans les pays industrialisés, avec des politiques budgétaires et monétaires de soutien qui se poursuivront, pour faire reculer les inquiétudes. L’Asie, avec la Chine (6,5% de croissance en fin d’année, après un simple ralentissement à 2,3% en 2020), alimente le principal centre de demande d’hydrocarbure. Cette zone n’a guère connu qu’un ralentissement en 2020 et, visiblement, tout ce que l’on entend sur les raccourcissements ou les rapatriements des chaînes de production change peu aujourd’hui le volume et les circuits de demande. Aux États-Unis, la remontée du prix du pétrole ne sera possible qu’avec une plus forte croissance, c’est-à-dire avec la poursuite d’un déficit budgétaire conséquent (Janet Yellen, la patronne du Trésor) et d’une politique monétaire accommodante (Jay Powell, le président de la Fed) ! Pareil en zone euro, avec Christine Lagarde et l’idée de relâcher les contraintes sur les déficits budgétaires en zone euro.

 

Mais un pétrole à 100$ est peut-être plus lié encore à l’exubérance des bourses. Jay Powell vient juste, devant le Sénat de calmer les inquiétudes sur un regain de l’inflation. Il vient de dire qu’il n’y a pas à s’inquiéter de risques inflationnistes, que la demande de bons du trésor américain est forte (autrement dit qu’il soutient le programme de 1 900 milliards de $ de Joe Biden) et également qu’il faudra trois ans pour atteindre les 2% en moyenne qu’il souhaite ! Les bourses adorent ce message et se jettent donc sur le Bitcoin, les actions Tesla, GameStop ou encore les valeurs Cannabis.

 

En fait, le pétrole risque d’être surtout aspiré par la spirale spéculative en cours, certes soutenu par les espoirs de reprise, même si nombre d’entrepreneurs restent prudents, et l’argent gratuit, qui devrait continuer à couler. Les inquiets diront qu’on oublie les politiques de décarbonation, l’Accord de Paris, les taxes à instaurer sur le pétrole, « la vague écologique »… Certes disent les spéculateurs, mais avant il y aura bien une reprise chez les émergents, en Asie puis en Afrique ! Et que faire de cet argent presque gratuit qui nous vient, pour le rentabiliser ? Le Brent à 100$, ce n’est guère que 47% de plus, quand on voit ce qui se passe ailleurs : Tesla multiplié par 4,5 en un an ! Et Jay Powell nous redira, comme il vient de le faire au Sénat, que l’inflation qui s’ébroue est plutôt un bon signe et que la hausse des taux longs montre que les investisseurs vont en bourse !

 

100$ le baril de Brent, c’est devenu le signe de bonne santé !

 


Atlantico

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