La nouvelle diplomatie est arrivée !

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 La nouvelle diplomatie est arrivée !

Talleyrand : dur, mais subtil et très poli

Il fut un temps où la diplomatie était l’art d’obtenir le plus possible, en donnant le moins possible, sans contrainte de temps. Il s’agissait de séduire, de corrompre, de menacer, en allant même jusqu’à la guerre. Richelieu l’a bien montré, lui qui faisait coexister tables de négociations avec batailles ; et Talleyrand reste l’exemple de l’exquise complexité combinée à des bals et à des repas somptueux. Bien sûr, le rapport de forces est toujours présent et connu mais il s’agit de convaincre, pas vraiment de contraindre, en tout cas pas de façon visible. Il faut que chacun, autant que possible, sauve une partie de sa face, pour que la paix soit jugée durable. Un traité léonin ou trop inégal est vu comme précaire : c’est de la mauvaise diplomatie.

 

Obama : un pivot vers l’Asie qui n’est pas claironné

Avec Barack Obama s’est ouvert ‘’le pivot vers l’Asie’’, autrement dit l’annonce officielle que les Etats-Unis allaient s’occuper de la chine et non plus de la Russie. Nous sommes sortis de l’après-guerre, où l’ennemi était l’URSS à contenir, pour aller vers la Chine qu’il s’agit également de tenter de contenir. Par malheur, l’annonce d’Obama aura sans doute été trop subtile. En toute hypothèse, nous n’avons pas tiré pour l’Europe les conséquences de ce changement stratégique : il fallait ‘’évidemment’’ développer une industrie de défense et non plus croire que l’Amérique continuerait à déployer son parapluie OTAN, moins encore il ne fallait acheter du gaz à la Russie.

 

Trump : brutal et monétaire

Avec Kiev, Donald Trump, c’est l’art de dire d’abord ce que l’on donne (à la Russie) pour avoir quelque chose en retour (minerais d’Ukraine) ! Mais Vladimir Poutine sait très bien que ce qui mène Trump est la vitesse de l’accord. 24 heures, ce n’est pas de la diplomatie, c’est de la transaction, même si elle doit être compliquée. Maintenant les minéraux rares de l’Ukraine s’invitent à la table pour « équilibrer » l’échange. Il ne s’agit plus de valeurs humanistes, mais bien de valeurs monétaires.

 

Europe : prise à revers

Ce qui se passe est bien sûr en opposition totale avec la façon dont s’est construite l’Europe après la seconde guerre mondiale, avec l’idée que sa force viendrait de son marché protégé par ses normes, mais avec ledit parapluie américain. Les normes ne sont une force économique qu’à l’abri d’une force militaire. C’est ainsi que s’est créée la zone euro au centre, économie sociale de marché, entre communisme dur et capitalisme pur. Le centre est toujours long à définir et à construire, toujours menacé de verser dans ces deux extrêmes, toujours fragile. La zone euro n’a cessé de s’étendre en vantant la taille de son marché « protégé » et donc, dans son esprit, attirant. Elle a oublié que son succès ne venait que parce qu’il était rendu possible par son protecteur américain. Pendant longtemps, ainsi, l’Europe a dit défendre des valeurs parce que cela lui était permis, autrement dit correspondait à l’intérêt bien compris des Etats-Unis. Tel ne semble plus être le cas, avec en plus la révolution technologique en cours qui menace.

 

Nouveau rapport de forces : qui en face en Europe ?

Nous sommes aujourd’hui dans le pur rapport de forces, dans le conflit des puissances qui veulent s’étendre : la Russie veut englober peu à peu ce qu’elle avait auparavant, aller si possible très loin si l’Europe explose. En face, Trump veut acheter le Groenland, pourquoi pas englober le Canada, sachant qu’en reprenant le Canal du Panama il se donne un avantage stratégique. La Chine n’est pas en reste, avec Taïwan en ligne de mire. Entretemps elle s’arme, ayant bien vu que la maîtrise des mers est décisive.

Quand l’Europe va-t-elle comprendre le changement d’environnement mondial  et pivoter elle-même, par elle-même ? Il faut qu’elle accepte que le marché sans la force pour le défendre n’est plus un attrait pour les forts et que le fameux « acquis communautaire » est une simple barrière à renverser, ouvrant la voie au plus grand marché du monde à ceux qui sont peu soucieux d’écologie et de droits de l’homme.

 

Pour espérer pouvoir se doter d’une armée européenne assez forte, il faudra convaincre des généraux français et allemands de tomber d’accord sur un même tank, les généraux espagnols, italiens et français sur un même avion et ainsi de suite. Mais pour convaincre les généraux des divers pays, il faut un chef. Il faut le dire et le chercher.