François Hollande a raison, mais bien tard. Oui il faut que les entreprises investissent plus, qu’elles aient une vie plus simple et moins de taxes. Oui il faut que l’Etat maigrisse, se simplifie, devienne plus efficace. Pas vraiment une nouveauté. Mais pas vraiment le programme sur lequel il a été élu. C’est donc un changement difficile à faire déglutir par ses amis, soutiens et électeurs. Et ce changement sera plus difficile encore à prendre, pour lui et pour nous, avec l’Allemagne qui va mieux, ainsi que l’Espagne… s’il attend trop. Cette fois, il va falloir qu’il agisse vite, fort et s’implique.
Le pacte social dans l’entreprise ? C’est une belle expression pour dire qu’il faut faire remonter les profits. La France perd toujours en parts de marché, même si le rythme se ralentit. Son déficit extérieur se réduit, mais reste important. Les chiffres de novembre 2013 annoncent un creusement « inattendu » de plus de 5 milliards d’euros, à la suite d’une baisse des exportations (moins de voitures et de machines).
Pour sortir d’affaire, il faut d’abord soutenir la compétitivité hors coût, autrement dit l’investissement, la recherche, l’innovation. Ensuite il faut renforcer la compétitivité coût, ce qui veut dire que les salaires bruts doivent baisser, par la baisse des charges, pour le milieu de gamme. Cette opération a commencé avec le CICE, par un transfert de charges depuis les entreprises vers l’Etat. Mais le creusement du déficit public qui en résulte ne peut durer, d’autant que le transfert doit augmenter, si on veut vraiment compenser l’écart de compétitivité. On parle ainsi de 50 milliards. Il faut donc une compensation croissante par la TVA, la CSG… et elle ne suffira pas. L’opération « modération » devra en effet se poursuivre par des engagements de modération sur les salaires nets avec, en compensation, des engagements de maintien en emploi, de formation et d’abondement des retraites. On aura reconnu une logique suédoise. Et elle n’est pas finie : les chômeurs devront accepter une réduction de leurs indemnités au fur et à mesure qu’ils restent en chômage. On aura reconnu le modèle allemand. Baisse des allocations chômage, baisse des salaires bruts par la baisse de charges des entreprises et modération des salaires nets: le dialogue « privé » a du pain sur la planche.
Le pacte social dans le secteur public ? C’est une belle expression pour dire qu’il faudra réduire le nombre de fonctionnaires. La croissance sera faible, les impôts ne peuvent plus monter, on l’a vu avec les « bonnets rouges ». Le déficit ne va pas baisser, au contraire même puisque les pouvoirs publics s’engagent vers des transferts croissants de charges depuis les entreprises vers l’Etat (les ménages), sans compter que les taux d’intérêt montent. Voilà donc les refontes des structures régionales et locales, de l’école, de la santé qui s’annoncent… pour faire mieux avec moins, en utilisant les technologies modernes. Baisse du nombre de fonctionnaires et stabilisation des retraites, refonte du statut de la fonction publique : le dialogue « public » a du pain sur la planche.
Le pacte social, privé et public, c’est en fait un transfert dans le temps. C’est convaincre que seulement ce transfert dans le temps des revenus, avec moins de revenus nets aujourd’hui mais mieux garantis demain et après-demain, par la formation et les compléments de retraite nous sortira d’affaire. Pas facile, mais essentiel. Nous avons dit pendant des mois que nous n’étions pas comme l’Allemagne, c’est encore plus vrai, pas comme l’Espagne et l’Italie, c’est moins vrai.
Dommage qu’on ne puisse pas réformer avec les autres, on serait moins seuls ! Il faut donc s’y mettre : le temps joue contre nous.