« NOUS », CIVILISATION EUROPEENNE, SAVONS ENFIN QUE NOUS SOMMES MORTELLE

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 « NOUS », CIVILISATION EUROPEENNE, SAVONS ENFIN QUE NOUS SOMMES MORTELLE

Il nous a seulement fallu deux Guerres mondiales, plus…

Une pandémie et une récession, mondiales, en attendant le krach que le FMI vient d’annoncer. Voilà peut-être la bonne décision, le 19 juin, des responsables européens : dépenser et emprunter davantage, au nom de tous (horreur !), pour prêter et donner (pire !), à ceux qui étaient les plus atteints. Déjà fragiles ils auraient pu couler, entrainant le bateau européen. On aura reconnu l’Italie, l’Espagne ou la Grèce, sachant que la France ne va pas bien mais ne le dit pas trop, elle qui emprunte, en silence, toujours plus, pour toujours moins.

Miracle, révélation, pression franco-allemande ou simple compréhension du fait que le monde change et que nous allons mourir si nous ne bougeons pas ? Compréhension ! C’est sans doute la plus agréable leçon à tirer de cette vidéoconférence des chefs d’État et de gouvernement du 19 juin au matin. Un plan semble en effet se mettre en place pour sortir de la crise, financé… par un emprunt européen !

 

Pour franchir ensemble le Rubicon…

  • 1 850 milliards d’euros : pas d’objection de principe devant la somme proposée par la Commission pour soutenir l’Union, pour sortir de cette passe ! 1 100 milliards pour le Budget « renforcé » 2021-2027 de la Commission, plus 750 milliards (Next Generation EU) pour l’augmenter, par emprunt. Pour lutter contre les faiblesses qu’accentue la pandémie, il s’agit d’aider les salariés, secteurs, entreprises et régions les plus directement touchés pour éviter des effondrements irrémédiables, puis de soutenir des investissements stratégiques, notamment dans le vert, le digital et la santé, puis à plus long terme de renforcer la recherche, l’innovation et la présence extérieure de l’Union.
  • Augmenter le budget de l’Union : pourquoi pas ! Ce qui était prévu avant la pandémie n’est plus assez. D’où l’idée de faire passer (temporairement ?) le budget à 2% du Revenu de l’Union, avec des taxes nouvelles : sur le maritime et l’aérien, le numérique, les activités polluantes ou les grandes entreprises, plus l’emprunt.

 

Mais à condition de le rétrécir demandent certains !

  • 500 milliards de cadeaux et 250 de crédit : tant que cela ?
  • Répartir l’argent : pourquoi prendre le taux de chômage sur les 5 dernières années dans la clef de répartition des bénéficiaires, alors qu’on veut répondre au COVID-19 ? S’agit-il d’aider ceux atteints par le virus, ou ceux qui avaient déjà d’autres maladies ?
  • Rembourser de 2028 à 2058 : pas plus vite ?
  • Distribuer les fonds « sans conditions » : avant de distribuer cet argent, pourquoi ne pas demander aux pays s’ils respectent l’état de droit (Pologne et Hongrie), ou de s’engager dans des réformes structurelles et à faire montre de rigueur budgétaire (Espagne, Italie… France) ?
  • Plus d’impôts, pour financer ce budget européen accru : taxer les transports en avion, est-ce bien le moment, taxer les GAFAM, n’est-ce pas risqué avec Trump, taxer « le carbone » aux frontières, n’est-ce pas compliqué et taxer les grandes entreprises européennes, c’est pour soutenir l’économie ?

 

Civilisation européenne et démocratie à sauver : c’est cher !

Et pourtant, que l’on ne cherche pas ici de décision du niveau de la CECA, du rapprochement franco-allemand, de l’extension de l’Europe ou de la création de l’euro ! Heureusement, nous faisons mieux qu’avec les soutiens « conditionnels » à la Grèce, au Portugal et à l’Espagne – qui passaient par des coupes budgétaires et des baisses de salaires dans ces pays ! Nous faisons mieux qu’avec ces soutiens monétaires à l’Italie – qui lui tiennent juste la tête hors de l’eau.

En fait, nous réparons plus les travers de nos demi-avancées passées que nous n’avançons, au moment où c’est indispensable. L’euro a certes aidé, mais creusé aussi les écarts entre le fort (Allemagne) et ceux qui taxent moins (Pays-Bas, Irlande) d’un côté, par rapport à ceux qui étaient déjà les plus faibles sans qu’ils puissent réagir, de l’autre. Le COVID-19 a abaissé les croissances de tous, surtout des plus fragiles. Et on pose des conditions pour les aider !

Impossible de continuer ainsi. Les États-Unis se raidissent, craignant de perdre leur leadership mondial, sans souci de leurs alliés et des valeurs démocratiques. La Chine se raidit, pensant que le virus peut l’aider. Et l’Europe compte ses sous. Ou elle saute le vrai Rubicon et se donne les moyens pour peser dans ce monde, et l’assume, ou elle entre en soins intensifs.