Moins de consommation, parce que plus d’inquiétude… et moins de profit ?

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La consommation des Français a « légèrement » reculé en février, comme dit l’Insee, après avoir quand même plus diminué en janvier. -0,2 % contre – 0,9 %. En janvier les statisticiens nous disaient que c’était l’automobile, pour février ce sont les achats de textile-cuir. Mais depuis des mois, autos ou vêtements, c’est bien le revenu après impôt qui baisse, le chômage qui monte, l’inquiétude qui est partout. Et surtout, devant nous, rien ne semble changer. « S’occuper » des riches, pour qu’ils partent, taxer les allocations familiales un jour, réduire les retraites le lendemain peut certes réduire les déficits mais ne diminuera pas les coûts de la puissance publique et moins encore ne fera repartir la machine économique. Alors il y a moins de consommation, parce qu’il y a plus d’inquiétude.

Evidemment il n’y a pas de solution miracle, et moins encore rapide, pour résoudre tout ceci. On ne corrige pas trente ans de déficit budgétaire en une année, pas les esprits ni les « avantages acquis » en quelques émissions télévisées. C’est une mutation profonde qu’il nous faut, parce que le monde change et que nous refusons de le voir. La dette qui monte pour payer les fonctionnaires, les municipalités, la santé ou encore les retraites vient du fait que nous dépensons trop et mal par rapport à ce que nous produisons, que nous ne produisons pas assez, et pas assez ce qu’il faut. Mais c’est plus facile à dire qu’à corriger. Un jour ou l’autre, il faudra réduire les dépenses et l’annoncer, c’est-à-dire réduire le nombre de départements ou de régions, avec les bureaux et les personnels qui y travaillent. Il faudra leur offrir d’autres activités. Un jour ou l’autre, il faudra montrer qu’on peut enseigner ou soigner de manière différente, ou encore s’occuper de façon plus efficace des personnes âgées. Un jour ou l’autre, il faudra se convaincre que notre solution est l’innovation et l’Europe, pour marquer notre place dans ce nouveau monde, en y creusant notre différence.

Mais innover est un état d’esprit, celui d’une société toute entière. Ce n’est pas seulement « accepter » de changer, pas seulement r diriger une part de son épargne vers des TPE (très petites entreprises), PME et autres startups dans des pôles de compétitivité avec la promesse d’un avantage fiscal à la sortie, compte tenu de la diminution d’un avantage fiscal à l’entrée. C’est avoir l’idée que seules nos nouvelles activités vont être profitables dans le vaste monde concurrentiel qu’est le nôtre. C’est jouer le jeu du changement, de l’aventure, des opportunités qui s’exploitent. La consommation remontera quand la confiance et les revenus remonteront, quand l’horizon se dégagera, avec un État plus moderne et moins coûteux, avec des entreprises plus souples, plus jeunes, plus ouvertes, plus profitables.

Nous n’en sommes pas là, coincés que nous sommes dans nos contradictions. Elles se lisent en direct dans les enquêtes de l’Insee, comme on le voit dans le tableau ci-dessous. Nous pensons que notre situation passée se détériore de plus en plus. Nous sommes plus inquiets pour le futur. Notre capacité d’épargne passée a diminué.. mais nous comptons épargner plus… car ce serait le moment !

 

Moyenne de janvier 1987 à fin 2012

déc-12

janv-13

févr-13

mars-13

Situation financière personnelle passée

-19

-29

-28

-29

-30

Situation financière personnelle future

-4

-23

-24

-23

-25

Capacité d’épargne actuelle

8

18

19

20

19

Capacité d’épargne future

-10

-2

-1

0

-3

Opportunité d’épargner

18

37

36

31

37

Source Insee : solde entre les opinions négatives et positives

Or tel n’est pas le sentier aujourd’hui retenu dans nos prévisions, avec des ménages qui continueraient plutôt de consommer parce que les prestations sociales soutiennent la demande. Mais vient toujours un temps où il apparaît à tous que l’économie ne peut plus continuer avec des revenus d’activité qui augmentent moitié moins vite que les prestations sociales. Maintenant ?

Parier que le taux d’épargne ne va pas monter est de plus en plus dangereux, au moment où on veut encore augmenter le plafond du livret A et où on pense que c’est une bonne idée d’appeler à la baisse des prix de l’immobilier, en oubliant qu’il s’agit là d’un bon tiers du patrimoine des ménages.

La France n’échappera pas à la modernisation de la puissance publique, donc à une réduction annoncée de la dépense publique, et à l’accroissement de la profitabilité des entreprises. C’est le profit qui fait l’emploi, l’emploi qui fait le revenu et plus encore le moral, donc la consommation. Qui va le dire ? Qui va le faire ?