Écologie : des autoroutes bloquées, un Monet aspergé mais toujours pas de programme chiffré ?

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Peut-être parce c’est plus difficile de se lancer dans un programme sérieux, avec tout ce que ceci suppose de recherches, d’hypothèses, de calculs, que de lancer de la purée sur un tableau qui, lui, ne peut réagir et critiquer ?

Écologie : des autoroutes bloquées, un Monet aspergé mais toujours pas de programme chiffré ?

© Letzte Generation / capture d’écran Twitter

Allez donc savoir. Mais surtout, quoi de mieux, pour attirer l’attention et déclencher la ronde du buzz et des réseaux sociaux, sans risque, à peu de frais, et sans proposer la moindre esquisse de solution ? Cette idée se répand et on retrouve ces mêmes « interventions » au Royaume-Uni avec Stop Oil, en Allemagne avec Lezte generation (la Dernière génération), sans oublier Extinction Rebellion en France. Une liste qui n’est pas complète, tant bourgeonne ce mouvement, avec tous ces tableaux qui attendent.

Certains médias s’interrogent sur cette démarche et sur son efficacité. D’autres, plus critiques encore, avancent que des héritières Getty et Rockefeller seraient derrière certains de ces groupes, peut-être en quête de rédemption. D’autres, psycho-analystes, mettent en avant l’éco-anxiété, cette nouvelle maladie qui étreint les jeunes. Ils se vivent comme condamnés à mort par les politiques, les puissants, les riches, tous ces vieux qui peuvent agir et ne font rien, ou si peu. Ces décideurs qui ne décident pas, parce qu’ils se disent que le déluge ne sera pas pour eux, il faut les réveiller, les provoquer, leur gâcher la vie, pensent nos activistes. Bien sûr, tout n’est pas aussi calme qu’avec les tableaux, quand il s’agit d’attaquer les « policiers défenseurs des bassines », dans les Deux Sèvres. Ne peut-on donc, à la place, discuter, débattre, améliorer les propositions, pour éviter ces violences et agir ? Faut-il coller ses mains sur l’asphalte, pour avancer ?

On pourrait penser qu’un programme technique précis des verts serait plus précieux. Ainsi, pour les « passoires thermiques », ces logements mal isolés : combien sont-ils, en fonction bien sûr de leur degré d’isolation, 1 ou 2 millions ? Comment faire, quel budget prévoir, comment financer et par où commencer : par quels propriétaires, avec quels avantages fiscaux, quels crédits, quels soutiens publics ? Sans programme vert qui présente les avantages et les inconvénients de la « transition », comment évaluer les coûts et les délais, comment débattre ? Passons aux éoliennes : combien en faut-il, au plus près des côtes, sachant qu’elles y sont quand même peu efficaces, 30% au mieux ? Faut-il densifier les villes avec des tours, jusqu’à quelle hauteur ? Construire plutôt dans les zones industrielles suffira-t-il ? Démanteler les grandes fermes de vaches, de porcs ou de volailles fera-t-il augmenter les prix, de combien, et qui achètera ? Interdire « les vols si une alternative de moins de 4 heures existe en train » devrait avoir quelque effet sur les aéroports français. Et ainsi de suite.

On ne trouvera donc pas d’évaluations précises et moins encore globales tout au long du programme EELV, plutôt des demandes aussi nombreuses que non chiffrées. Pour financer le tout, on parle de 60 milliards d’euros annuels, donc d’oublier les critères de Maastricht sur le déficit public, de biffer en plus les titres de dette publique française que détient la Banque de France, sans se soucier des effets de la mesure. Et comme tout ceci ne suffira pas, il faudra augmenter l’impôt sur le revenu des riches, restaurer et augmenter l’ISF. Mieux encore, il faudra taxer les dividendes, en ignorant qu’ils n’enrichissent pas celui qui les reçoit, puisqu’il s’agit d’un pur transfert de ses profits, logés en trésorerie dans l’entreprise ! Et ainsi de suite.

« Peut-on définir un plafond de surface maximale en m2 par personne ?… Au-delà̀ de ce plafond, les propriétaires occupant.es devront être majoré.es sur leur taxe foncière de 30 ou 40%. » Voilà qui va plaire aux personnes âgées qui se trouvent dans leur appartement, retraitées, après le départ des enfants ! Mieux : « une carte d’identité sera attachée à chaque produit, reprenant l’empreinte matière et l’empreinte carbone explicite, ainsi qu’une analyse de cycle de vie… L’information portera sur… les conditions de production, les salaires, l’égalité entre les femmes et les hommes, le temps de travail, les marges de fournisseurs. » Et ainsi de suite.

On s’en doute, le programme électoral des verts n’a pas été beaucoup lu. Les chasseurs d’erreurs ou de fausses informations et autres fact checkers ont regardé ailleurs : le gibier ne manque pas. Il est vrai que tout est compliqué : une taxe carbone aux frontières pour empêcher d’importer en Europe du CO2 est aussi un protectionnisme par rapport aux émergents. Il est vrai également qu’interdire les ventes de voiture thermiques en 2035 aide plus la Chine que la France et qu’il faudra permettre d’extraire du lithium en France, si on veut y produire des automobiles.

Bien sûr, on pourrait ajouter que dans ce monde en guerre, il est bon de se protéger. On découvrira alors le « Défenseur »… des droits du vivant contre « le crime d’écocide », la « défense des bas de dune », puis celle des droits humains de la Convention européenne, l’interdiction des LBD, entendez lanceurs de balles de « défense ». Vient heureusement l’idée « d’ancrer notre politique de défense dans le renforcement des capacités diplomatiques de l’Union européenne (UE), pour accroître notre puissance d’action en faveur d’un multilatéralisme rénové » ! Enfin, contre la guerre, « les dépenses de défense seront rationalisées et optimisées, par les mesures de contrôle et de réduction des armements ». Il fallait le trouver !

Alors : écologie, autoroutes bloquées, Monet aspergé et pas de programme chiffré ? On comprend : collons nos mains au sol.


Atlantico

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