2021 : l’année du yuan

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2021 : l’année du yuan

En 2020, le yuan a gagné 6,7 % par rapport au dollar, plus que le yen (5,2 %) et que l’euro (5 %). Inutile de chercher la condamnation du yuan dans le rapport de janvier 2020 du Trésor américain : elle n’y est pas.

Peut-être la Chine a-t-elle bien joué en 2019 entre les trois limites qu’il ne fallait pas dépasser ensemble avec les Etats-Unis : plus de 20 milliards d’excédent commercial, un excédent de compte courant dépassant 2 % du PIB et des interventions de change (pour faire baisser la monnaie) dépassant aussi 2 % du PIB. Peut-être parce que les Etats-Unis ne voulaient pas «braquer» la Chine, en pleine discussion commerciale avec elle. De fait, les critères du Trésor américain ne sont pas stricts, dépendant de la durée et de l’importance des dépassements conjoints de ces trois limites et soumis à… interprétation.

Inutile aussi de chercher la condamnation du yuan dans le rapport d’avril 2020 du Trésor américain, après la quasi-rupture des discussions avec la Chine : le document n’est pas paru. Il faudra, au moins, attendre l’arrivée de Joe Biden et de Janet Yellen. Evidemment, tout ceci est politique mais pas seulement, s’il se trouve que la Chine ne manipule plus sa monnaie, au moins directement !

En revanche, neuf pays étaient annoncés comme étant dans le radar du Trésor américain des manipulateurs monétaires : Allemagne, Irlande et Italie (autrement dit : zone euro), Japon, Malaisie, Singapour, Corée du Sud et Vietnam (autrement dit : zone d’influence chinoise) et Suisse, comme c’est le cas régulièrement. Mais la dernière rumeur en date, mi-décembre 2020, ne mentionne plus que Suisse, Thaïlande et Vietnam. Mais on pourra dire alors que les exportations asiatiques, en forte hausse, sont plus liées aux produits de protection contre le virus, si nécessaires, qu’à des manipulations de change pour les rendre moins chères. Reste le Vietnam : c’est le sous-traitant favori des exportations chinoises de moyenne valeur ajoutée, utilisé aussi pour éviter les taxes américaines à l’importation. Le dong, monnaie du pays, serait ainsi sous-évalué de 5 % selon le Trésor américain. Reste enfin la Suisse, qui utilise ses francs… pour acheter des bons du Trésor américain, et se faire pardonner ! Au total le message américain à la Chine est envoyé, mais indirectement et à des sous-traitants.

Mais si la Chine n’était plus manipulatrice de sa monnaie, comme avant ? La raison en serait le fait que la Chine devient exportatrice de biens et de services de qualité croissante, et importatrice de biens et services de moindre valeur ajoutée. Son excédent de comptes courants, qui était en moyenne de 2 % du PIB, en passant par un maximum de 10 % en 2007 avec la crise des subprimes, n’a cessé de baisser, autour de 1 % du PIB au plus. La Chine ne se veut plus l’usine du monde mais, de plus en plus, son grand centre de services, son laboratoire, son centre de brevets et d’innovations. Vendre moins cher en faisant baisser le yuan deviendrait alors inutile, contre-productif, sinon impossible, puisque la Chine vend de meilleurs produits, sinon parmi les meilleurs, et que leur prix n’est plus le problème.

Et vient le crypto-yuan ! C’est une innovation monétaire où la Chine paraît la plus avancée au monde. C’est une monnaie cryptée, inscrite sur un compte qui peut s’échanger avec un autre compte, pour payer ou épargner, sans passer par le billet, mais par une banque qui est dans ce cas chinoise. C’est donc garanti, et surveillé, par la Banque centrale chinoise, immédiat et pratiquement sans coût. La Chine s’y prépare depuis des années et a commencé de payer ainsi ses fonctionnaires dans plusieurs villes. Ceci va se développer à vive allure, sécurisant les échanges, gagnant le pays, même chez ceux qui ne sont pas bancarisés (et peut-être pas… fiscalisés). Ceci, à l’intérieur du pays, se dit «inclusif» et permettra de mieux surveiller les entreprises, privées et publiques, les banques trop enclines à faire du crédit, plus les «non-banques» (Jack Ma ?).

En même temps, hors Chine, ce crypto-yuan ouvre les «routes du yuan» à côté de celles «de la soie», pour aller plus vite et passer à côté du dollar, sans que les autorités américaines n’en sachent rien et d’échapper ainsi à leur droit. La Chine suit une stratégie mondiale de croissance par les échanges réels, après l’entrée dans l’OMC (2001), et monétaires, avec celle en 2016 dans le DTS. Le yuan n’est plus une monnaie manipulée, mais celle du premier PIB du monde en 2017.


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