Matignon et les retraites : ce qui s’est dit, et surtout, ce qui s’y est pensé

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 Matignon et les retraites : ce qui s’est dit, et surtout, ce qui s’y est pensé

Matignon, les 3 et 4 janvier 2022. Grâce à un équipement très secret, nous avons pu savoir ce que disent et surtout pensent les responsables syndicaux français de la dernière réforme des retraites qui leur est présentée. « Dernière en date » bien sûr.

 

Elisabeth Borne, Première ministre : Messieurs les Responsables syndicaux, bonne année et merci de venir ici, pour échanger sur les propositions du gouvernement. [Elle pense : Mais pourquoi donc Macron m’envoie-t-il devant ce mur ? Et il me demande, la veille de la rencontre, de retirer cette mesure idiote d’un décret qui durcissait les indemnités chômages, au moment où nous entrons en récession ? Ils vont me dire de continuer sur cette « lancée » et de tout retirer.]

 

Les Responsables : Bonne année, Madame la Première ministre. Et pour que ceci se vérifie, continuez votre travail de réalisme : lundi vous tuez le décret scélérat qui s’attaquait aux chômeurs, maintenant vous devez cesser de vous attaquer aux retraités !

 

E.B.: [A moi de jouer faux-derche, comme eux.] Vous savez bien que le débat actuel sur les retraites n’est pas le premier ni ne sera le dernier et qu’il concerne le très long terme. Avec le temps, il s’est étoffé, enrichi, mais aussi complexifié. Aujourd’hui, il s’agit de répondre à plusieurs exigences pour assurer sa pérennité, c’est-à-dire son équilibre financier. D’autant plus que le but est d’être plus généreux pour les plus petites pensions, au moment où la population baissera et vieillira.

 

La CGT : L’âge de la retraite est un acquis social, l’allongement de la durée de la vie aussi. Il est exclu pour nous de reculer. C’est à vous de le faire,  si vous ne voulez pas que l’électricité s’arrête, que les trains restent en gare, que les usines ferment. [Pas mal : mon aile gauche de la CGT et Sud verront, avec les fuites dans la presse, que je suis un dur.]

 

La CFDT : Il ne s’agit pas de se bloquer sur un âge de départ en retraite, si on n’est pas capable de bien former les séniors. Sinon, on bloque leurs carrières, les pousse au congé-maladie, puis au chômage partiel, puis à la pré-retraite. [Pas mal : mon dernier Congrès, manipulé par ces médias gauchistes, m’a interdit d’accepter 65 ans. Je vais donc me battre sur la formation tout au long de la vie, et le faire savoir.]

 

FO : Madame la Première ministre, vous poussez tout aux extrêmes ! 65 ans, rabotage du nombre de mois indemnisés au chômage, vous ne nous laissez pas de « grain à moudre ». [Pas mal : c’est à elle de faire des ouvertures, autrement elle sera responsable des blocages. Et si elle s’assouplit, ce sera grâce à moi.]

 

E.B.: [A moi de jouer faux-derche comme eux.] D’abord, merci de votre franchise. Ensuite, vous savez bien que rien n’est fixé, sauf l’objectif d’équilibre financier à terme du système, car il est en déséquilibre et l’état ne peut plus boucher tous les trous. Il y en a partout et les taux montent. Nous sommes, avec l’Italie, les premiers emprunteurs publics de la zone euro. Je pense qu’on pourrait dire 64 ans pour la retraite, avec 43 ans au maximum de cotisations, c’est « la réforme Touraine » et avoir un autre débat avec vous sur la pension minimale à 1200 euros nets pour une carrière complète. [Pas mal, ce coup de « la réforme Touraine » : une loi de gauche, votée en 2014 et qui demande d’avoir 43 ans de cotisation. Elle s’applique juste maintenant !]

 

La CGT : Et les carrières longues ?

 

FO : Et les emplois pénibles ?

 

La CFDT : Et la formation tout au long de la vie ?

 

E.B.: [Ouf : nous passons aux modalités !] Pour les carrières longues, je vous propose d’améliorer avec vous les carrières très longues. Pour les emplois pénibles, je vous propose aussi d’en discuter, soit avec des congés spéciaux de reconversion, soit pour monter un fond financier qui aiderait à les réduire.

 

Les Responsables : Et les régimes spéciaux ? [On l’a eue !]

 

E.B.: [Ouf, ils continuent à mordre !] Les fonctionnaires d’état et territoriaux, la RATP, la Banque de France… ? Ils sont vraiment « spéciaux » : spécifiques, compliqués, nombreux. Je pense qu’on ne peut tout faire à la fois et qu’il vaut mieux éclairer chaque situation avec un même principe : seuls les nouveaux embauchés seront concernés. On pourrait commencer par…

 

Les Responsables : On verra plus tard… Discutons d’abord des points précis que nous avons évoqués. [On dira qu’on a arraché le maximum et gardé le maximum des régimes spéciaux. Aux manifs !]

 

E.B.: Tout ça pour ça !