Depuis quelques jours, la France se prend à rêver que le monde ne lui en veut pas, voire que sa chance revient. Une Présidentielle miracle, un G7 réussi, une majorité absolue prévue aux législatives, le tout sur fond d’embellie mondiale et européenne : Emmanuel Macron a-t-il la Baraka, la France avec ? Les preuves abondent.
Economie : 0,4% de croissance au premier trimestre, contre 0,3% dans un premier calcul, une confiance des ménages qui retrouve son niveau d’avant crise, août 2007, et un Indice Markit auprès des directeurs d’achats qui nous dit que l’Activité Globale atteint, elle aussi, son plus haut depuis 72 mois.
Entreprise : les directeurs financiers, en général considérés comme les personnes les plus prudentes de l’entreprise, vont dans le même sens, selon l’enquête Deloitte. Ils sont plus optimistes (37%) qu’il y a six mois (23%), avec un chiffre d’affaires attendu en croissance sinon en forte croissance pour 68% d’entre eux (contre 57% au troisième trimestre 2016). Ce rebond les entraîne à prévoir plus d’investissement et d’embauches.
Chômage : à Pôle Emploi, le nombre de demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi et sans activité baisse de 36 300 personnes en avril, soit l’essentiel de l’amélioration annuelle (-46 400 personnes).
Marchés financiers : la bourse de Paris monte de 4,2% depuis le 13 avril où le résultat de la Présidentielle inquiétait le plus (avec Marine Le Pen) et, aux mêmes dates, le taux à dix ans de la dette française baisse de 0,91% à 0,66%.
Politique : l’Assemblée nationale serait En Marche ! Décisives pour la mise en œuvre du programme, les Législatives faisaient craindre une cohabitation. Mais les dernières enquêtes d’Opinion Way donnent une majorité absolue à En Marche (de 310 à 330 sièges). Les Républicains et l’UDI obtiendraient de 140 à 160 élus, le Parti socialiste de 25 à 30, autant que pour la France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon, et 10 à 15 pour le Front national. Comment comprendre ?
L’effet Macron est d’abord un effet « nouvelles têtes ». Les anciens politiques ont disparu. Un mouvement parti de rien, de la marche et des réseaux sociaux, a chamboulé les hiérarchies et règles anciennes.
L’effet Macron est devenu un effet de génération. Chaque décideur privé ou public se voit désormais lié à sa date de naissance. « L’âge moyen des entreprises du CAC 40 en France est de 105 ans, celui des entreprises du Nasdaq aux Etats-Unis est de 15 ans » disait un ministre français de l’Economie – un certain Macron ! Et le Dow Jones a trente ans en moyenne.
L’effet Macron est aussi le temps qu’il faut pour changer en profondeur, puisqu’il commence jeune ! Il ne repose pas sur un « choc de reprise », avec baisse d’impôt, à la Sarkozy, ou baisse conjointe des dépenses et des impôts, à la Fillon. Il commence par une loi de moralisation, pour apaiser les esprits publics et une autre, par ordonnances, pour développer la négociation en entreprise. En plus, la formation sera décisive, dans l’entreprise et à l’école.
Est-ce trop beau ? Faut-il s’attendre à des anicroches, à des cygnes noirs, ces très rares animaux de malheur, ou à ce que jouent la loi de Murphy et le corollaire de Finagle ?
Cygnes noirs ? En politique française, ce serait un « problème » trouvé chez un ou plusieurs Ministres ou députés. En politique américaine, le Président Trump peut être en butte au Congrès, à ses enquêtes, et inquiéter. En finance, les énormes crédits faits en Chine à des entreprises publiques ou au logement peuvent angoisser. En zone euro, l’inflation pourrait monter plus vite que prévu, les banques italiennes faiblir, à l’approche des élections. En Corée du Nord… De moins en moins rares, ces cygnes dans ce monde connecté !
Loi de Murphy ? « Tout ce qui peut mal tourner, le fera », nous dit cet ingénieur de la Nasa. Corollaire de Finagle ? « Tout ce qui peut aller mal, le fera au pire moment ». Préparons-nous au pire au carré, pour l’éviter.
Et, là encore, l’effet Macron devrait jouer, puisque tous les opposants ont perdu ! Plus d’austérité avec Fillon, de Revenu universel avec Hamon, de nationalisations avec Mélenchon ou de sortie de l’euro avec Le Pen. La stratégie Macron n’est pas seulement la sienne : c’est la seule qui reste.
« L’effet Macron » : un jeune homme qui veut tout changer et prend son temps, aidé par nombre de vents porteurs. Ce sera une réalité s’il bat les « forces » qui, aujourd’hui, cherchent ses failles et bloquent les pompes à essence.