Palais de l’Élysée, au cœur de la nuit parisienne.
Emmanuel Macron : Bonsoir Mon Général, avez-vous vu ce qui m’arrive ? Je secoue ce pays d’une mortelle stagnation, je crée un mouvement, fais venir des capitaux, mobilise des innovateurs, crée de l’emploi et, patatras, vient le Covid. Pour éviter l’abîme, je m’endette, j’évite le pire et la pandémie cède. J’arrête alors les crédits d’urgence et veux faire repartir la machine : RIEN ! Les partis se réveillent, bloquent tout et la dette monte : c’est le seul carburant qu’ils aiment. Je parle à l’ONU ou pour la Francophonie : c’est tout ce qui me reste. Mes propres troupes se divisent en autant de « quarterons de ministres en retraite » pour, presque, vous citer.
Charles de Gaulle : D’abord, mon cher jeune successeur, méfiez-vous du « je ». « Je m’endette, j’évite le pire… », c’est en fait « la France » qui s’endette. Moi, « j’ai pris l’avion pour Londres ». C’était d’ailleurs fou. Heureusement, j’y ai rencontré un autre fou : Churchill. Et c’est en 1944 que j’ai vraiment retrouvé les partis, après la Victoire. Alors « je » suis parti ! Et Churchill aussi a été battu !
M. : Oui, vous avez raison. Je dois maîtriser mon « je ». Mais il me semble que ce qui se passe est plus minable aujourd’hui, face à nos dangers fascistes, russes et chinois, filmés et commentés sans cesse, que par rapport aux dangers allemands et japonais d’alors. Les Américains veulent encore rester chez eux et, ici, les partis et groupuscules veulent faire partir ce Premier ministre que j’ai eu tant de mal à trouver. Et pour qui ? Pour quelqu’une qui veut augmenter les ouvriers, les fonctionnaires et les retraités, au moment où nous sommes au bord de la banqueroute !
Ch. de G. : Les partis, maintenant comme de mon temps, ne veulent pas la victoire quand c’est difficile et dangereux. Ils ne veulent pas l’effort, avec même parfois un certain attrait pour la défaite.
M. : Oui, maintenant, on parle toujours d’inégalités pour refuser la moindre contrainte ou partage. On refuse de réduire le déficit budgétaire de 6 à 5% du PIB, comme s’il ne fallait pas avoir ensuite des années d’excédent si l’on veut réduire de moitié la dette publique. Mais personne n’osera le dire.
Ch. de G. : Sans compter l’armée de métier qu’il nous faut, pour contenir l’Empire russe qui veut se refaire, plus l’Empire ottoman, plus l’Empire perse. L’Empire français n’a pas résisté à la Deuxième guerre, les possessions italiennes et allemandes moins encore bien sûr, l’Empire britannique tient encore un peu. Quand on ne veut plus se battre, on perd pied. Il faut toujours de vrais chefs pour vouloir et, au moins autant, une vraie Constitution avec des Partis dignes de ce nom pour, précisément, ne pas perdre pied. En 1944 j’étais là, avec le MRP mollement pour moi, le PCF revanchard contre et la SFIO (PS) mollement contre. Pour éviter le pire, le régime des partis, il m’a fallu la Constitution de la Cinquième république et le RPR. Dix ans pour revenir et réussir : la Victoire n’a pas suffi.
M. : Moi, j’ai fait l’erreur de ne pas lancer un vrai parti avec des attaches locales puissantes, sachant que la Constitution était là, merci à vous. Dans « premier de cordée », il y a « cordée ».
Ch. de G. : Surtout, l’après-guerre est loin : 75 ans de paix ont fait perdre tout élan et lutter pour la patrie n’est pas lutter contre le déficit. Bruxelles n’est pas Munich et, en 1930, on ne pensait pas que l’antisémitisme et l’anticommunisme allaient, en se réunissant, pousser Hitler à déchirer le Traité de Versailles, qui avait mis fin à la Première guerre mondiale.
M. : Je commence à voir ce qui se trame, ici comme alors. Tout converge, revendications sociales et salariales, Israël, Gaza, Liban, Ukraine… Tout, contre la démocratie.
Ch. de G. : Aron était en Allemagne et n’a pas alerté tout de suite, comme notre ambassadeur. C’est la guerre seule qui éclaire tout, et qui révèle aussi les obscures transactions et les esprits veules qui abondent, avant, pendant et après. Mais c’est tard.
M. : Oui, il ne sert à rien d’avertir tôt, car c’est trop tôt ! Les antitout ne regardent que 2027 : l’élection présidentielle. C’est le duel à préparer pour les extrêmes, à éviter pour le centre. Et nous ne serons financièrement pas prêts.
Ch. de G. : Dans les plus fortes tensions, négociations et accords sont obligatoires pour sauver l’essentiel, la France.
M. : Armons-nous de courage.
Ch. de G. : Rassemblons-nous.