Au fond, ce n'est pas si mal ici !

- Ecrit par

 Au fond, ce n'est pas si mal ici !

Beaucoup de noir, comme toujours, du (gilet) jaune le samedi, de plus en plus de bleu : allons-nous changer notre drapeau ? Pourquoi pas, si nous regardons les dernières études de l’Insee d’août 2019, où la confiance des ménages remonte peu à peu, après le plus bas de décembre lié à la crise des gilets jaunes ? Pourquoi pas, si nous sortons du long marasme 2008-2016, suite à la crise financière des subprimes ? Cette lente convalescence, qui se dessine dans nos têtes, vient de l’idée que la hausse des prix est faible (1%), que le niveau de vie monte graduellement, que la crainte du chômage recule et que « l’opportunité d’épargner » augmente. Mais tout cela est fragile. Car tout cela dépend d’une situation sociale qui s’améliore un peu, mais voyons avec les retraites, de tensions mondiales qui pourraient s’apaiser, mais voyons avec l’Iran, et de la lente montée des revenus, après des baisses d’impôts et de la lente décrue du chômage, mais voyons avec la récession américaine qui n’est pas (encore) là et l’allemande qui, elle, l’est ! Mystères de la psychologie !

Les patrons, eux, sont plus réactifs. Plus optimistes pour la France selon Opinion Way, ils sont aussi plus soucieux pour l’international. « La situation nationale leur paraît désormais plus assurée : 47% des dirigeants sont confiants pour l’économie française (+3 points), et 79% pour leur entreprise (+6 points). Ils sont toutefois de moins en moins nombreux à considérer que « ce sera mieux demain » (14%, -7 points).

Mais les marchés financiers sont moins liés au passé que les ménages et regardent, à la différence des patrons, les politiques sous le seul angle monétaire, perpétuellement changeant. Pour eux, les baisses de taux américaines devraient continuer et tout arranger ! Ainsi, depuis janvier, les bourses américaine, allemande et française ont augmenté de 17%. Acheter aujourd’hui un bon du trésor à 10 ans fait gagner 0,1% s’il est américain (1,8% de rendement moins 1,7% d’inflation), perdre 1,9% s’il est allemand (-0,5% de rendement moins 1,4% d’inflation) et 1,2% s’il est français (-0,2% de rendement moins 1% d’inflation). Moins qu’aux États-Unis, plus que chez le voisin ! Et la croissance est ici de 1,3%, aux États-Unis de 2,3% et de 0,4% en Allemagne sur un an, en récession maintenant.

 

Comment voir l’avenir ? Noir : c’est la couleur de la dette publique connue, plus celle qu’on nous cache sur les retraites privées et publiques, plus les centrales nucléaires à maintenir ou fermer, plus les coûts de la transition écologique et du vieillissement.
Jaune : c’est la couleur des territoires qui se vident de jeunes, des centres villes qui se dépeuplent, des DAB qui disparaissent.
Bleu : c’est la couleur des jeunes qui WeWorkent, networkent et trottinent. C’est une bonne chose qu’elle s’étende, mais elle ne peut le faire plus vite qu’en comprenant les autres couleurs et en se mettant à leur portée, pour les aider à changer.

Les inégalités qui nous obsèdent, de revenu (Mélenchon), patrimoine (Piketty), territoire (gilets jaunes), genre (LGBT), culture (Bourdieu), pollutions (Jadot)… sont interdépendantes dans ce monde qui mute. Inutile de chercher ce qui fera jouer le tout, par quoi commencer. Moins d’impôt, disent ceux qui en payent. Moins de fonctionnaires et de régulations, disent les patrons. Moins de patinettes sur les trottoirs, disent les vieux. Moins de glyphosate… Plus d’enseignants, de lits d’hôpitaux aux urgences et d’aides-soignants, de services publics de proximité disent les syndicats et les maires de village. Et le dossier des retraites montre ceux qui bénéficient des versements des autres, à la Ratp, et les avocats qui s’inquiètent de leurs économies. Au centre, les cadres qui cotisent plus, épargnent plus et comptent leurs trimestres, en silence.

Donc « tout n’est pas si mal ici », au milieu d’un monde inquiétant, avec ces forces sociales qui bougent et beaucoup de chaleurs syndicales et conservatrices à la clef : l’effet Joule ! Mais, et c’est top secret, ce qui permet en fait d’avancer, ce sont les taux négatifs de la dette publique : -0,6% à un mois ou à un an, -0,7% à deux ou à trois ans, -0,6% à 5 ans, -0,2% à 10 ans.

Les marchés sont clairs : c’est le noir de la peur qui fait baisser les taux et permet le bleu du mouvement ! Alors, il faut forcer sur le noir, dire les chiffres de la dette cachée et montrer ce que permettent les nouvelles technologies. Noir bâton et bleu carotte : les couleurs du futur !