Zoom spécial avec Keynes, Taubira, Hidalgo, Jadot, Mélenchon et Roussel

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 Zoom spécial avec Keynes, Taubira, Hidalgo, Jadot, Mélenchon et Roussel

Ce Zoom spécial pourra souffrir de problèmes techniques, liés à l’éloignement d’un certain participant… Nous vous prions de nous en excuser.

Taubira, Hidalgo, Jadot, Mélenchon : Nous sommes très honorés, Lord Keynes, que vous nous receviez. Nous sommes, enfin certains d’entre nous sont, perdus pour écrire un programme présidentiel, à 100 jours de l’échéance !

Lord Keynes : Bienvenue et surpris qu’un livre que j’ai publié il y a 84 ans puisse encore vous intéresser, à 100 jours du vote !

Taubira, Hidalgo, Jadot, Mélenchon : Ne vous moquez pas ! Nous venons surtout vous voir pour parler de ce qu’on nomme ici la « relance keynésienne ».  Nous proposons tous une hausse du salaire minimal de 15% environ, sachant que l’inflation est ici de 2,8% : nous nous disons que cette demande nouvelle va réveiller la croissance et l’emploi en France. C’est bien de vous ?

Lord Keynes : Pas tout à fait. De mon temps, le Royaume-Uni était presque une économie fermée, dans mon modèle en tout cas. Donc, sans inflation, toute hausse de salaire heurtait immédiatement les profits des entreprises locales, donc l’emploi. Mais vous êtes une économie ouverte, très concurrentielle, et avec l’euro un taux de change unique entre vous. Donc si vous augmentez les bas salaires, ceux des moins qualifiés, vous augmentez les prix des produits de base, les plus aisément concurrencés par ceux venant des pays où les salaires sont plus bas, ou montent moins. D’ailleurs, vous avez déjà un déficit commercial en France ?

Taubira : Je crois que oui.

Hidalgo : Moi aussi.

Jadot : Oui, le déficit de notre commerce extérieur n’a jamais été aussi élevé : 9 milliards d’euros en novembre, nous allons vers 90 milliards !

Taubira et Hidalgo : C’est le gaz et le pétrole !

Jadot : Oui, mais notre déficit se creuse aussi pour les biens de consommation et d’investissements.

Taubira et Hidalgo : Oh, arrête avec l’économie !

Lord Keynes : Pardonnez-moi de continuer… dans ma spécialité : avec ces déficits extérieurs, votre monnaie tient ?

Jadot : Oui, parce que l’excédent allemand est là pour couvrir et fait qu’on n’en parle même pas, ce qui nous évite la menace de quitter la zone euro. En même temps, pas un mot non plus sur les investissements français et européens, les formations et les déclassements d’équipements qui seront obligatoirement liés à l’économie verte ! Ce sera énorme : motus !

Lord Keynes : Mais bien sûr ! Je parlais en mon temps de « l’illusion nominale », celle qui consiste à ne pas se rendre compte des prix qui montent. Maintenant, vous allez devoir sortir de l’illusion verte ! Vous allez vers l’inflation de votre révolution énergétique.

Taubira et Hidalgo : On pourrait peut-être utiliser votre « euthanasie du rentier », pour la financer ?

Lord Keynes : Ah ces Français ! Mais il n’y a jamais eu autant d’ « euthanasie du rentier » que maintenant ! De mon temps, le rentier anglais achetait des obligations à long terme et à taux fixe libellées en livres sterling : il suffisait alors de faire monter les prix. Les taux suivaient, ce qui diminuait la valeur des obligations qu’ils avaient antérieurement achetées : elles rapportaient moins, puis de faire baisser la livre, si on y tenait. Mais cela prenait du temps.

Taubira, Hidalgo, Jadot, rejoints par Roussel : On fait mieux, maintenant ?

Lord Keynes : Bien sûr : le rendement à 10 ans est à 1,8% aux États-Unis pour 7% d’inflation, à 1,2% dans mon Royaume pour 5,1% d’inflation, à 0,4% en France pour 2,8% et à -0.03% en Allemagne pour 5,3% d’inflation. Et le dollar, la livre et l’euro tiennent !

Taubira, Hidalgo, Jadot, Roussel : Par quel miracle ?

Lord Keynes : Un peu le mien, celui des Banques centrales acheteuses en dernier ressort, autrement dit clef de voute anticrise du système bancaire et financier, moyennant vérifications et pouvoirs bien sûr. C’est pour cela que les grandes banques centrales, notamment en zone euro, ont acheté des bons du trésor en 2008, lors de la crise financière américaine, puis en 2012 lors de la crise des dettes souveraines eu Europe du sud, puis maintenant avec le COVID-19. Sans elles, tout sautait.

Roussel : Mais les bourses ont beaucoup monté !

Lord Keynes : Les prix des logements aussi. L’ « euthanasie du rentier » n’est pas celle de tous ! Tout dépend de la solidité des Banques centrales et de la compréhension de leur rôle… par les politiques.

Taubira, Hidalgo, Jadot et Roussel (entre eux) : Surtout, on garde tout ça pour nous !