Xi, Mao sans Macao ni cryptos : quand la Chine s’ennuiera

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 Xi, Mao sans Macao ni cryptos : quand la Chine s’ennuiera

Pas de Macao : pour l’emporter sur les États-Unis, la Chine veut passer de l’Empire du milieu à l’Empire du sérieux. Risqué ? Or les Chinois sont très joueurs : Macao et les jeux d’argent cohabitaient partout avec Mao, pas avec Xi. Sa « pensée » rejoint la « pensée Mao » dans la Constitution : chacun doit consacrer tous ses efforts au pays. Au-delà du travail, il s’agit d’investir son épargne pour sa croissance, pas à New York ou Hong Kong, puis d’avoir trois enfants pour lutter contre le déclin démographique, donc économique par rapport aux États-Unis. Tout faire contre la malédiction : « les Chinois seront vieux avant d’être riches » !

Pas de cryptos : la Chine de Xi interdit les crypto-currencies comme le Bitcoin. Parce qu’elles mettent en danger l’épargne des travailleurs, comme dit la presse locale ? Parce qu’elles consomment énormément d’électricité, ce qui n’est pas écologique, ajoute-elle ? Parce qu’elles échappent au dollar et à la surveillance américaine, ou plutôt au contrôle des autorités locales, comme disent de mauvaises langues (américaines) ? Parce que les autorités chinoises n’en ont plus besoin, en recevant déjà suffisamment d’Iran ? Un Iran qui paye ainsi ses importations chinoises, hors radars américains et où l’électricité est cinq fois moins chère qu’en Chine, ceci expliquant cela, ajoutent de pires langues (américaines) ?

L’épargne est la clef de la suprématie de la Chine, si elle reste dans le pays et à condition d’être gérée prudemment.Bien gérée, ceci veut dire que les autorités vont faire attention au surendettement des ménages et des entreprises, notamment dans le logement. C’est le problème d’Evergrande, deuxième groupe immobilier chinois avec 200 000 salariés dans 280 villes, en retard de remboursement depuis août. On parle de 300 milliards de dollars de dettes, assez pour en faire un « rhinocéros gris », un risque systémique, presque un « cygne noir », annonciateur du pire. Les autorités vont donc « intervenir » et en tirer prétexte pour encadrer les excès du capitalisme en matière de crédit à la consommation, comme avec le groupe de Jack Ma, Alibaba, en cours de désossage. L’idée s’étend de transférer les données des débiteurs à une entreprise publique qui achèterait la filiale de crédit… donc aux autorités. En parallèle, la gestion des placements va être partout plus surveillée. Sérieux !

Revoir la « double circulation » devient décisif : la Chine doit devenir un grand exportateur high-tech et un grand marché interne, en réorganisant son épargne et la distribution des revenus. « Double circulation », interne et externe, des flux de biens et services d’un côté, d’argent de l’autre, mais c’est partout le cas ! Oui, sauf que Xi veut changer celle qui a fait décoller la Chine : la circulation externe. Il ne s’agit plus d’épargner pour exporter, même pour financer des entreprises high-tech à New-York, même avec des capitaux chinois. La Chine juge avoir les moyens financiers et humains pour développer chez elle les entreprises de la troisième révolution technologique, à l’instar des GAFAM américaines. Circulation interne à changer aussi : plus de consommation avec des salaires en hausse, des entreprises plus généreuses et moins de milliardaires : un grand marché, économiquement et socialement plus stable.

Les jeux sur ordinateurs doivent moins mobiliser les jeunes esprits, pas plus de trois heures par semaine, les jeux d’argent et les spéculations boursières moins encore. Les chansons américanisées doivent disparaître, tout comme ces jeunes chanteurs efféminés, que l’on retrouve au Japon et en Corée du Sud : un signe de décadence qui ne trompe pas les idéologues pékinois.

Une question se pose alors : la pensée Xi va-t-elle suffire à meubler les esprits de cette nouvelle, et ample, progéniture ? Déjà, la pensée Mao ne se voulait pas trop complexe, pour être comprise « par les masses » et les mobiliser pour l’action. « De la contradiction », le célèbre traité de Mao, en est le meilleur exemple où, parmi les problèmes du monde, ses « contradictions », Mao demande de retenir « la principale » pour la résoudre (la battre) et passer (penser) à la suivante. Elle deviendra « la principale », et ainsi de suite.

Le soir, les enfants chinois vont-ils jouer à « chercher la contradiction principale » pour construire le socialisme d’une « aisance moyenne » ? Ce qui n’est pas principal est-il secondaire ? Attention à la vengeance des jeux interdits.