Télétravailler demain pour avoir plus de croissance

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 Télétravailler demain pour avoir plus de croissance

 

13% de perte d’activité en novembre, contre 31% en avril : nous faisons des progrès dans la gestion des fermetures ! En effet, ce deuxième confinement devrait être moitié moins grave que le premier. Cette estimation vient de la Banque de France, grâce à son enquête mensuelle de conjoncture. Menée auprès de 8 500 chefs d’entreprise, elle commence le 28 octobre, soit deux jours avant le début du confinement, mais 90% des réponses sont parvenues après le 30. On peut donc penser, avec le gouverneur de la Banque de France, qu’elle en donne « la première photographie ». Pour comprendre ce résultat, le maintien de l’activité des services publics et des établissements scolaires a certes joué un rôle significatif dans ce moindre impact, estimé au quart de l’écart entre les deux confinements, mais le reste provient de l’adaptation des entreprises aux protocoles sanitaires et au télétravail. A voir ce qui l’en est, et surtout en sera.

 

D’un confinement à l’autre, quatre secteurs apparaissent :

  • les « miraculés », avec une remontée spectaculaire : bâtiment, automobile et réparation automobile. Ils avaient été quasiment mis à l’arrêt, avec un niveau d’activité entre 10 et 20% de la normale, les voilà autour de 90%,
  • les « va mieux », retournent quasiment à la normale : industrie, publicité, nettoyage,
  • les « encore mieux », qui avaient été peu touchés et sont presque à plein régime : chimie, agro-alimentaire, pharmacie, informatique
  • les « en péril » : ils s’effondrent toujours, un peu moins. Ce sont : loisirs, services à la personne et hébergement, avec une activité prévue à 17% de la normale, et pire la restauration, à 9%.

 

Alors, le télétravail, problème ou solution ? A priori, il réduit la productivité, donc la croissance. On entend ainsi des entrepreneurs envisager une entreprise en partie « téléportée », et des salariés une partition de leurs activités : mais ces projections ne sont pas les mêmes ! En effet, la productivité repose « traditionnellement » sur les « gains d’agglomération », comme disent les économistes, que procurent les grandes entreprises, les tours et les grandes villes. Le télétravail va-t-il les casser, ou bien améliorer l’organisation du travail et soutenir la croissance, après le COVID-19 ? A priori, une zone industrielle ou de bureaux permet de mieux organiser et répartir les tâches, d’échanger et changer plus facilement, d’amortir les coûts fixes et les à-coups. Une ville plus importante offre un marché du travail plus large, avec plus de spécialités offertes et demandées, plus de possibilités de trouver un emploi ou d’en changer, plus de liens avec les centres de formation et de recherche. Les entreprises le savent, surtout celles qui se lancent, les salariés et les jeunes aussi. Mais, si un couple s’installe dans le Limousin, parce que c’est plus vert et moins cher, que se passe-t-il si son entreprise ferme ou s’il se sépare ? Comment gérer un travail commun, sans communauté physique de travail ? Comment animer une équipe, qui se réunit de loin en loin ? Et sur le chantier ou dans l’atelier, le télétravail est impossible. Certes, ceci ne veut pas dire que certaines formes de télétravail ne peuvent se développer au sein du processus productif, dans l’agencement et l’ordonnancement des tâches, mais comment et avec quels effets, entre les « télétravailleurs » et les autres ?

 

L’enjeu pour demain, c’est donc de télétravailler et d’être plus efficace pour soutenir la productivité, la croissance et l’emploi et c’est possible. Pour cela, il faudra affiner l’organisation et le suivi des activités, en évitant un insupportable micro-management à distance. Ce télétravail réussi permettra de faire évoluer des emplois devenus redondants (ne rêvons pas) et surtout de simplifier des chaînes de production, voire de permettre des relocalisations. Tout dépendra de la formation, à l’école et dans l’entreprise. Apprendre, ce sera télé-apprendre, enseigner, télé-enseigner. Travailler, ce sera savoir travailler et télétravailler, dans des équipes à organiser pour les faire vivre. Bien sûr, il faudra revoir les restaurants, les hôtels, les services à la personne, les lieux de culture et de loisir, car tout n’est pas « télétravaillable ». Mais le petit commerce peut aussi créer son site et livrer, comme l’artisan du made in France ou le restaurant de quartier. Le COVID est un drame. C’est à nous de ne pas en faire une catastrophe et de surprendre le monde, nous les premiers !