Retraites par répartition : que faut-il changer ?

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 Retraites par répartition : que faut-il changer ?

Toute retraite est une répartition

Directe ou indirecte, toujours dans le temps, ce qu’on ne veut pas voir, d’où les problèmes actuels. Directe, c’est celle des efforts de tous, additionnés dans le PIB : c’est la retraite « par répartition ». Indirecte, elle est liée à la détention d’actions, vient du profit, donc de la valeur ajoutée après salaires et prise en compte de l’usure du capital : c’est la retraite « par capitalisation ». Toute retraite est ainsi problématique, parce qu’elle suppose des partages, donc des tensions, assez immédiates par la répartition, plus lentes en capitalisation.

Cependant, la retraite par répartition, contrairement à ce que l’on entend, ne veut pas dire que les salaires d’aujourd’hui financent les retraites, sans prendre en compte leurs niveaux. Heureusement que le système n’est pas si myope ! Cette prise en compte du futur est plus nette encore dans la capitalisation, où le détour par les marchés fait tenter de voir le plus loin possible. Mais ce système n’est pas hypermétrope : le futur n’appartient ni aux actions, ni aux obligations !

 

Démographie : comment répartir les salaires ?

Les salaires sont la base de l’emploi, de la croissance actuelle et future et de la productivité. Cet emploi dépend d’abord de la démographie, de la croissance naturelle et migratoire de la population française, en fonction du nombre de femmes entre 20 et 40 ans, période où elles sont les plus fécondes. Or ce nombre stagne depuis 2021, après avoir baissé de 7,9% entre 1995 et 2024 : le nombre de naissances ne cesse de chuter à 663 000 en 2024, contre 678 000 en 2023. Même si la fécondité est la plus élevée en France, comparée aux Etats-Unis, à l’ Allemagne et bien sûr à l’Italie et à l’Espagne — 1,62 enfants contre 1,4 en Europe, elle reste inférieure au renouvellement de la population. Donc la population vieillit, mais l’espérance de vie continue d’y monter, certes plus lentement. Viendra un moment où il y aura plus de décès que de naissances : vers 2040. Ce sera le point haut, démographique, de la population.

C’est alors qu’il faut parler de l’immigration, avec des chiffres aussi vraisemblables que possible. Or le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) prenait 70 000 annuels comme chiffre de base, alors même que la moyenne de l’Insee s’établit à 150 000 pour les années 2019-2021, dont 189 000 en 2021. Les immigrés travaillent, accroissent le PIB et payent la TVA : pourquoi sous-estimer ce point ?

 

Productivité : comment faire grossir les salaires ?

La productivité, c’est la valeur ajoutée produite par heure, c’est la réussite de tous pour convaincre les clients et dépasser les concurrents, internes et externes. Or la productivité décélère en France, plus qu’en Europe. Elle progressait de 0,5 à 0,6% par an entre 2011 et 2019, puis baisse de 3,5% entre 2019 et 2023. Pourquoi décélère-t-elle et comment la faire repartir ? La décélération : les raisons s’accumulent entre vieillissement de la population, désindustrialisation et tertiarisation des activités,  commerce, alternance et apprentissage… Le redémarrage : en réindustrialisant, en renforçant l’apprentissage, en contrôlant chômage et RSA, en éduquant plus et mieux, notamment par l’usage de l’Intelligence artificielle pour tous. Facile ! La révolution que nous vivons inquiète, avec ce qu’elle implique de déclassements et de formations, c’est un temps à passer, comme avec l’électricité. Que serions-nous sans, aujourd’hui ? Le COR se demande alors quelle progression annuelle retenir pour la productivité : non plus 1,3% qui faisait disparaître les problèmes en dopant la croissance, mais 0,7 voire 0% ? Avec ces chiffres, la progression des salaires ne fera que diminuer, comme la rémunération de l’épargne. Facile ?

 

Dépenser moins, est-ce imposer plus, ou moins ?

Plus aujourd’hui, moins demain. Par exemple, les 10% de déduction de l’impôt des retraites font l’objet de controverses. Les supprimer rapporterait 4 milliards cette année et par la suite. Immédiatement, on entend que ceci correspond à plus d’impôts pour les retraités déjà imposés et l’imposition de ceux qui ne l’étaient pas, mais graduellement. Une horreur ? Non, si on se projette à dix ans.

 

Le secret du blocage actuel

La baisse du niveau de vie des retraités : leur niveau de vie est proche de celui de la population, mais devrait être (au mieux) de 83% en 2070. Il faudra avoir le courage d’affronter le vrai futur et naviguer entre répartition et capitalisation.