Jerome Powell, Président de la Banque centrale américaine (la Fed), a été nommé par Donald Trump jusqu’à fin janvier 2022, poste renouvelable. Sauf s’il le vire avant, parce qu’il ne baisse pas les taux ! Mario Draghi part fin octobre 2019, après neuf ans de présidence de la Banque centrale européenne (BCE), poste non renouvelable.
Jerome Powell: Je t’envie Mario : encore quatre mois et tu gagneras encore plus, et tu gagnes déjà deux fois plus que moi ! Après, chacun ira à tes conférences payantes. Moi, Trump m’a tué, avec ses tweets et ses interviews : j’ai dû cesser de monter mes taux et vais bientôt les baisser.
Mario Draghi: Je compatis. Mais tu peux toujours dire que tu as tes 2% d’inflation et t’inquiètes du ralentissement en cours. Tu as une excuse, hors Trump. Moi, je pars avec une inflation au-dessous de 2%, à 1,2%, et sans avoir jamais pu monter mes taux, en neuf ans !
JP: Oui j’ai monté mes taux quatre fois, mais que je le regrette ! Mais toi tu as sauvé l’euro avec ton whatever it takes de juillet 2012. Tu es entré dans l’histoire ! Moi, je ne puis y entrer que si Trump me fait sortir d’ici !
MD: Trump est malade.
JP: Je sais. Il veut 4% de croissance en demandant aux salariés âgés de partir plus tard en retraite, aux drogués, victimes des opioïdes, aux alcooliques, victimes de la bière, et aux obèses, victimes des burgers, de retravailler, alors qu’il ferme la frontière aux latinos qui veulent, eux, travailler et qu’il freine les entrées aux asiatiques, fous d’informatique.
MD: Et moi, mes Italiens veulent payer leur dette publique, qui monte encore, avec des « mini-bons » d’état – ce qui est illégal s’ils veulent en faire une monnaie parallèle. Mes Grecs veulent d’autres assouplissements, pour se désendetter. Mes Français me jurent que leurs comptes iront mieux, plus tard. Et les Britanniques vont partir le même jour que moi, sans payer les 50 milliards d’euros qu’ils avaient promis de régler. Bref tout craque et ne tient que par mes paroles ! Et qui va me suivre : le doux Finlandais Olli Rehn ou l’Allemand Jens Weidmann, pour mettre le feu ?
JP: Moi, je me demande si résister à Trump et aux marchés financiers en ne baissant pas les taux ne serait pas la bonne façon de le calmer, ce Trump ! La bourse américaine chuterait, il se raviserait. Regarde avec le Mexique : il les menace de monter les droits de douane, pour qu’ils empêchent l’entrée des latinos du Honduras et d’ailleurs ! Et comme la bourse et les patrons n’aiment pas, il arrête tout, en disant qu’il accepte les « engagements mexicains » de faire tous leurs efforts pour freiner l’immigration ici. Le whatever it takes à la mexicaine ! Avec la Chine, ce sera une autre histoire. Elle a décidé de baisser ses taux et d’accroître son déficit budgétaire si la politique de Trump mord trop sur sa croissance, qui va « officiellement » vers 6% !
MD: Mais si tu baisses tes taux, ce qui force la Chine à faire plus de crédit, sachant que les miens sont à zéro et que j’ai dit que je les maintiendrai jusqu’à mi-2020… 9 mois après mon départ, l’euro monte ! C’est la croissance de la zone euro qui faiblit encore, ce que Trump veut ! C’est l’inflation qui va vers 1%. Je deviens japonais !
MD: Oui : les taux allemands à 10 ans sont à -0,23% et les japonais à -0,11% ! Et la France se demande ce qui lui arrive : elle veut 5 milliards à 8 ans début juin, on lui en propose trente et elle emprunte à -0,08% !
JP: Pareil ici : plus tu fais de déficit, moins c’est cher ! C’est la MMT, Modern Monetary Theory ! Si le taux d’intérêt est plus bas (2,4%) que la croissance du PIB inflation comprise (aujourd’hui à 5,1%) et si l’emprunt est en dollar, pas de problème : le poids de la dette diminue par rapport au PIB. Bien sûr, on promet que cet argent fera de bons investissements et on suppose qu’on trouvera toujours des acheteurs pour nos bons du trésor ! Les Démocrates en parlent, Trump le fait !
MD: Ici, la gauche aime cette idée… pour l’emploi, et la droite eurosceptique pour… faire sauter l’euro !
JP: Mais il faut des gens qui aient suffisamment peur pour « payer pour prêter » ! Aux États-Unis OK : nous sommes le meilleur refuge, mais, pardonne-moi, pas la zone euro !
MD: Mais quand tu dis, toi, que tu baisseras peut-être tes taux, mon euro monte. Les investisseurs étrangers calculent alors qu’ils peuvent emprunter à perte en euro, puisqu’ils gagneront en dollar ! Tu m’étrangles !
JP: No choice !
MD: Je pars !
JP: Attends-moi !