COVID-19 : France, Royaume-Uni, Espagne, comment faire baisser la contamination ? Des "Gilets jaunes des bars" maintenant ?

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Jean-Paul Betbeze décrypte l'évolution de l'épidémie de Covid-19 et son impact sur l'économie mondiale et sur le cours des principales devises.

COVID-19 : France, Royaume-Uni, Espagne, comment faire baisser la contamination ? Des

 

La France est encore plus exposée. Elle compte 1 125 grappes actives (clusters) du virus, 4069 hospitalisations dans les sept derniers jours (au 25 septembre) : soit 513 000 cas au total depuis le début de la pandémie, 11 000 en réanimation et 31 600 morts. Voilà les faits : on peut ne pas les aimer.

Le Royaume-Uni connaît aussi une hausse de cas, avec cette fois une dramatisation des autorités de santé pour légitimer des mesures de confinement, qui concerneront le quart de la population. Enfin, dans le cas espagnol, qui faisait craindre une résurgence dans le pays le plus atteint d’Europe, des mesures de confinements locaux, notamment à Madrid, semblent porter leurs fruits. Des leçons à en tirer ?

 

Ces chiffres parlent : nous vivons en France une accélération de l’épidémie, plus forte que chez nos voisins et rencontrons maintenant des refus d’adopter les mesures de fermeture demandées, notamment à Marseille. Allons-nous vers des « gilets jaunes des bars » ? La France devient le pays qui, en Europe,  connaît le plus de cas par million d’habitants après l’Espagne : 7 856 contre 15 723, un chiffre qui met en jeu la reprise dans ces deux pays. Nous avons 2 fois plus de personnes atteintes du virus que l’Allemagne par million d’habitants (7 856 contre 3 384) et 4 fois plus de décès qu’elle (485 contre 114) ! En sommes-nous conscients ?

 

Dans ce contexte, la reprise en France va-t-elle se casser, sous l’effet d’une plongée des services ? C’est la question que l’on peut se poser, quand on compare la France à l’Allemagne. « La forte augmentation du nombre de cas de Covid-19 observée en France au cours du mois de septembre permet en partie d’expliquer la première baisse mensuelle de l’activité économique depuis mai dernier… Pour l’heure tout au moins, les participants à l’enquête restent optimistes quant à leurs perspectives d’activité à douze mois. Toutefois, si l’évolution du virus venait à maintenir sa trajectoire actuelle, la confiance des entreprises pourrait être mise à mal dans les prochains mois » écrit Eliot Kerr, économiste à IHS Markit, la société d’enquêtes auprès des entrepreneurs ?

 

Les bourses traduisent ces hésitations sur l’économie mondiale : va-t-elle se retourner ? Les États-Unis sont toujours les premiers touchés au monde : 7,3 millions de cas sur un total de 33 millions et 210 000 morts contre 950 000. La Banque Centrale Américaine fait tout ce qu’elle peut, avec des taux à 0% qu’elle s’engage à maintenir jusqu’en 2023, l’essentiel se joue ailleurs : dans les trillions de dollars déversés par le Budget, et dont elle achète directement une partie.

 

Les bourses traduisent surtout les séparations que le virus fait naître. Le Nasdaq bénéficie de la modernité de ses entreprises, des capacités de l’informatique pour aider à optimiser, prévoir, réagir : il a gagné 28% depuis janvier mais faiblit depuis quelque temps, suite à des inquiétudes sur des risques de bulles de valorisations. La bourse de Shanghai réplique, de son côté, avec des informations positives que l’on a sur une économie chinoise qui a évité la récession et qui repart fortement. De l’autre côté, la bourse de Paris traduit les hésitations sur la croissance future et celle du Royaume-Uni ajoute celles du Brexit. Entre ces deux bourses qui montent et ces deux bourses qui baissent, deux autres connaissent des situations variables, tantôt en hausse, tantôt en baisse. Ce sont le Dow Jones, aidé par la Fed et le budget américain, mais inquiet des services et le Dax allemand, aidé par les exportations mais inquiet des  tensions entre Chine et USA.

 

Les matières premières épousent ces tendances boursières : l’or enregistre toujours une hausse depuis janvier, mais a passé son plus haut, peut-être inquiet des risques inflationnistes des politiques monétaires, le pétrole est toujours bas, face aux perspectives de faible croissance, aux projets de décarbonation et, à plus court terme, aux innovations d’économies d’énergie dans les bâtiments et les transports.

 

Pas de croissance et pas d’inflation : les Banques Centrales sont passées au service du financement des déficits budgétaire. Même si les dettes publiques montent, le risque n’apparaît pas dans les taux. Au contraire ! On assiste, d’un côté, à de véritables appels à l’inflation au-dessus de 2%, aux États-Unis avec la Fed, mais les taux ne bougent pas, même si les chiffres d’inflation globale se mettent à remonter ! Pire, malgré tous les soutiens à l’Italie pour faire baisser le coût de sa dette, l’activité y fléchit et les prix baissent, donc le coût réel de la dette publique italienne monte, ce qui est catastrophique pour ce pays.

Dans ces bipolarisations des bourses, des activités, des pays, le COVID-19 creuse tous les écarts de modernisation, entre biens et services, entre pays puissants et moins puissants : rien de surprenant donc si les taux de change donnent une photo très contrastée de la situation  entre les pays qui cumulent les risques (sanitaires, économiques, financiers et géopolitiques) et ceux qui les gèrent. Il faut donc examiner de près ce qui se passe en Inde, Turquie, Russie et Afrique du Sud car ces crises cumulées y pèseront longtemps.

 

Allons-nous avoir des « Gilets jaunes des bars », qui refuseront cette fois les « mesures sanitaires venues de Paris » ? C’est le nouveau risque dans cette étape de la crise qui est celui de la coexistence avec le virus. COVID-19 + révolution technologique + tensions géopolitiques + batailles municipales maintenant : il ne manquait que cela ! La note sera donc plus élevée : économique et sociale.


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