COVID-19 : et maintenant, quel impact économique ?

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Les nouvelles mesures prises par le gouvernement vont lourdement affecter des pans entiers de l’économie pour une durée vraisemblablement plus longue que celle annoncée pour l’instant. Quelles seront les conséquences ?

COVID-19 : et maintenant, quel impact économique ?

 

Atlantico.fr : Suite aux annonces du ministre de la santé Olivier Véran pour répondre à la crise sanitaire, nous allons connaître à nouveau une phase de restriction. Doit-on s’attendre à un effet cascade sur l’économie ? 

Jean-Paul Betbeze : Ecarlate ! Mais qui est donc le Conseiller en communication d’Olivier Véran : « écarlate » le Vieux Port ? Rien de tel pour qu’il le devienne et entre en dissidence : n’oublions pas que la France Insoumise y est presque chez elle ! Donc l’effet en cascade, politique surtout, est là. Olivier Véran a sans doute « médicalement raison », mais qu’en est-il économiquement et politiquement ? Médicalement raison, au vu de la montée globale des cas depuis quelques jours : 13 000 cas quotidiens, contre 1 000 à 2 000 début juillet. Une personne atteinte en infecte au moins 1,1 : le virus se propage. Mais c’est là une moyenne, d’où l’idée de cerner le problème, en raisonnant par « lignes de défense ». La première ligne se trouve dans les services de distribution, qui ont pris des mesures pour éviter le pire, les magasins vides, mais qui ont quand même vu beaucoup monter les achats en ligne, tandis que les achats de vêtements et de chaussures ont beaucoup baissé. La deuxième ligne est celle des services où le contact est plus important, avec la proximité, comme les restaurants et les bars. Après une période de fermeture, avec des aides de l’état pour les commerçants et les salariés, des ouvertures se mettent en place, avec des contraintes d’espacement, donc de moindre chiffre d’affaires. Mais, comme toujours, les gestes barrière s’oublient et les tables se densifient. Donc le virus se propage : on en voit les effets. Et c’est alors que le local entre en scène. L’économie industrielle va mieux : elle a revu les normes et les procédures. L’économie servicielle, après un redémarrage, patine – parce qu’elle est comportementale. Il faut beaucoup de formation et d’autodiscipline des clients et de psychologie des politiques, autrement c’est la chute en cascade. On ne dit pas : « écarlate » mais « très dangereux » !

 

Les mesures visent principalement le secteur du tourisme, est-ce que cela sera le seul secteur impacté ? 

Jean-Paul Betbeze : Le tourisme est impacté parce qu’il s’agit d’un ensemble de services liés : transports, hôtels, restaurants, visites… avec des problèmes d’interdépendance et surtout de risques entre ces activités : maladies, quarantaines, systèmes hospitaliers… Donc chacun reste chez soi, sort moins et moins loin, ce qui est dramatique pour les acteurs du tourisme où les frais fixes sont importants. On verra ainsi se défaire ou faiblir les acteurs les plus faibles de la filière : voyagistes, certains hôtels ou restaurants, compagnies d’avions, villes, cinémas, théâtres, spectacles de musique ou de danse, musées… Il y aura sans doute concentration d’acteurs et filières de spectacles, comme on le voit pour les salles de théâtres, organisations de musées ou de spectacles itinérants. Mais on ne voit pas bien où iront les compagnies d’avions et de croisières, avec les effets en cascade sur les filières de production des avions et des bateaux. Bien sûr, avec les vaccins, ceci va s’estomper, mais il faudra compter au moins deux ans pour retrouver une « nouvelle normalité », avec plus d’électronique et moins d’êtres humains, même s’ils seront mieux formés. Le COVID-19 frappe plus les services que l’industrie, ceci étant dû au confinement et à l’inquiétude des consommateurs, puis différentes industries à la suite des crises des services.

 

L’hypothèse de croissance pour 2021 de 8% par Bercy comptait sur une épidémie derrière nous. Si celle-ci dure tout l’hiver, quelles seront les conséquences pour l’économie du pays ?  

Jean-Paul Betbeze : Malheureusement, personne ne pense que l’épidémie est derrière nous, mais on pouvait penser que « le pire » était derrière, ce qui est désormais en question avec la « deuxième vague ». En réalité, nous allons vivre avec l’épidémie pendant des mois, la croissance de 2021 est décisive, plutôt autour de 5,8% selon l’OCDE, puis de 1 à 1,5% 2022. Le risque est une baisse de la croissance potentielle française autour de 0,8% dans les années qui suivent, donc de 0,5% par tête avec un chômage permanent élevé, par non embauche et crise des PME TPE notamment dans les services, sans inflation et sans hausse de salaire. Le risque est donc d’entrer dans une mer des sargasses de la croissance, ce qui implique une bonne utilisation des programmes dits « de relance » en cours, en France et en Europe, avec beaucoup de formation pour réussir dans ce nouveau monde : révolution technologique, tensions géopolitiques, changements climatiques, exigences sanitaires… Donc, le plus dur est devant.


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