Ce que le nouveau record atteint par le Bitcoin préfigure pour l’avenir du système bancaire

- Ecrit par

Le Bitcoin vient d'établir un nouveau record sur la première plateforme d'échange mondiale. Sa progression pourrait encore se poursuivre. Comment expliquer cette hausse et le succès du Bitcoin ? La crise du coronavirus a-t-elle eu un effet ?

Ce que le nouveau record atteint par le Bitcoin préfigure pour l’avenir du système bancaire

Atlantico.fr : Le mois dernier pour la première fois depuis 2018, le Bitcoin atteignait presque 20.000 dollars, un record jamais atteint. Comment expliquer cette hausse sans précédent et cette bonne santé du Bitcoin ? Y-a-t-il un effet coronavirus ?

Jean-Paul Betbeze : Oui le Bitcoin atteignait plus de 19 720 dollars à 11 heures le 1erdécembre, puis 18 600 à 13 heures, 19 300 à 16 heures et 18 935 à 21 heures : comme monnaie stable, il y a mieux. Comme actif à 4680 mi-mai, il n’y a guère mieux ! Le Bitcoin est un enfant à plusieurs pères : d’abord une origine magique et mathématique, par un savant inconnu qui fait produire ces Bitcoins à force de calculs informatiques, avec une idée géniale : sa limite absolue à 21 milliards d’unités assortie de codes de telle sorte que la monnaie est cachée (crypto) et échappe ainsi aux autorités, banques centrales, fiscs et polices. On a parlé de vols à son sujets, de meurtres et de maffias, mais on oublie qu’on le trouve dans des pays en crise économique ou financière : Turquie, Brésil, Colombie, Argentine, Afrique du Sud, mais peu dans des pays où la monnaie est jugée plus sûre (ou mieux surveillée) : Royaume-Uni, États-Unis, France, Allemagne ou enfin Japon.

Oui, il y a une « bonne santé du Bitcoin », avec l’idée que l’économie mondiale va aller mieux, grâce aux vaccins, et grâce aux politiques monétaires qui vont rester très accommodantes. Mais, comme disait le bon Docteur Knock : « La santé est un état précaire qui ne laisse présager rien de bon ». Le Bitcoin est un actif à suivre en permanence, à la minute.

 

Le secteur de la finance est souvent sceptique à l’égard des Bitcoins, pourquoi ?  Est-ce que cette hausse continue du Bitcoin va forcer les grandes places financières à plus prendre en compte les cryptomonnaies ? 

Jean-Paul Betbeze : Le Bitcoin, parce qu’il est très volatile est un crypto-actif, pas une crypto-monnaie : il faut le répéter sans cesse. Il est détenu pour une part de leur portefeuille par de grandes fortunes, qui ne seront pas trop affectées de tout perdre et par de jeunes traders qui prennent des risques considérables, pas calculés car la dynamique du Bitcoin amplifie toutes les nouvelles, à la hausse et à la baisse. C’est bien pourquoi le secteur bancaire est inquiet pour intégrer cet actif dans ses recommandations. Il craint les réactions des clients, rageurs d’avoir perdu en l’ayant acheté, rageurs de ne pas avoir gagné – puisqu’on ne les a pas conseillés d’en acheter !

En réalité, le Bitcoin fait partie des actifs ultra-spéculatifs qui peuvent être conseillés à l’achat seulement après reconnaissance expresse des risques encourus, et surtout avec des limites très strictes pour avoir des crédits bancaires pour en acheter plus ! Le secteur bancaire a donc un risque élevé de réputation à traiter avec ce client : il préfère que ce soit le fait de boutiques qui ont tout à y gagner, sachant que lui aurait beaucoup à y perdre !

 

Le futur des places financières est-il nécessairement dans les cryptomonnaies ?

Jean-Paul Betbeze : Le futur des places va passer par les cryptomonnaies comme le Libra et plus encore par le crypto-yuan, le crypto-euro, autrement dit les cryptomonnaies banques centrales. D’ici quelques mois, les banques vont être concurrencées ici par le crypto-euro qui permettra d’acheter et de vendre  sans compte bancaire, sans chéquier, sans billets. L’industrie bancaire de détail va être bouleversée, devant réduire ses réseaux, face à la naissance de néo-banques avec très peu de personnel, pratiquement pas d’agences, des ingénieurs et des robots vocaux, très peu chères, sauf pour des conseils payants. Dans une économie sans inflation, les frais de tenue de compte et de transactions doivent être minimaux, dans une économie où les bons du trésor rapporteront peu (et actuellement coûtent) l’épargne ira vers les obligations d’entreprises, les actions, les start-ups, classes d’actifs qui seront classés selon leurs niveaux de risques. Les cryptomonnaies vont faire exploser le système bancaire que l’on connaît au moyen des nouveaux venus.

Quant au Libra, il a dû en rabattre de sa prétention de monnaie stable mondiale, attaquée par le Sénat américain qui a vu le danger pour le dollar : attendons bientôt le Libra-dollar, un Libra-dollar égale un dollar qui va permettre toutes les transactions entre les membres des réseaux Facebook et Amazon !

 

Est-il possible que les cryptomonnaies ébranlent durablement les marchés financiers et sapent la stabilité relative qu’ils peuvent connaître actuellement ? Quels sont les risques que font courir les Bitcoins ?

Jean-Paul Betbeze : Oui : le crypto-yuan est fait pour concurrencer le dollar, notamment son pouvoir extraterritorial, il le dit clairement, et le crypto-euro doit le suivre, exactement pour cette même raison ! Le dollar pousse loin ses excès avec ses déficits jumeaux, l’euro est fragile avec ses tensions internes, le yuan opaque avec ses crédits aux entreprises publiques et tout au long des « routes de la soie » : c’est donc le temps du crypto (et de l’or) !


Atlantico

Aller sur le site