4,5 millions de riches ! Riches, cessez donc de vous cacher derrière nos 109 milliardaires, avec Bernard Arnault, les familles Hermès, Bettencourt, Wertheimer (Chanel) ou Pinault. Nous savons dorénavant qui vous êtes, grâce à l’Observatoire des inégalités. Partant du revenu médian, qui partage la population en deux parties égales, entre ceux qui gagnent plus que 1837 euros par mois (en 2019), après impôt et prestations sociales, et ceux qui gagnent moins, cet Observatoire double ce chiffre pour vous trouver.
3 673 euros : sont alors « riches », selon cette « définition », ceux qui gagnent 3 673 euros par mois pour une personne seule, 5 500 euros pour un couple sans enfant ou 7 700 euros pour un couple avec deux enfants. Cette définition se retrouve officiellement en Allemagne, soit 4 052 euros pour 7,3% de la population. L’OCDE définit la limite entre classe moyenne et hauts revenus au double du « niveau de vie médian » : la même idée, en moins précis. L’Insee préfère qualifier « d’aisés » ceux qui gagnent 1,8 fois le revenu médian : soit 3 300 euros par mois, pour 10,3% de la population.
Allons vers plus riches encore. Si l’on cherche ceux qui gagnent plus de 4 100 euros, on trouvera 3,2 millions de personnes (5% de la population). Si l’on monte plus, on trouvera le 1% des plus riches (en 2018), avec 630 000 personnes gagnant plus de 7 180 euros mensuels, puis le 0,1% des plus riches : 63 000 personnes, pour plus de 17 580 euros. Voici enfin les 0,01% plus riches : 6 300, avec plus de 54 000 euros chaque mois. Pas mal !
Viennent alors 4,5 millions de riches par le patrimoine, avec plus de 490 000 euros, soit le patrimoine médian français de 163 000 euros, multiplié arbitrairement par trois. Ce ne sont pas tous les mêmes que les riches en revenu mais presque, « au début » du moins, puisque la pyramide des patrimoines est plus resserrée que celle des revenus. Toujours d’après la même source, à partir de 490 000 euros de patrimoine des « riches possédants », seront vite moins nombreux. Avec 600 000, en voilà 2,9 millions, avec 1,2 million de millionnaires et au-delà, mais encore loin du patrimoine immobilier nécessaire (1,3 million) pour rejoindre les 143 000 imposés sur la fortune immobilière (IFI). Ainsi, par le revenu et/ou par le patrimoine, la France abrite entre 5 et 10 millions de « riches », même s’ils ne sont pas tous conscients de leur état !
Bien sûr, ces chiffres sont sujets à caution. Le coût de la vie et plus encore les prix des logements varient selon les quartiers, les villes et les régions. Tous ces chiffres sont « déclaratifs », ce qui veut dire qu’ils ne disent pas tout. Ils ne disent rien non plus du ressenti : nombre de Français « riches » ne se vivent pas comme tels. Seuls les très riches le sont, selon les riches, avec leurs bateaux ou leurs châteaux, ce qui n’empêche pas la France d’être jugée « très » inégalitaire par les Français. Mais « très », c’est moins qu’aux États-Unis ou en Allemagne !
Mais ces chiffres sont myopes : la chute de la bourse et la stagnation des prix du mètre carré, plus l’inflation qui rogne les revenus des catégories intermédiaires, vont-ils réduire le nombre de riches ? Comment les retraites seront-elles payées ? Les dettes remboursées ? Comment le réchauffement climatique sera-t-il arrêté ? Par l’impôt ?
En plus, ils sont figés : comment cette richesse va-t-elle « ruisseler » ? Par l’héritage bien sûr, qui fait que les riches vieux, retraités ou proches de l’être, bénéficient de la richesse de leurs parents, les petits enfants devant attendre. Pour ruisseler plus vite, certains veulent taxer plus l’immobilier ou l’héritage, tandis que d’autres proposent de détaxer les petits enfants, pour sauter une génération. Mais tous oublient un « ruissellement » permanent : quand les « riches » vont au restaurant, à l’hôtel ou ailleurs, ils font circuler leur… liquide, permettant à d’autres de s’enrichir. Et quand des « experts » calculent en années de SMIC la valeur d’un logement ou le patrimoine action d’un super-riche, ceci n’a de sens que si d’autres très riches l’achètent, sauf à le vendre à des étrangers ou attendre que bourse et immobilier s’effondrent !
Enfin, ils sont datés : ils oublient la révolution technologique en cours. Avec elle, voilà des métiers très bien payés, des start-ups qui secouent nos vielles richesses et surtout de nouvelles formations qui vont partout avec, pour avancer. Place aux jeunes et aux « nouveaux » riches !