Les guerres démographiques de religions

- Ecrit par

 Les guerres démographiques de religions

 

La terrible série d’attentats religieux que nous vivons a des sources nombreuses et complexes : religieuses sûr, mais aussi économiques, géopolitiques et démographiques. Le monde économique voit se réduire l’hégémonie américaine, avec Trump ou Biden, pour aller, au moins, vers un partage d’influence avec la Chine. Il s’agit là d’un mouvement tectonique commencé depuis plusieurs années. Il va se poursuivre, avec de nombreuses ramifications, au détriment des religions de l’Occident au sens large, sachant que la Chine et l’Inde sont assez à part.

 

Christianisme et Islamisme sont alors les seules religions qui peuvent s’émanciper de leurs territoires d’origine, autrement dit s’étendre. Ainsi, en 2050, elles se rejoindraient presque par leur nombre de fidèles (ou de personnes se réclamant d’une d’entre elles), ce qui est une première dans l’histoire. Le PEW Center Research, d’où viennent ces résultats, nous donne une vision de 2050, où le nombre de chrétiens continuerait à croître, mais assez lentement, passant de 2,2 milliards en 2010 à 2,9, tandis que celui des musulmans se développerait plus rapidement, passant aux mêmes dates de 1,6 à 2,8 milliards. L’Hindouisme progresserait à 1,4 milliard de croyants, contre 1,1 en 2010. Il resterait la troisième religion du monde de 2050, avec 15% de la population estimée, par différence avec les 31,4% de Chrétiens et les 29,7% de Musulmans. Les athées, agnostiques et ceux qui ne se reconnaissent pas dans une religion, même si leur nombre croît aux États-Unis et en France, augmenteraient peu en nombre, de 1,1 à 1,2 milliard de personnes entre 2010 et 2050, baissant en part dans la population de 16 à 13% selon le PEW Center, ce qui n’est pas un résultat accepté partout.

 

Bien sûr, ceci est mécanique. La démographie et le taux de fertilité sont en effet les bases retenues dans toutes ces projections : 2,7% pour les Chrétiens contre 3,1% pour les Musulmans (le taux le plus élevé de tous), qui forment ainsi le groupe le plus jeune. En 2050, les Musulmans devraient passer de 1,4 à 2,4% de la population en Amérique du Nord et de 8,4 à 10,2% en Europe. Les Chrétiens voient leur part dans la population baisser en Europe et aux États-Unis, l’Afrique sub-saharienne étant devenue leur foyerde développement, face à la montée de l’Islam et à la déchristianisation qui touche l’Europe.

 

Bien sûr, on peut juger sommaire d’analyser les évolutions des religions, et les tensions qui peuvent s’ensuivre, à partir d’enquêtes sur les appartenances actuelles et de prévisions démographiques, mais comment faire autrement ? Peut-on éviter de s’interroger sur la géopolitique des religions dans un monde qui aurait autant de Musulmans que de Chrétiens, avec une Inde assez à part et une Chine difficile à cerner, elle qui encadre de très près les Catholiques et enferme, dit-on, 800 000 Ouighours sur les 11 millions de membres de cette ethnie musulmane et turcophone ? Quelles conséquences aura cette égalisation des deux grandes religions du monde ?

 

En 2100, toujours suivant cette étude, la situation économique et religieuse serait plus bousculée encore. Il y aurait alors 34,9% de Musulmans et 33,8% de Chrétiens. La 1ère population du monde serait indienne, sa religion (interne) très largement dominante sera l’hindouisme et son PIB encore lointain de ceux de la Chine et des États-Unis. La 2° population mondiale serait chinoise, son PIB le premier du monde et son idéologie (sa religion ?) sera(it) une combinaison de marxisme, de « pensée Xi » et de confucianisme. La 3° population serait celle du Nigéria, très majoritairement musulmane, avec une économie en développement et un pétrole dont le prix baisse. Enfin, la 4° population celle des États-Unis, 2° économie du monde par le PIB et très majoritairement chrétienne.

 

Ainsi, dans 80 ans, les classements des pays en termes de populations, religions et PIB seraient changés. Pire, une chose est le PIB, une autre le PIB par tête : ce monde chamboulé sera donc aussi plus inégalitaire, sans oublier son réchauffement avec ses effets migratoires.

 

Bien sûr, enfin, tout cela est hypothétique et à long terme. Mais que fait-on entretemps ? Suffit-il de réduire ici les écarts de richesse et de manger écolo, ou faut-il se former plus aux changements technologiques et culturels en cours, travailler aux rapports entre Islam et Christianisme et surtout renforcer nos liens avec l’Afrique, où tout se jouera ? 2100 ? C’est maintenant : on le voit.