La cliente appelle son chargé d'affaires à la banque

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 La cliente appelle son chargé d'affaires à la banque

La cliente : Ah ! Bonjour ! Enfin, vous êtes rentré de vacances !

Le chargé d’affaires : Oui, ce lundi : j’avais bien besoin de repos. Mais avant, j’étais quand même confiné devant mon téléphone, pour répondre aux clients.

 

La C : Moi aussi, j’ai besoin de repos, mais je ne vous ai pas dérangé. Je regardais monter les cas de COVID et baisser mes titres ! Aujourd’hui, j’ai besoin de vous parce que je ne sais pas quoi faire de mon argent !

Le c : Tous mes clients m’appellent et me disent la même chose ! Certes vous avez moins gagné d’argent, puisque vous avez été payée à temps partiel, mais vous n’avez pratiquement pas dépensé. Uniquement pour vous nourrir, pas d’essence et de frais de transport pour le travail, pas de restaurants, pas de vacances, pas de vêtements nouveaux, même pas de soldes ! Rien : que du liquide !

 

La C : Oui, j’ai bien vu les nouvelles et les chiffres de l’Insee : je m’y retrouve, pour une fois ! Mon revenu a un peu baissé, mais ma consommation s’est effondrée. Oui, j’ai payé plus cher pour me nourrir à proximité, mais tout le reste je l’ai épargné. Par force. C’est même pour ça que je vous appelle : j’ai rempli mon Livret A et celui de mon mari. Je sais, ça ne rapporte rien, mais il n’y a pas de risque – normalement. Ce n’est pas comme mes actions qui baissent, mes bons du trésor qui ne rapportent rien et qui financent notre État qui en profite. Et mon argent chez vous, que va-t-il lui arriver avec les pertes que vous annoncez sur vos crédits !

Le c : Ne vous inquiétez pas. D’abord, pour vos titres, il va falloir s’armer de patience. Si vous vendez, vous perdez et si vous avez de l’argent, c’est la preuve que vous n’avez pas besoin de vendre. Tant mieux ! Et pour votre deuxième point : oui, il va y avoir des pertes dans les entreprises que nous avons soutenues, autrement c’était l’effondrement.

 

La C : Je patiente et souhaite que vous ayez raison. Alors, mon argent chez vous en compte courant, qu’est-ce que j’en fais ?

Le c : C’est mieux d’avoir trop d’argent que le contraire.

 

La C : Merci !

Le c : Pardon ! Mais vous avez vu que la bourse s’est bien reprise.

 

La C : Parlons-en : le Cac 40 a baissé de 16% depuis janvier. Je sais, il s’est amélioré depuis mai, mais quand même ! Le Dow Jones est au niveau de début janvier, le Nasdaq a fait plus de 30% et l’or près de 30%. Alors, qu’est-ce que je fais ?

Le c : Vous avez malheureusement raison et le futur peut être pire pour votre assurance vie : moins de 1% cette année. Je crois que le Cac 40 peut remonter, certes il est plombé par ses valeurs pétrolières, le fameux Total et les valeurs bancaires se traînent, mais sans s’effondrer – pas d’inquiétude ! Si vous voulez gagner plus d’argent, il faudra prendre plus de risques.

 

La C : En ne prenant pas de risques, je perds de l’argent !

Le c : Je crois que vous devriez aller vers la Chine. La Bourse de Shanghai a pris 11% depuis le début de l’année et ce n’est pas fini. Je n’ose pas vous dire d’aller vers Facebook ou Apple, parce que leurs prix sont fous, comme Tesla. Mais ce qui est plus grave, c’est que vous devriez vendre vos obligations publiques françaises : si les taux se mettent à monter, après ce qu’a raconté Jerome Powell, le patron de la Banque Centrale Américaine jeudi 27, vous allez perdre sur votre portefeuille !

 

La C : Mais c’est fou : il n’y a pas de croissance ici, pas d’inflation : – 0,2% en août !

Le c : Je sais, mais si les taux remontent, avec le creusement des déficits obligataires dans le monde, ce sera un carnage.

 

La C : Un carnage !

Le c : Disons : difficile.

 

La C : J’ai compris ! Alors vous, une banque française, vous me conseillez de vendre mes bons d’état français et d’acheter des actions chinoises !

Le c : Je m’occupe de mes clients ! C’est vrai que j’aurais dû vous prévenir en mars, je le regrette.

 

La C : Moi aussi.

Le c : Vous pouvez acheter les valeurs high-tech France où Allemagne, mais si vous voulez le Nasdaq, c’est avec des pièces d’or, pour équilibrer ! Je ne vous conseille pas les PME parce qu’elles vont beaucoup souffrir : la rentrée sera terrible.

 

La C : Alors, quand j’ai trop d’épargne et ne sais pas quoi en faire, vous me dites qu’il faut que j’en aie davantage pour venir vous voir plus tard, en attendant que la situation se détériore plus et que je patiente pour mes pertes !

Le c : Je m’occupe de mes clients !

 

La C : Ce n’était pas mal quand vous ne répondiez pas, en disant que vous étiez confiné !

Le c : Je m’oc…

 

La C : je sais !