L’ISF-2022 revient. On parle de plus en plus de lui pour la Présidentielle d’avril. Bientôt, les candidats de toutes couleurs politiques devront dire s’ils y sont, ou non, favorables pour nous sortir d’affaire. On comprend leur mutisme. Pourtant, on croyait l’ISF disparu sous les critiques (l’Impôt pour Sortir de France) et les lois. On croyait que la France start-up nation allait convaincre les chercheurs de chercher et les investisseurs d’investir ici, sans les faire douter. On pensait que ce que l’on entendait ici par inciter à investir, innover, relocaliser et embaucher allait marcher.
Car il ne faut pas sous-estimer la profondeur de la racine française à « l’égalité par la fiscalité de plus riche que soi », non par la croissance et l’effort. C’est surtout ne pas voir que le COVID-19 va pousser au retour de l’ISF-2022. Il permettra, bien sûr, de payer la facture des aides et crédits qui ont évité le pire, puis alimenté la reprise ! On voit bien, en effet, que l’inflation, si faible, ne réduira pas la dette. On est forcé d’admettre qu’effacer la dette publique française détenue par la Banque de France est impossible et, pire, contre-indiqué. Ce serait dire qu’on est en faillite !
Va donc pour l’ISF-2022 ! C’est le retour rajeuni de l’IGF (Impôt sur les Grandes Fortunes), évadé en 1982 du laboratoire de Matignon, dirigé par Pierre Mauroy après l’élection de François Mitterrand. Il atteint alors 104 000 foyers déclarant posséder plus de 3 millions de Francs. Supprimé lors de l’alternance de 1986-1988, il revient comme ISF (Impôt sur la Fortune), avec Michel Rocard, avec l’idée de financer le RMI, Revenu Minimum d’insertion. Il demeure depuis, la droite ayant jugé que sa fin à lui signerait la sienne. Mais ceci n’empêche pas les modifications de barèmes, tantôt à droite (le taux maximum baisse ainsi de 1,8% en 2011 à 0,5% en 2012) avant de remonter à 1,5% à partir de 2013, avec François Hollande.
Mais l’ISF disparaît en 2018 avec Emmanuel Macron… pour être remplacé par l’IFI, Impôt sur la seule Fortune Immobilière à partir d’un patrimoine immobilier net de 1,3 million d’euros, avec un taux de 0,5%, jusqu’à 1,5% au-delà de 10 millions. Avec l’IFI, il s’agit de taxer la rente et les plus-values immobilières latentes, les « enrichissements sans cause », pour pousser à un investissement jugé productif, de croissance et d’emploi. Avec l’ISF, c’était « la fortune » au sens large qui « comptait ». On passe ainsi à 350 000 contributeurs pour plus de 4,2 milliards, soit une imposition moyenne de 15 000 euros.
Avec l’IFI, c’est la fortune « improductive » qui est visée, l’immobilier, celle qui ne prend pas de risque dans « l’économie réelle ». Restent alors 140 000 contribuables pour 2,1 milliards récoltés, soit une perte fiscale de 2,1 milliards entre ISF et IFI, contre 3 prévus. L’IFI rapporte ainsi plus que calculé, et sans doute plus en 2021, l’immobilier ayant monté. Avec la pandémie en effet, la Banque Centrale Européenne a poussé à une très forte baisse des taux courts et longs, ce qui a fait monter l’immobilier, et aussi la bourse !
Mais il sera dur à l’ISF-2022 de trouver 5 milliards, sachant que nous en avons 200 en déficit budgétaire. Allez-y quand même, mais faites attention, nous dit le FMI ! Il note en effet, le 16 avril 2021, qu’une surtaxe sur les ménages aux plus hauts revenus est « l’option la plus simple et rapide » (!), plus une autre sur les « surprofits » des entreprises, sachant qu’une taxe unique et exceptionnelle sur la fortune marche rarement et qu’une hausse d’une taxe déjà en place (chez nous ?) aurait un « modeste potentiel ». Merci, et donc ? Donc, pour le FMI, la crise sanitaire peut améliorer les conditions d’imposition ! Merci encore, mais comment traiter, « en même temps », les effets de la révolution informatique qui détruit les emplois moins qualifiés et les entreprises en retard technique et de remboursement des aides, plus le réchauffement planétaire ?
N’empêche : taxons ! Pour réduire la dette COVID-19, 66% des Français (sondage Odoxa, juillet) veulent quand même taxer les grandes fortunes (au-delà de 600 000 euros !) contre 38% qui songent à réduire le nombre de fonctionnaires et 19% à repousser l’âge de départ en retraite. Taxer plus les hauts salaires rencontre 48% de soutiens, un impôt plus large que l’IFI 38% et 15% pour plus de taxes de succession sur les « plus gros patrimoines ». C’est l’autre qu’il faut taxer, comme pour le vaccin !