G20 à Osaka : débattre ou se battre ?

- Ecrit par

 G20 à Osaka : débattre ou se battre ?

Eviter une récession mondiale, du fait des tensions commerciales entre États-Unis et Chine, et plus encore réduire les risques de dérapages guerriers : c’est la vraie préoccupation du G20 d’Osaka, les 28 et 29 juin.

Nous serons loin du programme officiel, si positif et paisible. « Comment soutenir la croissance mondiale et réduire le chômage, notamment par l’échange et l’investissement, comment soutenir l’innovation, lutter contre le réchauffement climatique, promouvoir le rôle des femmes, encourager le développement et améliorer la santé ? » sont au menu. En fait, il sera question de savoir ce qu’ « équilibrer les échanges entre États-Unis et Chine » veut dire. On s’interrogera ainsi pour savoir comment protéger la propriété intellectuelle, ouvrir les marchés publics, réduire les entorses au libre-échange du fait des subventions et de la propriété publique des entreprises, sans oublier les freins à l’installation d’entreprises étrangères. On aura reconnu Chine et États-Unis derrière ces questions, mais qu’est-ce qu’elles cachent ?

Une troisième étape s’ouvre-t-elle dans l’histoire du G20 ? Plus « seulement » une crise financière à résoudre, mais une conflagration à « calmer » ?

Première étape, c’était décembre 1999 à Berlin. Il s’agissait, avec seulement les Ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales, de répondre aux crises financières du temps en faisant se coordonner les responsables. Deuxième grande étape, novembre 2008 à Washington, avec les chefs d’état et de gouvernement cette fois : il s’agissait de lutter contre la crise financière mondiale qui venait d’éclater, et de réformer le système monétaire. Entre ces étapes, et grâce aux succès obtenus, le G20 a étendu ses ambitions. Il veut mieux coordonner les politiques de ses membres pour promouvoir une croissance durable et stable. Il cherche des réglementations plus contraignantes pour réduire les risques de crises financières et améliorer l’architecture du système international. Quelle beauté !

 

Mais comment donc Donald Trump va-t-il réagir dans ce G20, apothéose d’un multilatéralisme qu’il exècre ? Crise ou poignées de main avec Xi Jinping, esclandres ou grand accord ?

Pas facile pour lui de dealer dans cette grande salle, avec les dirigeants chinois, russes, mexicains et turcs (pas amis), allemands et canadiens (moins amis), australiens, italiens, français (amis sans plus), britanniques (amis inquiets). Les vrais amis seront japonais et coréens, mais prudents car Chine et Corée du Nord ne sont pas loin, et surtout saoudiens, pas bien vus.

 

En fait, le G20 est plus une instance de coopération face à un risque commun que de gestion de conflits violents entre membres.

Ce qu’il permet, c’est de coordonner les politiques fiscales et d’échange et de renforcer le système bancaire et financier pour qu’il soit plus pro-croissance, dans ce monde vieillissant. Mais réduire les déséquilibres « excessifs » des balances commerciales et financières, ou s’engager sur le climat ne seront pas faciles ! Surtout, l’essentiel est ailleurs.

 

Ce qui se passe entre États-Unis et Chine n’est pas une histoire de « déséquilibres économiques et financiers », mais l’affrontement de deux logiques, capitalisme libéral côté américain, pour dominer encore, contre capitalisme illibéral côté chinois, pour l’endiguer.

La politique est au service de l’économie aux États-Unis, l’inverse en Chine. Aussi, quand les premiers demandent l’ouverture aux marchés publics ou critiquent la propriété publique des entreprises des seconds comme anticoncurrentielle, ils ne veulent pas « une réciprocité » ou « un équilibre », mais un changement de régime. Tout le monde le sait : ce jeu de la coordination est hypocrite, les tensions commerciales un prétexte. On peut toujours vouloir battre l’autre aux cartes dans des réunions formelles, mais quand l’un joue au poker et l’autre au bridge, c’est compliqué. Le « théâtre des opérations » se déplace alors vers d’autres sujets (Huawei et la 5G) et d’autres pays (Irak, Iran, Ormuz). Il s’éloigne de toute solution bilatérale, le rêve de Trump, et implique plus d’acteurs dans le combat libéralisme-illibéralisme, l’ambition de Xi, qui promet « stabilité » contre « démocratie ».

 

Les G20 sont l’occasion de manifestations contre ces riches et puissants qui nous gouvernent. Ici, Biarritz fin août pour le G7 promet. Mais lutter contre la pollution ou les inégalités est une chose, pour la liberté une autre, certes moins fun.