La fonte des fonds souverains fera-t-elle fondre nos fonds ?

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Au contraire, si on est astucieux ! D’abord, comprenons les deux risques mondiaux actuels. Risque un : l’Arabie saoudite vend ses avoirs américains. Risque deux : le prix du pétrole reste à 50 dollars le baril. Si l’Arabie saoudite vend, est-ce la crise boursière mondiale ? Si les fonds souverains, coincés, réduisent leurs avoirs, quel sera l’effet sur notre épargne ?

 La fonte des fonds souverains fera-t-elle fondre nos fonds ?

Ces deux questions viennent au pire moment pour nous : la Bourse de Paris se réveille à peine. Va-t-elle replonger ou rattraper son retard ? Sur 10 ans, l’indice de la Bourse de Paris a en effet perdu plus de 10 %, tandis que les Bourses de New York et de Francfort ont augmenté, elles, de plus de 50 %. Et voilà que les dernières nouvelles sont bonnes : reprise économique en zone euro et en France, remontée des marges des entreprises en France, taux d’intérêt bas, euro toujours calme autour de 1,1 euro pour 1 dollar. Tout ceci peut alimenter l’espoir d’une Bourse de Paris qui rebondit enfin. Mais.

Mais, le Congrès américain vient de décider, à l’unanimité, que les parents des victimes du 11 septembre pourraient poursuivre l’Arabie saoudite en justice. Elle aurait financé Al-Qaïda. L’Arabie saoudite a immédiatement répondu qu’elle vendrait alors ses avoirs financiers américains ! Le hasard faisant bien les choses, on apprend qu’elle détient (au 31 mars 2016) 117 milliards de bons du Trésor, sur un total de 13 400. Sa part est donc relativement modeste. Les marchés s’inquiétaient et pensaient à plus de 700 ! Rien à voir avec les 1245 milliards de la Chine ou les 1137 milliards du Japon, mais quand même.

Mais quid si le pétrole reste scotché sous 50 dollars le baril, contre 100 en 2014 ? Les fonds souverains s’élevaient à 7,3 trilliards de dollars l’année dernière, dont 4,2 venant du pétrole et du gaz, selon le SWFI. Le Sovereign Wealth Fund Institute, installé à Las Vegas, compile toutes les données sur le sujet. En juin 2015, la Norvège avait selon lui 873 milliards de dollars dans son Government Pension Fund, les Emirats arabes unis 750 (dans Abhu Dabi Investment Authority), l’Arabie saoudite 686 (SAMA Foreign Holdings) et le Koweit 592 (Kuwait Investment Authority).

Mais aujourd’hui ? Que vont devenir toutes ces épargnes devant ce nouveau cycle, surprenant, des matières premières ? La situation s’améliore dans l’agriculture, pas dans le cuivre et l’acier. Elle se stabilise avec difficulté pour le pétrole, mais à 50 dollars le baril. Peut-être les lecteurs de cette lettre se souviennent-ils de celle du 22 mars 2015 : « Le pétrole à 25 dollars le baril ? ». Elle est publiée au moment où le baril était à 55 dollars, venant de 100 en juin 2014. De fait, le Brent atteindra 28 dollars le 20 janvier 2016 et le WTI 26 dollars le 11 février. Depuis, c’est une remontée politique qui a lieu, tout comme la baisse l’avait été, d’ailleurs. L’Arabie saoudite a en effet abandonné son rôle de gendarme des marchés. Jusque-là, elle réduisait seule sa production, pour limiter la baisse des prix. Pourquoi cet abandon ? Parce qu’elle veut limiter la production américaine de gaz de schiste, ce nouveau concurrent, et plus encore la production iranienne de pétrole, maintenant que les sanctions américaines se lèvent. Donc il y aura beaucoup de pétrole dans ce monde en faible reprise. Donc les prix ne vont pas rebondir.

Alors les fonds souverains devront s’ajuster. Sur un an, ils ont vendu 400 milliards d’actions, leur portefeuille passant de 3 à 2,6 trilliards. On a vu les grandes bourses baisser avec le pétrole. Ce n’est pas seulement le fait que les fonds sont pris à la gorge et vendent, mais aussi l’idée que si le pétrole baisse, l’activité faiblit, donc la croissance, donc les bourses. La double peine.

Et demain ? Les fonds s’énervent. Le fonds norvégien va attaquer Volkswagen pour son maquillage des tests de pollution. Surtout, il va leur falloir trouver d’autres placements sûrs, liquides et rentables. Pour les obligations publiques et privées, avec les politiques non conventionnelles menées par les grandes banques centrales, le risque devient très faible, mais le rendement minime.

Donc il faut aller vers plus d’actions ! Avec les niveaux de cours actuels, les rendements sont sympathiques : à Paris, c’est de 6 à 8 % ! Soutenons donc la reprise économique et accompagnons-la d’une baisse de l’impôt sur les sociétés. Le résultat sera aussi rapide que positif : les fonds viendront, la bourse montera… c’est maintenant !