Mots européens : Mario Draghi a dû patienter avant de parler de cet « euro trop fort ». Pourquoi ? Parce qu’il fallait attendre que les pays du sud aillent mieux et puissent se financer directement sur les marchés. Se plaindre plus tôt de cet « euro trop fort » qui affaiblissait la croissance, serrait les salaires et diminuait l’inflation, au risque de la déflation, aurait inquiété. Maintenant, Mario Draghi peut dire que les pays du sud vont mieux et que les marchés financiers l’ont bien vu. Mais ils ne doivent pas en rajouter, au risque de défaire ce qu’ils ont fait.
Taux américains : en face, Janet Yellen ne dit surtout pas qu’elle veut un dollar faible, ce qui inquièterait les marchés. Elle se soucie des chômeurs de longue durée. Elle veut soutenir la reprise et, maintenant, veut réduire encore le taux de chômage en s’attaquant aux découragés, à ceux qui ont quitté le marché du travail. Comment lui en vouloir de cette noble cause, qui détourne ainsi l’attention ? En quelques jours, au lieu d’envoyer aux marchés l’idée qu’elle allait monter ses taux courts dans un an, elle a au moins gagné six mois. Six mois de taux bas. Six mois de dollar faible.
La Chine a bien compris cette tactique américaine et fait baisser sa propre monnaie (!), comme le Japon et les autres pays d’Asie. Seuls montent encore la Livre et le Franc suisse, avant de prendre bientôt la parole.
Quand Mario Draghi parle de cet « euro trop fort », il met le dollar au cœur du dispositif mondial. Il retourne le compliment aux donneurs de leçons que sont le FMI et les Etats-Unis. A eux donc de jouer. A nous de parler. Fort.