En attendant la récession américaine de 2021

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Elle finira par arriver. Et tout sera fait pour qu’elle se déclenche courant 2021… après la réélection de Donald Trump, dont le mandat s’achève le 20 janvier 2021. En effet, pour réussir autant que possible les élections intermédiaires de novembre 2018 et préparer la campagne de 2020, il faut absolument que l’économie – et la bourse – « tiennent ». C’est la base de la stratégie économique, fiscale, financière et sociale de Donald Trump, avec son volet monétaire géré par la Banque centrale américaine, alias Jerome Powell, son patron. Calcul conspirationniste, rêve, cauchemar ? En tout cas, c’est la meilleure base de travail pour imaginer les mois à venir.

 En attendant la récession américaine de 2021

Aujourd’hui, tout va ! Jerome Powell ne tarit pas d’éloges sur l’économie américaine. Sa croissance est solide. Elle va vers 2,8% cette année, puis un peu moins : 2,4% en 2019, 2% en 2020. Cette situation obéit aux deux objectifs de la banque centrale : les États-Unis sont en plein-emploi, avec un taux de chômage vers 3,8% cette année, puis 3,6% (un record), et à leur cible d’inflation : 2,1% pour les prix à la consommation des ménages (hors nourriture et énergie).

Et tout va mieux, depuis longtemps ! L’économie américaine est sortie de récession en juin 2009, selon le NBER (National Bureau of Economic Research). 97 mois d’expansion : c’est la quatrième durée dans l’histoire économique américaine et, aussi, depuis la seconde guerre mondiale (les cycles antérieurs étaient plus courts) ! Le record absolu de longueur est de 128 mois. Donc, si l’économie « tient » jusqu’à la seconde prestation de serment de Donald Trump, elle aura avec lui (grâce à lui ?) connu le deuxième plus long cycle d’expansion de son histoire : 115 mois !

Mais la perfection n’est pas faite pour durer. Oui, fin 2020, l’économie sera « parfaite »  selon les prévisions de la Banque centrale américaine : croissance à 2%, taux de chômage à 3,5%, inflation à 2,1%. Mais voici les nuages : toujours selon la Fed, les taux d’intérêt à court terme seront alors à 3,4% et les taux longs à 4% environ. Par rapport à la situation actuelle, la Banque centrale américaine aura donc augmenté ses taux courts 2 fois en 2018, 3 en 2019 et 2 en 2020. Ils seront passés de 2% aujourd’hui à 3,4%, et les taux longs de 2,9 aux alentours de 3,5%. La courbe des taux sera donc « plate », comme disent les marchés financiers… ce qui les inquiétera. Ce sera la seule ombre au tableau, une ombre financière, mais très menaçante.

En effet, si les taux courts sont égaux aux taux longs (courbe des taux « plate »), la prochaine hausse des taux courts les inversera. Les marchés se diront alors que l’économie subit un serrage et les investisseurs vont s’inquiéter. Fin 2020, les prévisions donnent l’image d’une économie « en forme » et d’une finance « aussi prête que possible ». Prête à plonger ?

Tout dépendra de l’évolution de ce monde, des rapports États-Unis-Chine, pas seulement des élections de novembre 2018, de l’enquête de Mueller sur l’influence russe dans l’élection passée de Donald Trump, de sa santé, de scandales et tensions qui l’entourent (y compris dans son mariage), de la stature du futur candidat démocrate… Le futur devient plus incertain, plus dangereux.

Alors Jerome Powell va jouer les prolongations. Comment ? Réponse : en montant les taux et en parlant plus souvent ! D’abord, il faut qu’il monte les taux, puisque la politique fiscale de Trump, par la baisse des impôts, accroît les revenus, donc l’inflation, et aussi le déficit extérieur, en augmentant la demande interne. En même temps, ses hausses des taxes à l’importation font aussi monter les prix. Ensuite et surtout, il faut qu’il parle plus, pour calmer les marchés. Tout se joue en effet sur les taux longs dans cette fameuse « courbe des taux ». La Fed, non seulement n’achète plus de bons du trésor mais vend les siens, au moment où le Trésor américain va en vendre plus que jamais, avec la montée du déficit budgétaire ! A qui : à la Chine ? Non bien sûr : elle vend ceux qu’elle a… un peu par nécessité économique, car elle ralentit, surtout pour envoyer des messages aux marchés, pour les alerter, et à Donald Trump, pour le prévenir qu’elle va continuer. La Fed va donc devoir monter les taux courts et calmer les taux longs !

Alors, mais seulement quand les choses iront moins bien et que Trump sera réélu, Jerome Powell baissera ses taux. Il ne les a fait monter que pour ça ! Alors Donald finira son mandat, et il faudra tout réparer.

 

Egalement publié sur Atlantico.