Désolé : la crise de 2020 est (normalement) reportée à 2022

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 Désolé : la crise de 2020 est (normalement) reportée à 2022

Imprévisible Trump ! Après tweets, cris et chocs, était (normalement) venu le temps de l’apaisement. Avec tous les remous occasionnés avec la Chine (surtout), Donald Trump avait propagé inquiétudes et tensions : Mexique, Iran, Turquie, Russie… jusqu’à faire ralentir l’économie mondiale. Juste avant de se rendre compte que 2020 était l’année de sa réélection (3 novembre) ! Il avait donc décidé de calmer le jeu : impossible de prendre le risque d’une récession Trump-made !  Se préoccupant un peu de l’impeachment, mais sans trop le montrer, il avance, avec la signature de l’accord commercial entre États-Unis, Mexique et Canada (USMCA), le « début d’un protocole d’accord » avec la Chine, une « sorte de calme » avec la Russie et la Turquie. Mais, après une « espèce de retenue » avec l’Iran, c’est l’escalade, avec la mort à Bagdad du Chef des opérations extérieures des Gardiens de la Révolution ! Patatras ou non ?

Les grands argentiers apportaient leurs pierres à cette Arche de paix. Jerome Powell, à la Banque centrale américaine, disait exactement, le 11 septembre 2019, ce que les marchés attendaient : le ralentissement tant craint de mi-2019 s’éloignait, l’économie mondiale se stabilisait. La croissance américaine se poursuivrait, avec un léger ralentissement à 2% en 2020 (contre 2,2% en 2019), puis 1,9% en 2021 et 1,8% en 2022. L’inflation irait vers 2% en 2021. Donc Jerome Powell ne bougerait pas ses taux : ils resteront entre 1,5 et 1,75% jusqu’en 2021, pour aller à 2,5% à long terme. Mais rien ne pressait.

Christine Lagarde, pour sa première prestation comme Présidente de la Banque centrale Européenne, le 12 décembre, renchérissait sur la tranquillité. Elle s’inscrivait dans la ligne de son prédécesseur, reprenant son introduction du 24 octobre, la dernière de son mandat. Les taux seraient inchangés (à 0%) « jusqu’à ce que nous ayons constaté que les perspectives d’inflation convergent durablement vers un niveau suffisamment proche de, mais inférieur à 2% sur notre horizon de projection, et que cette convergence se reflète de manière cohérente dans la dynamique d’inflation sous-jacente ». Nous n’y sommes pas !

Trop beau pour être vrai ? Bien sûr, il y aura toujours de mauvaises surprises dans cette séquence, outre la tension iranienne qui fait aujourd’hui monter le prix du pétrole, baisser les bourses et les taux à long terme. Le Brexit peut faire naître des tensions, puisque Boris Johnson s’interdit, par la loi, de demander une prolongation à la sortie fin 2020. Ceci promet des énervements en juin, date limite où il devrait la demander. Autrement, faute d’accord accepté par tous en décembre, il risque le no-deal, « le traitement OMC » ! A moins qu’il ne le veuille ! Pire s’il refuse de payer les 30 à 40 milliards de livres du divorce : le Royaume-Uni risquerait d’être déclaré en faillite ! Un jeu à la Trump ! Les pays fragiles ou très fragiles : Venezuela, Liban, Mexique, Inde, Argentine… peuvent rencontrer de plus graves difficultés encore. Et la tension avec l’Iran va-t-elle tout précipiter, ébranler les régions, voire le système financier tout entier ?

Mais alors, pourquoi repousser la « grande crise » à 2022 ? Parce que les pays en plein emploi et reposant sur la demande interne comme les États-Unis peuvent résister assez longtemps. Parce que les banques centrales pourront baisser les taux courts, en les rendant même tous négatifs et acheter plus d’emprunts d’état et d’obligations privées. La Fed a longuement discuté des effets pervers des taux négatifs et assuré ne pas vouloir y recourir, sauf si elle n’a pas le choix. Et ce sera partout pareil : la « grande crise de la dette » de 2007-2008 a été résolue par plus de dette, avec une croissance mondiale qui, malgré tout, patine. Même chose en zone euro. Et la Chine n’est pas un modèle de transparence sur sa croissance et la qualité de ses crédits.

Alors : pire après ? Ou mieux. Rien n’empêche d’ajouter les drames : réchauffement, vieillissement, pénuries d’eau, tensions entre États-Unis – Chine et ailleurs, guerres de religions et des nouveaux empires, malencontreux hasards. Mais on peut se dire aussi que l’espèce humaine a toujours maîtrisé ses révolutions technologiques, sociales et politiques, avec crises et guerres certes. Nous avançons en terrain plus risqué, mais pourquoi pas mieux grâce aux nouvelles technologies et si les pays les plus dangereux réfléchissent un peu ?

Bonnes années 2020 et 2021 donc !