Crise chez les milliardaires ?

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Pas de panique : nous en avons perdu 16 entre 2015 et 2016, mais ils sont encore 1810 selon Forbes. Ils étaient 1826 l’année précédente. Ce « drame » fait que leur richesse totale n’est plus que de 6,48 trilliards de dollars, soit 570 milliards de moins et que la fortune d’un milliardaire moyen n’est plus que de 3,6 milliards, 300 millions de moins sur un an.

 Crise chez les milliardaires ?

En tête du peloton, nous avons 540 milliardaires américains, 251 chinois, 120 allemands, 77 russes, 69 Hongkongais, 53 au Royaume-Uni et 47 en France. La disparition de ces milliardaires, désormais multimillionnaires, vient de Russie, qui en perd 11 et du Brésil, qui en perd 8. Au fond, le problème concerne surtout les émergents.

La bonne nouvelle est que tous se sont remis de la crise de 2008. Comme ils ont l’essentiel de leur richesse en bourse, sa baisse considérable avec la Grande crise a fait chuter leur patrimoine total de près de 40%. Ce souvenir est désormais lointain. Les politiques monétaires de taux bas à court et long termes ont permis aux bourses de remonter très largement, de plus de 50% depuis. C’est aux Etats-Unis, surtout, que ce phénomène se vérifie, avec des milliardaires par hedge funds interposés, autrement dit par placements boursiers spécialisés. Merci Janet Yellen !

La richesse nouvelle mondiale vient de Chine. Avec 251 milliardaires plus 69 Hongkongais, elle offre le second groupe le plus important, alors qu’en 2005 la Chine n’avait que 2 milliardaires et aucun en 1996. Par différence, l’Europe a une richesse qui augmente et change peu de période en période. Elle est très largement héritée. Celle des Etats-Unis et de Chine est créée. Merci Xi Jinping !

Et demain ? La bourse plafonne aux Etats-Unis. Les taux d’intérêt à court terme vont monter et, déjà, les taux à long terme ont compris que les soldes sont terminées. Il va donc y avoir des concentrations, au plus vite, face à une croissance qui va se réduire et des taux en hausse. Allons-nous perdre d’autres milliardaires ? Ils sont d’ores et déjà soucieux de savoir où placer leurs avoirs. Or ceux-ci sont largement investis dans leurs entreprises, qu’ils ont souvent créées, surtout aux Etats-Unis. Ils peuvent difficilement les quitter, sauf à envoyer aux marchés financiers un message négatif, qui les appauvrira immédiatement.

Et en Chine ? Le gouvernement fait tout son possible pour tenir la croissance autour de 6,5%. Ceci implique un soutien bancaire de plus en plus net aux entreprises publiques, qui sont en grande difficulté. Pendant ce temps, les Chinois, très épargnants et très spéculateurs, alimentent des bulles à Pékin, Shanghai et Shenzhen. Les autorités le savent et essaient de calmer le jeu. Un peu par des règles, un peu par la mise en prison de certains financiers, pour l’exemple. Mais rien n’y fait. Une crise se prépare là-bas.

Et en Europe ? La croissance annoncée en zone euro reste modeste, elle devrait baisser au Royaume-Uni. Les taux longs devraient y monter, plus qu’en zone euro. On imagine les milliardaires de la City plus inquiets que ceux de Paris ou Francfort. Et pourtant, ces derniers ont à s’inquiéter de leurs banques, comme leurs collègues italiens.

La hausse du prix du pétrole tend à aider les Russes et la remontée de l’économie brésilienne devrait, après avoir touché le fond, rebondir et faire oublier l’an prochain les milliardaires perdus cette année.

Leur nombre pourrait ainsi se stabiliser, si et seulement si la bourse tient. Pour la suite, nous attendons ceux d’Afrique, officiellement absents, plus d’autres venant d’Asie. Bien sûr, les travaux de Forbes (Kerry Dolan et Louisa Kroll) et du Peterson Institute (Caroline Freud et Sarah Oliver) passent sous silence les leaders politiques de pays émergents. Le nombre de « vrais » milliardaires est donc plus important, disons plus de 2000, et leur richesse doit atteindre bien plus que 7 trilliards de dollars, sans compter œuvres d’art, bijoux et demeures somptuaires. Nous avons là l’équivalent de 3,5 PIB français, très largement illiquides.

S’inquiéter de ces milliardaires, c’est s’inquiéter de la bourse, des grandes valeurs et plus encore du NASDAQ. Ils envoient un message aux banques centrales pour qu’elles soient calmes dans la remontée des taux et aux gouvernants pour qu’ils soutiennent la croissance et l’innovation. Les milliardaires sont l’indicateur avancé, parfois très avancé, de l’économie mondiale. Ce n’est pas eux qu’on plaint vraiment : s’ils maigrissent, qu’allons-nous devenir ?