Christine Lagarde, Présidente de la BCE, félicite Janet Yellen, future patronne du Trésor américain

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Janet, tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureuse de te voir nommée à ce poste ! Pour des raisons politiques, malgré tout ce que tu as fait pour la reprise américaine, Trump ne t’a pas reconduite à la Fed. Mais te voilà la première femme patronne du Trésor : il y a une justice!

 Christine Lagarde, Présidente de la BCE, félicite Janet Yellen, future patronne du Trésor américain

 

Christine Lagarde : Janet, tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureuse de te voir nommée à ce poste ! Pour des raisons politiques, malgré tout ce que tu as fait pour la reprise américaine, Trump ne t’a pas reconduite à la Fed. Mais te voilà la première femme patronne du Trésor : il y a une justice!

Janet Yellen : Pour toi aussi Christine : tu es à la BCE ! Les femmes avancent, les femmes démocrates plus encore. Nous allons joindre nos forces !

 

CL : Mais quel travail ! Ici, la reprise est lente et inégale, entre sud et nord. L’Italie m’inquiète, avec sa croissance faible, son état surendetté et ses banques malades à marier. Je suis là pour avoir 2% d’inflation, mon seul objectif, et j’ai -0,3% aujourd’hui et 1,3%… au loin ! Donc il faut que je garde les taux bas longtemps encore, que j’achète encore des bons des trésors italien, espagnol et français, même si ce Jens Weidmann, patron de la Banque Centrale Allemande, y est toujours opposé, tandis que les Hongrois et les Polonais bloquent les milliards de crédits pour l’Italie et l’Espagne, et même pour eux, parce qu’ils ne supportent pas qu’on s’inquiète de leurs dérives illibérales !

JY : Je sais : les Allemands veulent que l’euro soit leur gros mark, alors qu’il les aide tant –mais ils ne le reconnaîtront jamais. Quant aux Polonais, dans ma famille, on connaît… Ici, je suis presque dans la situation inverse de la tienne : je veux plus de déficit budgétaire, mon successeur Jay Powell à la Fed, un brave Républicain qui n’a pas inventé l’eau tiède, va m’aider, mais c’est le Sénat Républicain qui bloque. Il y a des queues de chômeurs pour des bons de nourriture ici, un état qui pourrait fermer faute de ressources dans une semaine, mais les Républicains rabotent un plan de soutien, sous le  prétexte de ne pas endetter leurs enfants et petits-enfants ! En fait, ils ne veulent pas aider Biden.

 

CL : Je crains beaucoup pour le futur : la reprise sera lente et la Chine ne nous fera pas de cadeaux !

JY : Bien sûr. Ici, je vois monter l’inflation importée, car le dollar est faible. Je m’inquiète moi de la montée des rendements de mes bons du trésor, à 0,9%, alors qu’ils sont négatifs chez toi, -0,5% en Allemagne et même -0,3%, dans ta chère France ! Imagine une crise des bons américains : on doit 2,7 trillions de dollars, 107% du PIB, 300 milliards de plus depuis janvier, dont 25% chez les étrangers et 5% en Chine, qui n’en achète plus. Imagine si elle se met à en vendre un peu, en disant que c’est pour aider ses pauvres amis des « routes de la soie » : ils sont tant à la peine, à cause du COVID-19 ! Alors, mon dollar s’effondre !

 

CL : Et  mon euro va à 1,5 dollar : il dépasse déjà 1,2. Alors nous serons en récession : nos chers Allemands ne pourront plus vendre, même à la Chine, comme encore aujourd’hui. J’ai compris ton message… compliqué : quand j’achète des bons du trésor italien, je soutiens l’euro et la zone euro, donc je permets au dollar de baisser !

JY : Oui. Car moi, je peux alors creuser mon deficit budgétaire autant que possible, c’est à dire pour que le dollar puisse doucement glisser, et il le fait autant que l’euro, qui est « l’autre monnaie », résiste à sa hausse, lui qui se bourre de bons italiens ! On est dans deux bateaux qui s’enfoncent, et les Chinois le savent ! Ils veulent affaiblir le dollar au risque de faire monter l’euro, mais pas trop. Depuis janvier le yuan a gagné 6% par rapport au dollar, et l’euro 5% !

 

CL : C’est vrai qu’un pays à parti unique résiste mieux aux chocs que tes deux partis… répartis en 55 états et mes 300 au moins, avec 19 états membres. Donc prenons un seul ennemi : la Chine !

JY : Mais on a besoin d’elle : elle nous finance quand même, nous achète un peu et surtout nous vend ce que nous ne faisons plus.

 

CL : Et ici elle achète des ports, des entreprises d’électricité, de robotique, des marques…

JY : On n’en sort pas ! Si je creuse le déficit, je m’aide mais fais monter l’euro, ce qui ne t’aide pas, et fais monter le yuan. Alors les chinois font plus d’achats chez toi. Donc…

 

CL : Donc ?

JY : Faisons baisser autant l’euro que le dollar : le yuan monte et asphyxie la Chine.

 

CL : Mais ils vont acheter plus d’entreprises ici ! Sauf…

JY : Sauf ?

 

CL : Si tu achètes des actions chez toi !

JY : C’est illégal, mais j’ai des amis. Et toi ?

 

CL : Moi, si j’en parle à Jens Weidmann de la Buba, il fait une attaque !

JY : Tu vois que tu as une solution !