Christine Lagarde appelle Mario Draghi

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 Christine Lagarde appelle Mario Draghi

Christine Lagarde, Présidente de la Banque Centrale Européenne, succède à Mario Draghi le 1er novembre 2019. Depuis 3 mois, elle subit le COVID-19. Lui, c’était la crise des subprimes américains en 2007-2008 et, deux ans après, celle des dettes publiques grecques, portugaises et espagnoles. Il entre dans l’histoire avec son Whatever it takes de 2012 pour défendre la dette espagnole, trois mots qui avaient arrêté la spéculation ! 

Christine Lagarde: Trois mois de folie sur mes quatre premiers, plus que 92 à « tirer » ! J’ai le sentiment que ça ne finira jamais ! Au moins, au FMI tous les pays ne tombaient pas malades en même temps. Et j’avais des colloques pour me reposer !
Mario Draghi: Oui, ce que tu vis est pire que ce qui m’est arrivé, avec la crise espagnole. Mais, de mon temps, derrière une crise en venait une autre ! Là, tu as une seule maladie, mortelle je le reconnais. Tu n’auras qu’à payer pour les empêcher tous de mourir, puis les financer pour réduire les séquelles et la convalescence, puis avancer pour la relance. Après, tu te fais rembourser !

Ch L: Je crains l’explosion !
M D: De la dette ?

Ch L: Non : sociale ! Les politiques vont se battre entre eux, avec les patrons, les syndicats, les marchés, les économistes, les virologues ! Les déconfinés vont décompresser !
M D: C’est ce qui te sauve : fais peur à tous. Parle du plongeon de 19% du PIB, puis d’espoir.

Ch L: Mais les Allemands ne veulent pas donner un sou aux Italiens !
M D: Officiellement ! En fait, j’ai permis à toutes les banques de se refaire en les finançant à 0% pour qu’elles achètent leurs bons du trésor, puis ai baissé les taux à -0,5% pour soutenir les milliards de crédits qu’elles faisaient aux entreprises et couvrir leurs pertes. Je les aidais toutes : les italiennes, mais surtout les allemandes dont on ne parle jamais. Elles n’ont pas dit merci, mais ce sont les plus inefficaces de toutes. Et le patron de la Banque Centrale allemande m’a attaqué à la Cour Européenne de Justice, pour donner le change !

Ch L: Il ne s’est pas calmé depuis !
M D: Il n’admettra jamais que l’euro a aidé l’Allemagne à exporter par rapport à ce qu’aurait donné le mark. Même la crise actuelle aide Mercedes !

Ch L: Mais aujourd’hui, pour financer la sortie de crise, je ne peux pas me faire appuyer par l’Italie ou l’Espagne. Macron avance, seul. Il énerve.
M D: Je sais. En France, ceux qui ont fait l’ENA donnent des leçons à tous et ceux qui l’ont ratée en donnent à ceux qui l’ont réussie !

Ch L: Mais ceci ne me dit pas comment je m’en sors !
M D: Plus de crédits…

Ch L: Encore ?
M D: Oui, pour acheter les déficits des maudits Italiens, des dépensiers Français et maintenant les vertueux Allemands !

Ch L: Ils seront d’accord ?
M D: Oui, le virus les met tous en déficit. Te vendre, chacun, leurs dettes publiques, c’est mieux pour les Allemands que faire des cadeaux à ces maudits Italiens et à ces fichus Espagnols !

Ch L: Au fond, ce que tu me dis c’est qu’ils me critiquent tous et que je les aide tous ! Mais tout ça va s’arrêter un jour ! Je leur ai d’ailleurs bien dit qu’il faudrait me rembourser !
M D: Mais pourquoi dis-tu ça ? C’est comme quand tu as dit, lors de ta première conférence de presse, que tu n’étais pas là pour réduire les écarts de taux à long terme entre l’Italie… et l’Allemagne, alors que c’est ce que tu fais, comme moi avant avec l’Italie, l’Espagne et aussi la France ! Pour plaire aux Allemands ?

Ch L: Je pensais qu’ils aimeraient !
M D: Si les Allemands sont d’accord, si Merkel est d’accord elle ne dit rien : tu agis. Ils n’aiment pas, mais savent que tu les aides aussi et ne l’admettront pas !

Ch L: C’est frustrant ! Donc il ne faut jamais dire…
M D: … qu’ils le savent et sont forcés d’accepter. Mais c’est pour que les boîtes allemandes soient moins en risque quand elles travaillent avec l’Italie, comme avant en Grèce ! Répète : « 2% d’inflation ».

Ch L: Impossible : la déflation menace !
M D: Je sais, mais tu es là pour longtemps ! Ne donne jamais de date pour l’inflation : dis que le moyen terme… s’allonge. Pas de limite pour les achats de bons du trésor : demande à pouvoir en acheter davantage, pas d’être remboursée, ce ne sera pas possible.

Ch L: C’est chez les Jésuites que tu as appris ça ou chez Goldman Sachs ?
M D: Jésuites pour la théorie, Goldman pour la pratique.

Ch L: Donc j’achète !
M D: Oui et tu dis qu’il faut être sérieux pour que la BCE et l’euro soient stables.

Ch L: Pas : « forts » ?
M D: Stables !

Ch L: Capisco !