C'est la faute à Voltaire, c'est la faute à Bruxelles

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C’est la faute à Voltaire : ce sont ces maudits intellectuels libéraux qui mettent en question l'ordre établi et qui poussent à la révolution ! C’est la faute à Bruxelles : c'est cette maudite structure (l'Europe) qui nous pousse à changer, à nous ouvrir, à accepter la concurrence, pour continuer à exister dans ce vaste monde – dit-elle. Elle nous conduit à revoir nos "avantages acquis" et nos "ordres établis », sous le prétexte que nous ne pouvons plus les payer et que nos créanciers extérieurs commencent à ne plus trop aimer.

RousseauVoltarie

Bien sûr, ne rien changer et continuer comme avant, ce serait tellement mieux. Continuer à accorder des prébendes et des avantages, à titulariser, à promettre des « emplois d’avenir » et à garantir des retraites, ce serait merveilleux. Continuer à faire des chèques vraiment toujours plus gros sur un futur qu’on imagine toujours plus lointain, quel plaisir. Après seulement viendra bien le déluge… on le sait.

Car comme l’économie perd pied et que le Trésor est à sec, il faut s’endetter encore et encore. Comme avant. Comme toujours. Mais cette fois les échéances se rapprochent, comme le déluge.

Imposer plus pour s’endetter plus : quelle maxime ! Et pour que l’Etat puisse s’endetter plus, il faut qu’il montre bien à tous qu’il peut rembourser, autrement dit qu’il peut taxer plus ! Il lui faut alors taxer plus les vilains et plébéiens qui lui restent, autrement dit le Tiers Etat. On dit aujourd’hui : les classes intermédiaires, plus quelques fiefs et nouvelles portes et fenêtres. On dit aujourd’hui « PME et TPE » pour fiefs et on dit « portiques (métalliques) » au lieu de portes. Mais maintenant, et plus vite qu’avant, l’impôt tue l’impôt, pas seulement parce qu’il anémie l’économie, mais plus encore parce qu’il fait partir plus vite la matière taxable. Taxer « l’immobile » pas le « mobile », attaquer « l’écorce » pas le « tronc » : on connaît les deux grandes maximes fiscales. Elles ont terriblement vieilli.

Le « mobile » est partout : les hauts salaires bougent, les sièges sociaux se déplacent, les entreprises à haute valeur ajoutée deviennent de plus en plus immatérielles, et surtout les petites, les jeunes s’en vont, l’économie grise s’étend. Le soft prend le pouvoir et pilote le hard. Et l’écorce aussi a disparu : les PME et TPE n’en peuvent mais, le Tiers d’Etat est à bout. Nous en sommes au « tronc ». On dit aujourd’hui : « ras le bol » fiscal.

Alors, comme avant et comme toujours, au lieu de changer, voilà que nous, Français, nous résistons et nous critiquons les mouvements d’idées, autant et aussi longtemps que possible. Nous refusons les innovations de toutes sortes qui nous forcent à changer. Nous ne le voulons pas : c’est leur faute ! C’est la faute à Google, à Apple, à Bruxelles, à Bangalore ! Et ce retard à bouger fait monter la dette et rapproche le déluge.

Mais… si nous modernisions notre Etat, si nous nous simplifions la vie, si nous utilisions les techniques nouvelles pour aller plus vite et mieux, et moins cher, pour profiter de nos savoirs et pour valoriser nos différences, alors nous éviterions les tensions qui font monter les jacqueries et nous traiterions vraiment les problèmes ! Mais si nous mettons un bonnet rouge à la crise… alors elle vient plus vite.