Les Catalans et l’effet « bout du tunnel »

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Egoïsme, ou l’idée que les choses vont mieux, ou que ce sera plus compliqué ? En effet, certains voient « le bout du tunnel », ou plutôt un « bout du tunnel » très difficile à atteindre aujourd’hui, dans la concurrence mondiale. Alors on s’inquiète et on enrage.

 

On s’inquiète et on enrage si on finance ceux qui, dans d’autres provinces, ne font pas assez d’efforts. L’effet « bout du tunnel » pousse en effet les meilleurs à redoubler d’énergie, mais aussi à voir ce que font les autres. Ils peuvent profiter de leurs efforts, au risque de réduire les chances de succès des meilleurs, les leurs. Egoïsme si l’on veut, mais d’une autre nature, car mêlé d’inquiétude sur le futur.

La Catalogne a pressé sur le bouton « indépendance », et déclenché un séisme. La Lombardie et la Vénétie ont également voté pour plus d’autonomie, sans effets violents, au moins jusqu’à présent. Les enjeux sont énormes : Barcelone, c’est le quart du PIB espagnol, Milan et Venise, le tiers du PIB italien. La Catalogne veut conserver sa culture et, plus prosaïquement, davantage de ses revenus, pour moins donner à Madrid. Milan et Venise votent à plus de 80% pour moins financer le Sud, par Rome interposée.

Deux raisons expliquent ces mouvements.

La plus évidente est qu’un pays est toujours un système de transferts, entre régions riches et pauvres, pour assurer la cohérence nationale. Ce prix est aujourd’hui d’autant plus élevé qu’il faut continuer à payer celui de la crise passée, surtout en Espagne, et que les écarts de productivité se creusent en Italie, entre Nord et Sud. On pourra donc dire que les riches en ont assez de payer pour les pauvres !

Ceci renvoie à une autre raison, rarement mentionnée mais de plus en plus importante : la concurrence internationale et, surtout, la révolution technologique demandent plus de ressources pour résister, chercher, former, investir. Les premiers de cordée se jugent-ils trop ponctionnés par les transferts régionaux pour faire face à un avenir plus dur ?

Il faut faire attention à cette raison, car elle a quelque légitimité et ne peut se résoudre que par des programmes nationaux et plus encore européens de soutien à l’innovation. Il faut aider ceux qui voient « le bout du tunnel » à s’en approcher plus, pour qu’ils acceptent ensuite de financer plus les autres. C’est quand ils auront moins peur pour eux qu’ils seront moins égoïstes.