Bronze : économie. Argent : technologie. Or : géopolitique

- Ecrit par

 Bronze : économie. Argent : technologie. Or : géopolitique

Les Jeux Olympiques de Paris 2024 sont terminés, avec leurs cortèges de médailles et de souvenirs. La cérémonie de clôture est derrière nous. Mais, pendant toutes ces épreuves et depuis longtemps déjà, nous avons vu que se jouent parmi d’autres luttes : les JOO, Joutes Omniprésentes et  Omnifacettes. Elles ne s’arrêtent jamais, avec leurs cortèges de violences qui viennent de partout pour des raisons variées. Ces Jeux viennent ainsi de livrer leur classement mondial. Elles nous invitent à réfléchir pour agir si nous voulons aller plus vite, plus haut, plus fort et surtout : ensemble.

L’économie obtient le bronze. Surprise : elle nous avait habitués à mener les courses, au moins à les animer. Karl Marx, le coach bien connu, avait pourtant dit : « l’économie est déterminante en dernière instance ». Il a été pris au mot. L’idéologie, appuyée par les réseaux sociaux, domine plus que jamais !

La technologie gagne l’argent. Pour comprendre ce résultat, il faut reconnaître qu’elle a un rythme à elle. Rien ne se passe pendant des années. Ce sont des expériences, des publications et des colloques pour initiés, puis viennent un ou deux Prix Nobel, en physique ou chimie. Ils célèbrent une avancée qui échappe à presque tous, dont l’auteur de ces lignes. Ceci va prendre deux ou trois olympiades « normales », puis, brutalement, l’invention devient prototype, le prototype début de série. On découvre ses multiples usages, loin de l’idée de départ. Les inventeurs passent la main à des entrepreneurs, ou le deviennent. Les dollars accourent.

Le laser vient ainsi d’une idée, évidemment lumineuse, d’Einstein en 1917. Puis il devient en 1966 le premier d’une série de Prix Nobel : il promet. Puis il commence à percer des plaques d’acier en 1967 de plus en plus épaisses et de plus en plus vite : olympique. Puis il grave des disques… laser, lit des codes-barres, fait des radios, des spectacles son et lumière et se met à travailler pour l’armée. Aujourd’hui, le laser est partout. Il a donc bien gagné sa place, au milieu d’une cohorte, chamboulant l’économie, en attendant la venue de l’Intelligence artificielle et générative. C’est une révolution industrielle : l’argent !

La géopolitique aura l’or. Et pourtant, c’était la dernière discipline à entrer officiellement dans l’arène. Officiellement, car elle existe en fait de tout temps. La « politique » naît de la « polis » des Grecs, de la ville, du lieu où ils vivent entre eux, et par rapport aux autres. La géopolitique, c’est l’opposé du hors-sol. C’est l’intégration de l’espace dans la pensée et dans l’action, gentille ou pas. Admettons-le ici pour être juste : aucune communauté humaine n’a jamais couru isolée des autres, entre les lignes de son couloir. Tout est interdépendant, mobile, fluide, donc incertain. La géopolitique est ce que nous vivons tous, consciemment désormais. Ce sont des multitudes de jeux avec leurs règles et interactions qui nous entourent.

Ainsi en France, les JO n’empêchent pas de penser aux entreprises et à l’emploi, à l’Ukraine et au Moyen-Orient, à la Maison Blanche et à Matignon. On dira de la géopolitique que c’est un peu de tout, de la lutte et du saut, du sprint et de l’endurance, de la rhétorique, avec de la stratégie et toujours beaucoup de ruse. Oui : c’est une discipline mêlée, bâtarde si l’on veut – comme la vie.

Que retenir de ce classement pour la France ? Il montre que tout est interdépendant et qu’il faut le savoir, mais qu’il faut surtout dépasser le découragement du « tout est dans tout ». Vivre avec la complexité, c’est œuvrer à se renforcer en se l’expliquant. Il faut d’abord dépasser le niveau bronze, celui de l’économie, en ayant non seulement plus de croissance mais surtout moins de dette, en étant donc plus résilient. La France, avec 1,1% de croissance du PIB l’emporte actuellement sur l’Allemagne à -0,2%, mais sa dette publique atteint 1,1 fois son PIB contre 0,6 : c’est trop ! Il faut aussi investir en recherche pour l’argent. 2,2% du PIB en R&D, c’est ce que fait la France, moins que les 3% voulus par l’Union Européenne, l’Allemagne faisant 3,1%. Nous n’y sommes pas plus.

Pour gagner l’or, il ne faut pas rester pétrifié devant la complexité du nœud gordien, venu des jeux antérieurs. Il ne s’agit pas de le trancher : c’est le fruit de l’histoire. Il faut patienter, le domestiquer, le comprendre : ami et ennemi, toujours changeant. La géopolitique est notre nouvel univers. Voilà notre podium.