Bitcoin, SPAC, Libra… : la bulle boursière mondiale mute

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 Bitcoin, SPAC, Libra… : la bulle boursière mondiale mute

 

Il n’y a pas que le COVID-19 qui mute : les bourses aussi gonflent et changent, en partie de son fait. Le temps est partout aux encouragements budgétaires, par des déficits massifs, et monétaires, par des taux longtemps bas, pour contrer le virus. Ainsi, depuis janvier 2020, donc avant toute manifestation financière du COVID-19, le Nasdaq a gagné 48%, le Nikkei 30%, le Dow Jones 16%, Shanghai 14%, le DAX 12%. Et le CAC 40 vient de dépasser 1% !

Inévitable : ces soutiens entretiennent le bouillon de culture de montée des cours boursiers. Les États-Unis en sont les gagnants par les doses injectées, avec le dernier programme en date de 1 900 milliards de dollars et un engagement de maintien des taux courts à 0,25% jusqu’en 2023, même si l’inflation dépassait 2%. Le Japon ne craint rien, avec une dette publique à 240% du PIB et une banque centrale qui achète tout ! La zone euro voit sa politique monétaire, toujours accommodante, épaulée par des soutiens nationaux accrus et désormais par un important programme européen (950 milliards d’euros). Les critères de Maastricht, avec une dette publique qui devait être « limitée » à 60% du PIB sont débranchés : elle atteint 78%.

Vient le Bitcoin, le variant alchimique. Au début, cet être mixte, mi-informatique (Bit), mi-monnaie (coin), créé (« miné », pour parler comme ses adeptes) par des experts en informatique et en mathématique, ne vaut quasiment rien. On ne sait qui en est le père (« Satoshi Nakamoto » existe-t-il ?), jusqu’au moment où sa créature sort de l’anonymat, entourée de critiques, de drames et d’escroqueries, dans une atmosphère sulfureuse. Il valait 1000 dollars début 2017, le voilà à 60 000, avec des hauts et des bas significatifs, parfois quotidiens. 100 000 dollars s’approche, dit-on à Bloomberg Intelligence. Folie ? Non, dès qu’on trouve un acheteur ! « La preuve », l’argent afflue ! La capitalisation boursière du Bitcoin dépasse 1 000 milliards de dollars et des sous-variants naissent partout : Ethereum (200 milliards de dollars de capitalisation), Binance Coin, Tether, Cardano ou Polkadot (entre 30 et 40 milliards) ! Il y a tellement d’argent qui veut devenir or !

Voilà le SPAC, Special Purpose Acquisition Company, le variant secret. Une SPAC est une société sans activité qui s’introduit en Bourse pour en acheter d’autres, sans qu’on sache lesquelles ! Il suffit de remplir l’enveloppe, en faisant une confiance… aveugle à celui qui vous la tend, milliardaire ou grand banquier. Il aura ainsi les moyens de faire ses emplettes : les prix des « pépites » pressenties ou qui rêvent de l’être ne peut que monter.

Suit le Libra, le variant libertarien. Plus fort que le dollar, il soutiendra une croissance mondiale plus unifiée : quelle promesse ! Il se veut une monnaie privée, pour chacun, hors banque, et surtout plus stable que les Grandes monnaies, dont le dollar. Lancé en mai 2019 à Genève, sous la houlette de Facebook, on trouve autour du berceau la crème des multinationales mondiales qui le garantissent.

Mais c’en est trop ! Ce mutant… révolutionnaire trouve alors, immédiatement, son vaccin, politique, au Congrès américain. « Il n’y a pas mieux que le dollar », lui dit-on ! Ses créateurs doivent « revoir » leur projet, au point de le rendre méconnaissable. Le Libra devient Diem, seulement lié au dollar : un Diem = un dollar. C’est un stablecoin qui permettra d’acheter sur Facebook, Amazon et régler Uber…Peut-être, chaque transaction sera-t-elle gratifiée d’un token, un jeton, un (tout) petit cadeau. Ces tokens, réunis, pourront ensuite s’échanger contre des dollars (horreur) ou des prestations, dans un réseau de tokens (mieux). Le message est clair : on peut seulement créer des copies du dollar, pour soutenir des échanges internes à un groupe de sociétés, donc leurs valorisations boursières. Vivent Amazon et consorts, vivent Diem et token, pas touche au dollar !

Survient le mutant chinois, qui a tout compris : le e-Yuan, émis par la… Banque centrale chinoise. Il veut « aider » les Chinois non bancarisés, servir aux JO de 2022, peut-être « mieux suivre » les Chinois et, surtout, éviter l’extraterritorialisation du droit américain lié au dollar, son arme majeure : qui sait ? La voie est ouverte : les banques centrales lancent alors leurs propres monnaies digitales. Voici le e-euro, en attendant le e-$. Plus de monnaies nationales, mais quasi-secrètes, c’est bien plus de moyens pour financer des bulles. Ça promet !