Pourquoi « plate » ? Parce qu’on attend 0% de « croissance » au 4° trimestre ! Ceci après -6% au 1°, -14% au 2° et +7% au 3° : la reprise s’arrêterait ? Et après : où va « le plan de relance » ? Après ce -9% en 2020, nous aurions 7% en 2021 selon la Banque de France (croisons les doigts), puis 3% en 2022. Alors, le PIB 2022 dépassera de peu celui de 2019. En plus, d’autres chiffres se bousculent dans les têtes des patrons (pas que des seuls patrons d’ailleurs) : nombres de cas de COVID-19, confinements divers, Brexit, élections américaines, plus le reste. Pour apaiser les esprits, le Gouverneur de la Banque de France parle d’une « reprise en aile d’oiseau », douce image pour dire que tout ira mieux, mais lentement. Bien sûr, dans tous ces scénarios, on ne parlera pas trop de déficits public et extérieur, peu de chômage et moins encore de cette inflation qui devrait bientôt cesser d’être négative, pour aller vers 1% !
Pourquoi « plate » ? Parce qu’en 2022 seulement, le PIB français devrait retrouver son niveau de 2019, celui de l’avant COVID-19. Et 2022, c’est aussi l’année de la Présidentielle, puis des législatives, donc des turbulences ! Certes, avant ces dates, nos patrons vont se dire que les aides, primes et soutiens vont pleuvoir. Après, nous verrons pour rembourser, si la reprise se met suffisamment en place, bien sûr. Mais les patrons ne sont pas tous les mêmes ! En fait, la reprise sera « en éventail ». Il n’y en aura pas « une » mais « des », pas de V, de VV, de (racine carrée). Il y aura des évolutions contrastées sinon opposées, entre ceux qui vont bénéficier de la crise et ceux qui peuvent en mourir, entre les « gros » et les « petits », les rentables et les fragiles, entre ceux qui voient l’avenir avec confiance et les autres, ceux qui sont ou se sentent dans les bons ou « mauvais » secteurs, les bons ou « mauvais » commerces, les bons ou « mauvais » emplacements, comme les bourgs désertés ou les centres-villes ruinés par les « gilets jaunes » par exemple.
L’éventail des reprises
Pourquoi une « entreprise plate », si les reprises sont si différentes ? Parce c’est ce « scénario moyen » que vont chercher les têtes patronales. Certes, toutes les reprises sont possibles, de la meilleure à la pire, mais ils voudront se faire une vision moyenne, pour se situer ! C’est alors le scénario de « l’entreprise plate » qui va émerger, et il sera décisif. Il dira qu’il y aura moins de croissance, une demande inquiète, soucieuse des origines locales et écologiques des produits, avec une épargne abondante très difficile à « décoincer » et donc très peu d’inflation. Alors les patrons vont revoir leurs structures et réduire leurs frais fixes, sachant qu’ils ont déjà coupé dans beaucoup de dépenses au tout début du COVID-19 : moins de publicité, demande de réductions des prix pour leurs achats, moins de voyages et de dépenses de confort (restaurants, réceptions, traiteurs, remboursements de frais…).
« L’entreprise plate » va donc poursuivre le « régime » lié à l’arrivée du virus : moins d’embauches, avec des salaires plus serrés, moins de remplacements des départs en retraite et de mètres carrés, moins de niveaux hiérarchiques surtout, des hausses de salaires au mérite, peu de compensation des hausses de prix, puisque l’inflation a disparu ! Et le profit doit rester pour investir dans l’informatisation et la formation. Des robots, des ordinateurs, des codes et des formateurs, des chaînes de production optimisées, des prouesses logistiques, une connaissance encore plus intime du client ! Pas de dividendes, mais le pari que les cours boursiers rémunèreront les actionnaires et les salariés, avec des stock-options (pourquoi pas ?) et plus d’intéressement et de participation.
« L’entreprise plate » va alors en acheter d’autres, moins frugales, moins bien placées, ou qui n’ont pas vu le monde qui vient. Et, puisque les taux d’intérêt sont bas, endettons-nous pour acheter le concurrent dont la valeur s’effondre ! On nous dira que cette « entreprise plate » sera triste, automatisée à l’extrême, faisant entrer dans une économie aussi plate qu’elle : 1% de croissance et d’inflation, 10% de chômage. Non : cette entreprise mettra la création et l’innovation au centre. Les salaires seront compressés, pas les actions que les salariés auront reçues. Non : elle nous poussera tous ! Non : entre Chine et États-Unis, mieux vaut être « plat », agile, efficace, informatisé, formé, que mort !