Apple Bank, avant Google Bank ou Amazon Bank ?

- Ecrit par

 Apple Bank, avant Google Bank ou Amazon Bank ?

Qu’attend Apple pour acheter, par exemple, la Société Générale et faire, de sa filiale Boursorama, la fintech la plus puissante du pays ? Elle forcerait ainsi les autres grandes banques nationales à accélérer leur modernisation et pousserait peut-être d’autres GAFAM à la suivre. Bien sûr, il s’agit là d’une pure hypothèse. On nous dira que Boursorama n’est pas une de ces start-up qui concurrencent les banques traditionnelles pour les paiements, les crédits, les financements participatifs ou encore la gestion de portefeuille. Mais cette filiale de la SG est peut-être la plus souple et la plus moderne des banques sans réseau. On nous dira peut-être aussi que ce qui fait hésiter Apple est la complexité sociale française, à moins qu’elle ne veuille pas se confronter aux règles concurrentielles françaises et européennes : Google vient d’abandonner son projet de comptes de dépôt et d’épargne ! Bien sûr, il ne s’agit pas d’argent : Apple peut payer, sans même sans rendre compte. Elle réfléchit, tâte le terrain et procède (achète) par étapes.

Ce qui pourrait faire aller Apple plus vite ? Montrer sa force, même si les « gros installés » l’attendent de pied ferme ? Paradoxalement en effet, les articles où certains banquiers annoncent la menace de la venue des fintechs contre la banque relationnelle que nous connaissons, peuvent être lus comme un aveu de faiblesse de leur part. Apple pourrait avoir envie d’en profiter. Allez-savoir. Symétriquement, les muscles qu’exhibent BNP ou CASA peuvent être perçus comme une autre ligne Maginot, d’autant qu’elles s’allient aux fintechs nationales. Fintech contre Big tech : « t’es pas cap, Apple ! Allez, viens donc ici un peu : tu vas voir » !

Pourtant, on sait bien que le secteur bancaire européen est dans une difficile phase de transformation, en Allemagne plus encore qu’en Italie. Le secteur allemand cache en effet, au mieux, ses difficultés, où il compte trop de Landesbanken et de Sparkassen peu efficaces. Mais elles bénéficient de la compréhension des instances nationales de réglementation, qui leur supposent l’appui des finances locales et donc leur demandent très peu de fonds propres. Heureusement ! Ce qui n’est pas le cas de Commerzbank, qui atrophie sans cesse son réseau et de la Deutsche Bank, qui ne cesse de payer les sanctions liées à son ancienne politique, « agressive », autrement dit : peu regardante. Le secteur italien digère lui, peu à peu, des années, sinon des décennies, de crédits malencontreux. Monte dei Paschi di Sienna reste le plus gros « morceau » encore à traiter, depuis des années. Unicredit vient en effet de demander 7 milliards pour le faire, plus un certain nombre d’engagements publics. Mais c’était trop pour l’état italien qui a déjà cotisé pour 18 milliards, avec les actionnaires privés. La deuxième banque du pays a (pour l’heure) préféré refuser le « cadeau ». Évidemment, le secteur bancaire grec n’est pas non plus en grande forme et les autres pays du sud n’ont pas achevé leur mue, sachant que les augmentations de capital, prévues dans Bâle III, sont toujours repoussées dans le temps, même si elles sont toujours revues à la baisse !

Et voilà BNP, CASA, puis SG et Natixis, face à une Banque de France qui veut les mithridatiser, pour préparer la suite ? Pourquoi pas : les groupes français se prépareraient alors peut-être d’autant mieux à une attaque d’une Big tech si la Banque de France les a mieux renforcés… en leur faisant un peu de mal, avec l’e-euro ! En tout cas, il n’y aura pas eu de surprise. L’e-euro est annoncé, la Banque de France étant aux avant-postes de sa mise en place, avec l’idée de proposer cette monnaie qui se veut plus sûre, rapide et… moins chère que celle qui circule dans les banques et entre elles, pour cause du coût de leurs réseaux. Sans le dire non plus, cet e-euro pourrait résister à la concurrence du dollar et maintenant du yuan (plus du e-yuan) en Afrique, renforçant la part de marché de l’euro.

Autant le savoir : Apple Bank ou autre, quelque chose se prépare. Le système bancaire européen ne peut rester si tentant, avec son gros Marché unique. Les experts appellent à une Union bancaire et à une Union des marchés de capitaux, mais tout avance lentement : aucune banque paneuropéenne. Bientôt un intrus réveillera tout ce monde, où chacun se renforce chez lui et fait de modestes incursions chez l’autre, même européen, quand avancent les banques d’affaires américaines. Apple Bank : viens !