Angela Merkel vient-elle de sauver l’Euro ?

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 Angela Merkel vient-elle de sauver l’Euro ?

L’euro va-t-il muter? se diviser ?

Un euro allemand = 1,25 euro franco-italien ? C’est le risque, avec cette pandémie qui n’est plus « seulement » sanitaire. Aurons-nous un euro du nord, fort et résistant au froid, à côté d’un euro du sud, faible et amateur de soleil ? Deux euros, après dévaluations ?

Pour se scinder, l’euro aura-t-il été miné par la crise d’une grande banque de la zone sud, BNP – Santander, par contraste avec Deutsche Bank ou Commerzbank, en zone nord et pourtant en difficultés ? Ou bien sera-t-il victime d’une fuite des capitaux, depuis un gestionnaire mondial de fonds – Amundi (France), ou une grande compagnie d’assurances – Axa (France) ou Generali (Italie), pourtant solides sudistes ? Ou sera-t-il coupé par un scandale politique, une bombe, une guerre ? La crainte d’une deuxième vague du COVID-19 le divisera-t-il, après les baisses de 5 à 8% de PIB de la première ? Une salve qui emporterait les budgets nationaux, les 1 000 milliards d’euros du Programme « vert » européen et les « watever it takes » de la BCE ?

 

Le risque vient de la Cour Fédérale Allemande de Karlsruhe!

Les juges du nord estiment, le 5 mai, que les règles démocratiques allemandes ne sont pas assez respectées par la BCE. Le « principe de proportionnalité », qui pèse avantages et inconvénients, gagnants et perdants, dans le cadre allemand, n’est pas assez pris en compte. Or, pour la Loi Fondamentale Allemande, c’est lui qui fonde la démocratie dans le pays.

Depuis ce 5 mai, tout s’enclenche. La Banque Centrale Européenne indique le soir même qu’elle ne dépend que de la Cour de Justice de l’Union Européenne. La Cour de Justice allemande répète, trois jours après, que ses jugements lient toutes les Cours nationales. Puis la Commission Européenne dit examiner les 100 pages de la décision de la cour allemande. « Je prends la chose très au sérieux » déclare Ursula von der Leyen qui ajoute : « la Commission (examine) de possibles prochaines étapes allant jusqu’à une procédure pour infraction aux traités européens » ! Quoi ? L’Allemagne serait alors traduite devant le Tribunal Européen parce que son propre Tribunal interdit à la Banque Centrale Allemande d’acheter trop de bons des trésors de la zone euro pour ne pas y faire trop baisser les taux longs, afin de ne pas trop aider les pays les plus en difficulté ?

 

Ce serait surréaliste, si ce n’était si dangereux.

Pourquoi ? Parce que le monde est en crise majeure. Ici, le virus frappe et distend les situations au point que l’Italie ne pourra y demeurer, quelques sacrifices qu’acceptent ses habitants, si la BCE n’aide pas. Le COVID-19 révèle les tensions enfouies au cœur de la zone euro, avec ses complications destinées plus à les atténuer qu’à les résoudre. Et cette « révélation » se produit dans une économie mondiale en ralentissement depuis vingt ans, aux prises avec une révolution technologique qui bouleverse les modes de vie, les entreprises et les hiérarchies internationales. Derrière le COVID-19, les GAFAM ! Et la tension monte entre des États-Unis qui entendent continuer à mener le monde et une Chine, qui rêve de les remplacer : derrière le COVID-19, Xi et Trump ! Et le prix du pétrole s’effondre, à la suite d’une bataille entre Russie et Arabie Saoudite : derrière le COVID-19, Mohammed ben Salmane et Poutine ! Surtout, voilà que, à la périphérie, les pays émergents voient leur croissance chuter, baisser leurs exportations de produits agricoles et tomber leurs prix. Voilà, en face, monter la misère, avec son cortège de violences, de migrations et d’instabilités politiques.

 

Vient Angela Merkel

« L’enjeu des prochaines semaines et des prochains mois sera de montrer que nous sommes solidaires, que nous allons remédier aux dégâts… tout faire pour que l’Europe gagne en cohésion ». Les plans d’aides adoptés par les ministres des Finances de l’Union Européenne sont « un premier jalon important », mais « ce ne sera pas suffisant ».

Ouf ! Voilà coupée, le 13 mai au Bundestag, la mèche allumée le 5 à Karlsruhe : elle pouvait faire exploser l’euro, après ce tour du monde du virus. On voit les milliards qu’il faudra pour freiner la crise qu’il amène, pour cohabiter à « bonne »distance et financer la relance, avec réorganisations et soucis écologiques à la clef.

On dira qu’Angela Merkel est une européenne convaincue, une grande politique, une allemande avisée qui comprend que son pays n’a rien à gagner à un euro du nord, surtout maintenant : tout converge !