Réunion secrète avec Poutine

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 Réunion secrète avec Poutine

Le Kremlin, ce 12 octobre. Nous sommes dans le bunker du Président Poutine, creusé au plus profond de Moscou.

Poutine : Bonjour ! La situation politique actuelle se complique encore. En fait, c’est bon pour nous : il nous faut exploiter ce bardak (bordel en russe) pour en sortir gagnants. La situation concrète d’abord, comme on disait du temps de notre jeunesse. L’Ukraine résiste encore, on lui envoie des obus, des drones et des missiles, elle répond de même. Mais elle est si petite qu’elle souffre bien plus que nous : nous devons donc continuer. Depuis quelques jours, nous envoyons des drones photographier les pays baltes, les aéroports suédois et finlandais, plus quelques camps militaires et la fête de la bière à Munich. Ils s’affolent et se réunissent, pour savoir comment riposter ensemble : quel courage partagé entre trente !

Lavrov (75 ans, ministre des Affaires étrangères russes depuis 2004) et Guerassimov (70 ans, chef d’état-major général de l’armée russe depuis 2012) esquissent un sourire.

Poutine (poursuit) : Nous on regarde, on se renseigne et surtout on se prépare. Trump a dit que je le « balade » avec mes engagements de cesser le feu, pour qu’ils soient contents, lui et les Européens, mais j’ajoute aussitôt des conditions, pour qu’ils ne le soient pas. C’était évident et m’a permis de gagner une année. J’ai bien compris que Trump veut faire des affaires avec moi, sans compter que je puis peut-être le tenir…

Lavrov et Guerassimov rient.

Poutine (achève) : Trump ne veut donc pas rompre et sait bien par ailleurs que les Européens lui mangeront toujours dans la main.

Lavrov : Oui Président. Trump ne veut pas perdre un futur gros client avec nous. Et avec les missiles Tomahawk qu’il enverra (un jour) à Kiev, il nous dit qu’il les vend à l’Otan avec marge, comme les Turcs le font (plus ou moins) avec nous. Ce qui est intéressant, c’est la montée des nationalismes en Europe, ce que les médias appellent « l’extrême droite ». Ils ne sont pas tous de notre côté, mais ils fracturent l’Europe et sont tous contre les immigrés. Les chasser va affaiblir l’Europe, économiquement et politiquement, en interne et avec l’Afrique et, pire encore, au Royaume dit Uni. En plus, l’Europe n’a rien dépensé pour s’armer. Elle a bien vécu en profitant du parapluie américain. Elle ne peut plus s’en passer et n’ose demander à Trump s’il tient toujours. Donc nous devons continuer notre Opération militaire spéciale en Ukraine et discuter avec Trump, ce qui affaiblit l’Europe.

Guerassimov : Nous menons une guerre mêlée, hybride comme on dit, avec des fusées hypersoniques et des tranchées, chère et low cost, d’information et de désinformation, d’usure… des budgets et qui épuise les psychologues. Gagnera celui qui aura le plus à gagner : la domination du monde, nous. La démocratie a fini son temps, s’ouvre celui du respect des peuples forts, pas des individus. Notre alliance avec la Chine, l’Iran, la Corée, entre autres, nous donne des ressources techniques, financières, médiatiques, politiques et humaines sans égales, car elles sont du côté des armes et de l’expansion des territoires. En face, ils se réunissent. Mais faire la guerre n’est pas voter. Nous on avance, avec la moitié de la population du monde, eux sont dépassés. Trump a compris, n’ose pas le dire et devient incompréhensible. Il nous faut le pousser par nos armes, l’isoler de l’Europe décadente et le rapprocher de nous, de la force. Il a déjà presque laissé tomber l’Europe : c’est le début.

Poutine : Donc nous continuons. J’ai eu Xi au téléphone avant cette réunion : sa logique est limpide, la même depuis un siècle. Mao, dans De la contradiction, a écrit que le monde est plein de contradictions et que le seul moyen d’avancer était de renforcer sa « contradiction principale », qui est de s’opposer au capitalisme des États-Unis. Ça nous va et c’est plus simple que Marx.

Lavrov et Guerassimov sourient encore.

Lavrov : Moi je vais travailler les extrêmes droites allemande et française, certains écolos et voir ce qu’on peut faire en France, où les minorités juives et musulmanes sont les plus importantes d’Europe, le gouvernement le plus faible et où le Président nous est le plus hostile.

Poutine : Bon résumé ! Donc ?

Guerassimov : On attaque toujours l’Ukraine et plus la France.

Poutine : Attention à ne pas trop détruire, faudra rebâtir…

Lavrov et Guerassimov : Et ce Plan Trump pour la paix à Gaza ?

Poutine : Ils diront oui pour le Nobel, mais pas assez fort et trop tard !