États-Unis : que cache la formule des tarifs douaniers de Donald Trump ?

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 États-Unis : que cache la formule des tarifs douaniers de Donald Trump ?

Qu’est-il arrivé au Président américain ?

Il veut aller vite en besogne pour voir, depuis sa fenêtre, moins de voitures allemandes. Il mesure aussi la difficulté à négocier avec Poutine. Sa « solution » du conflit ukrainien dure depuis trois mois, après les 24 heures promises pour la trouver. Elle ne s’approche pas. Et le voilà qui menace Téhéran, qui bombarde le Yémen, au risque de disperser plus ses invectives.

Mais le voilà aussi qui ouvre un autre front, mondial, en taxant de 10% au moins tous les biens importés aux États-Unis. Lui contre tous, au risque que de nombreux États ripostent, sur ce terrain ou d’autres, s’unissent ou aillent vendre ailleurs !

 

C’est une autre architecture mondiale qu’il ouvre

Se clôt ainsi la longue période de baisse des droits de douane pour échanger plus, moins cher, pour faire reculer la pauvreté, avancer le libre-échange, sinon le capitalisme. Au bénéfice des États-Unis certes, mais aussi surtout de… la Chine qui, surprise, devient l’atelier du monde et dissimule son avance en passant par le Vietnam, le Laos et le Cambodge. Après les Mercedes, c’en était trop !

 

Pour en finir, peut-être…

Ce sera 34% de droits contre la Chine. Elle ose riposter : plus 50% le 9 avril, ce qui s’ajoute aux 20% déjà décidés sur l’acier ; puis finalement (?)… 145%. Sans oublier 20% contre l’Union européenne (en pause) ou 10% pour ce cher Royaume-Uni, qui peut toujours servir. Dans une de ses interventions, Donald Trump évoque aussi les autres barrières au commerce : lieu et mode de production, règles environnementales ou manipulations des taux de change des grandes monnaies, pourtant surveillées par le Trésor. Mais commençons par l’essentiel : les biens.

 

Une équation pour tout le monde

Ceci pourrait sembler très compliqué mais, assez étrangement, quand on en vient aux données valables pour chaque pays, le Trésor américain publie une seule équation, avec quand même trois lettres grecques :

Avec ∆τ_i : augmentation des taxes douanières, x_i : exportations de biens depuis le pays i, m_i : importations (de biens) depuis le pays i, ε : élasticité (rapport de rapports) entre la variation à l’exportation depuis le pays i en fonction des variations des tarifs vers les Etats-Unis et φ décrivant le passage des prix importés au prix de détail.

Mais il l’assortit aussitôt des « précisions » suivantes, pour nous débarrasser de deux lettres :

– pour ε, il est recommandé de prendre 4, même si la valeur de longue période est « plutôt de 2 ». Ainsi l’effet des tarifs sera majoré à court terme ;

– pour φ, il est aussi « recommandé » de prendre 0,25, qui vient aussi du cas chinois. On voit alors que la multiplication des deux membres fait… 1 !

Ceci donne : l’augmentation des tarifs douaniers pour tout pays exportant des biens aux Etats-Unis est égale à la division entre sa balance commerciale et ses importations américaines :

Tout s’éclaire : tous chinois !

 

Ce que ces oublis cachent

Évidemment, ces simplifications sont faites sans données par pays, pour la bonne raison qu’elles ne sont disponibles que pour la seule Chine, seule (ancienne) victime de ces hausses. Trump a extrapolé au monde !

Elles se font aussi sous la pression du temps, les économistes dont les travaux ont ainsi « servi » devant être surpris d’être mis à contribution. Tout ceci est économiquement grossier, avec des chiffres qui font peur, pour que l’on discutera, donc pour diviser.

 

Les services ne comptent plus ?

Pourtant, ils donnent un excédent de 70 milliards de dollars, avec les GAFAM, sans compter leurs impôts payés aux USA ! Mais ce n’est rien, pour Trump, par rapport au déficit de 310 milliards en biens. Rien par rapport aux entrées de capitaux : elles sont volatiles, alors que les déficits en biens ne cessent de monter !

Voilà pourquoi dans ces temps de puces et d’IA, Donald Trump parle d’industrie. Les jeunes américains iront-ils en usine ? Pense-il au déficit budgétaire à 6,2% du PIB, qui le met dans les bras de Xi ? Croit-il que si lui achète moins, Xi lui achètera plus ? Ce sera plus compliqué pour l’Allemagne, car lui vendre, c’est vendre à l’Europe, à l’abri de ses normes.

 

Les droits de douane : trois secrets

– Si les produits chinois deviennent plus chers, l’inflation montera.

– Si les Américains achètent chinois, c’est qu’ils sont moins compétitifs.

– Surtout, s’ils continuent, la dette montera et le dollar inquiètera.

Donc, c’est la faute aux autres !