Cette fable que La Fontaine nous envoie

- Ecrit par

 Cette fable que La Fontaine nous envoie

L’aigle américain, le cheval européen, l’ours russe et le panda chinois
En une auberge, décidèrent de dîner, certain soir.
L’aigle voulut choisir le menu. Tous s’inclinèrent devant son poids.
Puis, selon son habitude, il tendit ensuite à chacun le crachoir.

Une sorte de conférence de presse, comme on dira plus tard.
Le cheval parla de ses inquiétudes sur l’ours et son vouloir.
Vous voulez me manger et mettre votre soviétique costard !
Pour la paix de cette tablée, nous devons limiter votre pouvoir.

Vous ne cessez d’étendre votre domaine,
Avant-hier c’était la Géorgie, hier la Crimée,
Aujourd’hui, c’est toute l’Ukraine.
Quand allez-vous cesser de gonfler votre bedaine ?

Menteries, répond l’ours russe. Il me faut une plaine,
Pour me garantir du cheval, qui me rudoie.
Et toi, panda-chinois, dit l’aigle-américain, tu demeures bien coi.
J’observe et ai le temps, dit le compère. Mais je peine.

Certes je ne parle pas tout le temps, moi : « j’assure ».
Que veux-tu dire, reprirent les convives en chœur ?
Simplement que je répare, dit le panda, cinq siècles de cassure.
Croyez-vous que je ne voie pas que, pour faire le bonheur

De tous les hommes, vous en oubliez plus de sept milliards !
Fadaises, hennit le cheval ! Que fais-tu donc, pour ton milliard et demi ?
Moi, je cherche une satisfaction moyenne, sans être babillard,
Pour tous les Chinois, les Africains et les autres d’Asie,

Vous avez vu, de la Ceinture à la Route, mon projet.
J’en ai entendu les critiques : pollution, corruption,
Lenteur, dette, j’en passe. Mais quel autre vous avez
Pour aider tant de gens, sans avoir une si longue vision ?

C’est la démocratie que vous critiquez, disent aigle et cheval.
Bien sûr, dit le panda. Elle est myope et égoïste.
La démocratie ne va pas pour l’immense, mais pour le local,
Voyez donc vos problèmes, tas d’hédonistes !

Oui, dit l’aigle américain : ces problèmes m’empêchent
De vous ralentir, panda, et de vous pousser vers la paix, ours.
Divisés en interne, nous sommes, de votes, à la pêche.
J’enrage quand je vois vos vassaux inclinés, tout autour.

Empêtré de chaînes, je sais bien que la démocratie
Aux dictatures, survit. Mais ne soyez pas sidéré
Si, avant, je dégaine pour aider mes amis.
Je rentre chez moi. Mon temps m’est compté,

Pour combattre les confusions, de genre et de valeurs.
Puis partout, croyez m’en, je vais serrer les vis.
Alors, bientôt, l’aigle fera à tous plus peur.
A ces mots, le cheval suffoque : vous quittez la démocratie !

Et alors, chanta l’aigle ! Je n’ai cessé de vous protéger, gratis,
De l’ours. Mais vous ne renforcez pas votre arsenal
Et cherchez, de moi, toujours plus de garanties !
C’est vrai dit le cheval, chez nous c’est toujours carnaval.

Nous régulons, au lieu de réduire nos différences,
Alors nous pesons peu dans la balance.
Eh bien chantez, maintenant ! Dit l’aigle en riant.
Moi je m’occupe de ce panda, qui me tance.

Nous devons contrôler nos liens, nous observer.
Le panda se demande combien tiendra ce parler.
Tout en visitant ses porte-avions, drones et fusées.
Il décide, aux émergents, d’étendre ses largesses,

Et d’aider l’ours, en achetant son gaz. Tous deux sont rusés.
L’aigle adore montrer griffes et bec, en tendant sa sébile.
Il le fait, pour inquiéter et protéger, lui d’abord.
Étrange mélange, qui explique ses montées de bile,

Sauf que nul n’en est dupe. Impatient, il se croit retors,
Mais c’est sa faiblesse. Quand panda et ours
Font assaut de connivences, lui n’est que dehors.
Le cheval lit ces manigances et veut y couper court,

Pour convaincre ses membres de sortir des nuages,
L’union fait la force, ne cesse-t-il de dire.
Exploitons notre diversité, cessons nos ramages.
Entre nous agissons et remisons notre ire.

L’aigle rêve de deals ; ours et panda de nous défaire.
Dans cette auberge, ce souper sera-t-il le dernier ?
Ne voyons-nous pas les dangers de ce laisser-faire ?
Dette, cyber-attaques et taxes : pourquoi les nier ?

Si vous haranguez encore, nous attaquons, dit l’ours,
Si vous critiquez notre ami ours, je m’énerve, dit le panda,
Si vous ne payez pas je pars, dit l’aigle, sans détour.
Alors seul, le cheval songe à rendre son mandat.

Mais comme seul il est, c’est bien pour être unique !
C’est le moment pour écrire une nouvelle page,
De la belle et incroyable saga démocratique.
Merci, ours, aigle, panda : vous réduisez mon âge.

Grâce à vous je vois mon futur exploit,
Pour lutter contre ces gros qui ne savent pas
Contrôler et progresser, sans tordre la loi.
A l’assaut ! Il claqua la porte et les laissa pantois.