2027, préparée par de Gaulle

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 2027, préparée par de Gaulle

Le 15 mai 1962

A l’occasion d’une conférence de presse, le général de Gaulle répond à une question (spontanée, évidemment) sur l’élection du Président de la République au suffrage universel : « ah, ce n’est pas le moment… je vous dirai ceci et qui vous expliquera peut-être dans quelle direction nous allons marcher à cet égard… ce qui est à redouter quand de Gaulle aura disparu, ce n’est pas le  vide politique, c’est plutôt le trop plein ». De fait, l’élection du Président au suffrage universel direct, proposée par lui, sera acceptée par référendum le… 28 octobre 1962. Le général y pensait donc, avec l’idée d’éviter le « trop plein », par une élection majoritaire à deux tours.

Depuis cette date, ce trop-plein « se gère », soit avant la présidentielle par des élections internes aux partis avant le premier tour, soit après par des rapprochements et des désistements. Beaucoup de tensions, pour éviter le pire : l’élection de l’ennemi politique à la tête du pays ! Pour le général de Gaulle, et ceci a marché 60 ans jusqu’en 2022, le risque majeur était le parti communiste. Dans son esprit, c’était l’opposition extrême qui, si elle restait au deuxième tour, devait être battue par la droite et le centre droit d’alors – qui se réuniraient. Imparable, jusqu’à maintenant.

 

Le 24 avril 2022

Il marque la fin de cette logique d’expulsion de « l’extrême gauche ». Au premier tour, Emmanuel Macron se représente et arrive avec 27,9% des voix (9 783 086), suivi de Marine Le Pen avec 23,1% des voix (8 133 828), suivie de Jean-Luc Mélenchon avec 22% des voix (7 712 520). Au deuxième tour, Emmanuel Macron obtient 58,6% de suffrages (18 768 639) contre 41,45% pour Marine Le Pen, avec 13 288 686 voix. C’est donc le cas imprévu des deux candidats extrêmes, aux bords de l’Élysée, séparés de 421 308 bulletins, sachant qu’Emmanuel Macron ne peut se représenter.

2027 devient l’obsession de tous, les deux candidats des camps extrêmes de 2022 prévoyant d’être là. Un troisième pourrait, encore inconnu, gagner le poste convoité, sauf s’il échoue et fait pencher la balance du « centre actuel », élargi et affaibli, à un des deux bords, sans que l’on sache lequel.

 

Le trop plein politique

C’est donc devenu le risque majeur, passant du « trop-plein » au saut extrême. C’est là, peut-être, le prix d’une trop longue période de paix, à moins que ce ne soit celui d’une surproduction de personnels politiques qui ne savent pas faire de choix en leur sein. La préparation de 2027 est dans tous les esprits, au milieu d’une crise politique et financière qui menace.

En effet, ce qui était imprévisible, c’est cette série de bipolarisations de l’électorat, pas le risque lié à la dette publique ! La première source de bipolarisation se déroule sous l’effet de la révolution climatique. La deuxième concerne la démographie, avec moins de naissances et une plus longue espérance de vie, ce qui nous renvoie aux problèmes de retraite et d’immigation. La troisième naît de la révolution technologique, avec l’Intelligence artificielle et une crise de productivité qui pourra entraîner chômage et pauvreté (15,4% de la population en 2023, 9,8 millions de personnes). La quatrième est le bouleversement des hiérarchies du monde, avec les Empires qui veulent s’étendre en Chine et en Russie, ceux qui veulent renaître en Turquie ou en Iran et leurs cortèges de tensions et de guerres, plus le repli des Etats-Unis. Ceci implique, pour la France et l’Europe, d’investir davantage pour se protéger et croître.

 

Comment éviter le « trop plein » ?

Évidemment, la politique va jouer, avec son cortège juridique, de scandales, de chantages et autres manigances, bref la politique de tous les jours, mais avec un enjeu singulier. Plus que jamais, il faudrait dire la vérité sur la dette publique. Le risque et l’inquiétude monteront, pesant sur la croissance. Alors : espérer que le budget 2026 sera voté, puis celui pour 2027, ou dissoudre la chambre, avec une éventuelle démission présidentielle qui pousserait à réduire le « trop plein » actuel ?

 

Le risque du « vote stratégique »

Il s’agit d’un bord qui ne veut surtout pas de la victoire d’un autre. En l’espèce, compte-tenu de l’avance de Marine Le Pen, ce serait voter Mélenchon. Mais ceci pourrait le faire élire ! Blanc ? Mais il sera compté comme « exprimé » ! Passera qui a plus de voix pour lui et « blanc ». Pour en sortir, il faudrait donc arriver à 1 candidat du « centre »,  contre 5 actuellement au moins, cet autre « trop-plein » !