Les PME françaises s'affaiblissent, elles qui représentent 64 % des emplois et 59 % de la valeur ajoutée. Leur valeur ajoutée augmente peu, devant la montée des charges salariales et des prix des produits importés. Puis, avec la hausse des impôts et des taxes, leur résultat est affecté. Il leur manque 10 points de marge par rapport à leurs concurrentes allemandes ! Et pourtant, elles commencent à regarnir leurs stocks et à réinvestir : les voilà donc qui s'endettent et réduisent leur trésorerie. Leurs bilans se dégradent : ce dérapage ne pourra pas durer...
Les banques font leur travail : 90 % des PME reçoivent au moins 75 % des crédits d’investissement demandés et 75 % d’entre elles au moins 75 % des crédits de trésorerie. En même temps, les crédits à court terme sont à 2 % et ceux à moyen et long terme inférieurs à 3 %. Côté banque, on pourra difficilement faire mieux.
Comment comprendre cette dangereuse érosion ? D’abord, les PME intériorisent une croissance à 1 % et en tirent leurs demandes de crédits. Ensuite, ces mêmes PME formulent des demandes qui pourront être satisfaites par le banquier : elles intériorisent alors ses propres contraintes de financement (ratio de fonds propres et de liquidité) ! En troisième lieu, les PME veulent gérer au mieux une structure financière qui les préoccupe, même si le crédit est accessible et peu coûteux. Quatrième raison : la question est ailleurs. Le financement d’entreprises particulièrement risquées, de start-up, n’est pas de nature bancaire. Il doit être fait sur fonds propres.
Ces fonds propres viennent d’investisseurs fortunés, d’assurances, de grandes entreprises ou de l’extérieur. Mais on sait ce qu’il en est des investisseurs fortunés : ils font attention ou regardent ailleurs, tout comme nombre d’investisseurs étrangers. Les assurances sont contraintes par leurs propres règles de sécurité et préfèrent les obligations publiques. Restent les grandes entreprises, paradoxalement, qui cherchent des suppléments de croissance. Mais l’essentiel, à savoir les fonds réunis par les investisseurs qui veulent et peuvent prendre des risques, manque. Là aussi, on retrouve le profit. Le profit futur risque de ne pas être là, parce que celui d’aujourd’hui n’est pas assez là. L’équilibre de sous-croissance et de sous-emploi que vivent les PME est un équilibre de sous-profit et de surréglementation.
Pour en sortir, il faut attaquer le problème par tous ses bouts. D’abord remonter la profitabilité des PME est essentiel, autrement dit il faut au moins « sanctuariser » le Cice et le CRI. Il faut stabiliser les règles fiscales et améliorer les conditions d’existence des PME. On le dit partout, c’est bien la preuve qu’on ne le fait pas ! Ensuite, il s’agit de soutenir les efforts des banques en matière de désintermédiation : la BCE pourrait refinancer mieux les prêts aux PME. Une Bourse spéciale, avec des contraintes adaptées aux PME, apportera des ressources plus longues. Elles pourront entrer dans le PEA-PME. Enfin, pour les start-up, le capital d’aventure doit venir d’investisseurs qui aiment le risque et ont les moyens de le subir, ce qui suppose une fiscalité, là aussi, adaptée. Pour sortir de ce « profit crunch », c’est d’une stratégie « PME + start-up » qu’il s’agit. Il faut la mettre entièrement en place, puisqu’on dispose de toutes ses composantes. C’est maintenant !
Les Echos