Theresa May va chez Freud

- Ecrit par

 Theresa May va chez Freud

Theresa May (Premier ministre du Royaume-Uni) : Merci Docteur, de me recevoir si vite !

Sigmund Freud : Je n’oublie pas que vous m’avez accueilli !

Th M : Il en allait de notre honneur ! Mais maintenant, mes Britanniques sont fous !

SF : Je crois qu’ils ont peur de quitter la mer, ce liquide amniotique dans lequel ils furent si longtemps heureux, pour aller en terre ferme, autrement dit : masculine. En même temps, ne plus être gérés par eux seuls, mais par un groupe, c’était perdre son moi !

Th M : Mais c’était dans le traité de Rome : ever closer union !

S F : Je sais, ce refus de l’accouplement à plusieurs me surprend de la part de vos compatriotes, eux si en avance dans les mœurs !

Th M : Je vous en prie ! C’est plutôt la fin, c’est Thanatos, qui nous a fait peur, pas un Eros modernisé !

S F : Je n’en suis pas sûr. N’est-ce pas plutôt la fin d’un mythe Prométhéen, celui d’un peuple rêvant se guider seul, et seul aujourd’hui dans ce cas, alors que personne ne sait où Donald Trump nous mène et que beaucoup s’inquiètent d’une férule chinoise ?

Th M : Mais notre politique a toujours été de ne penser qu’à nous, en discutant avec tous ! Nos maisons sont à vendre aux riches de partout. Tout le monde peut entrer dans notre Bourse, mais sans piocher dedans bien sûr !

S F : Vous voilà face à vos tabous à franchir, vous dites : « ligne rouge ». Je crois qu’il vous faudra partir le 31 octobre, organiser des élections européennes le 23 mai si vous ne convainquez pas les Communes avant, peut-être des élections ou un référendum, et recoller les morceaux ! Vous entrez dans l’âge adulte, celui où on accepte d’obéir. Le père n’est pas mort, il est bruxellois !

Th M : Mais nos partis n’y vont pas tenir ! Le Ça va régner !

S F : Votre système hiérarchique, avec un monarque chef d’église officielle, qui parle chaque année à une Chambre qui n’a pas de pouvoir, tandis que celle qui l’a, les Communes, écoute au fond debout, a dû vous habituer aux contradictions. Et je ne comprends pas votre attachement à ces symboles, quand on voit vos capacités à vous mouvoir dans cette famille élargie qu’est l’Europe !

Th M : Vous vous trompez, si vous me permettez : le no deal, ce « couper le cordon » avec l’Europe, nous terrifie. Le principe de plaisir entre en conflit majeur avec le principe de réalité !

S F : Je comprends, mais vous ne pouvez plus seulement charmer, voire tromper, et dire que vous êtes les meilleurs marchands du monde si vous ne vous adaptez pas ! Vos totems sont cassés : Commonwealth, Couronne, Étiquette, Special relationship avec les États-Unis. Réparez-les ou faites-en d’autres. Etre adulte, c’est maîtriser ses pulsions, pour épouser le réel. Réveillez-vous !

Th M : Mais je suis entourée de Conservateurs qui n’ont pas peur du vide et d’autres qui veulent rester dans l’union avec, en face, des Travaillistes qui veulent ma mort ! Je vais démissionner.

S F : Le meurtre du bouc émissaire n’a jamais rien résolu, sorry ! Vous êtes devant un réflexe infantile face aux refus du choix : Remain et Leave, To have the cake et to eat it, To be et not to be !

Th M : Mais je ne puis dire à la Chambre qu’ils sont refoulés, pervers ou immatures !

S F : Ils n’y seraient pas, s’ils ne l’étaient pas ! Mais il vous faut sortir de ce dédale : Arès et l’abîme du no deal, Icare qui s’en envole, Thésée qui en sort grâce au fil d’Ariane…

Th M : J’ai compris : si on revote « oui », on peut ne plus sortir ; si c’est « non », on choisit d’être expulsés. Et moi je vais devoir m’entendre avec Jeremy Corbin, ce trotskyste, et le voir peut-être  devenir Premier ministre !

S F : Je sens une poussée névrotique. Mais si Corbin rêve de votre départ, il cauchemarde, aussi, de vous succéder ! Ce sera à lui de gérer le « transfert », puis le remain !

Th M : Donc on ne part pas ?

S F : Si, au début.

Th M : Donc nous allons rester quelques jours, puis nous rapprocher d’amis nouveaux et quitter les anciens, puis quitter ces nouveaux et revenir vers les anciens !

S F : Je le crains et vous conseille une longue analyse : qu’est-ce qui vous a conduit à voter sur cette sortie du ventre maternel et maritime ? Qui vous a fait rêver d’une libération prométhéenne des traités que vous avez signés ? Où est passé votre séculaire surmoi ? Pourquoi ce meurtre de la Mère-reine ?

Th M : Merci : l’opposition me plaît déjà !

S F : Et songez aux Européens qui vous pensaient partis. A eux, le retour des refoulés !

Th M : Merci Docteur, mais je n’ai pas tout compris.

SF : Moi non plus !