Theresa May, Angela Merkel et Emmanuel Macron en conf call sur l’Iran

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 Theresa May, Angela Merkel et Emmanuel Macron en conf call sur l’Iran

Illustration : Phillip Maiwald (CC BY-SA 3.0)

 

Angela Merkel : Merci de vous être libérés, suite à cette décision de Trump, ce 13 octobre, de ne pas « recertifier » l’accord avec l’Iran. Dire qu’on a mis 13 ans à le signer pour donner plus de croissance et d’emploi à ce pays, en espérant y avoir beaucoup moins d’extrémistes, et donc moins ici !

Emmanuel Macron : Je comprends Trump de moins en moins. Cet accord n’était pas parfait, aucun ne l’est, mais il avait au moins le mérite d’exister. Il aidait l’Iran à sortir des sanctions. Celui-ci était moins tenté d’enrichir son uranium, on sait bien pourquoi, pour pouvoir en contrepartie s’ouvrir à nos marchés. On le tenait, on se tenait !

Merkel : Oui : il avait besoin de signer ! L’idée était aussi de l’empêcher de nouer d’autres alliances, disons chinoises, contre lesquelles Trump ne peut rien. C’est pourquoi nous avons écrit au Congrès américain, en lui demandant de bien réfléchir, maintenant que la balle est dans leur camp.

Theresa May : Et j’ai signé, au risque d’irriter le Président Trump, dont j’ai pourtant besoin.

Merkel : Nous sommes tous préoccupés par sa décision, et par ses conséquences. J’ajoute, Theresa, que nous mesurons votre engagement à son juste prix.

Macron : Trump m’inquiète : sortir de l’Accord de Paris, menacer l’Alena (pardon : NAFTA pour vous), abandonner l’Accord Transpacifique qui devait endiguer l’avancée chinoise en Asie ! Il revient sur tous les engagements d’Obama, mais il revient en fait sur la parole de l’Amérique. Et, pour l’Iran, il n’y a aucune preuve que le pays ne respectait pas l’accord…

Merkel : Pour les « armes de destruction massive » de Saddam Hussein en Irak, non plus. On voit où ceci nous mène. Il est dangereux, Donald, plus pour nous que pour les autres ! Quels risques peuvent courir nos entreprises, si elles traitent avec l’Iran ? Et quand elles commercent en dollars, elles se trouvent sous la loi américaine !

May : Oui, il fait plus peur à ses amis qu’à ses ennemis. Le voilà soutenu, après sa dénonciation, par l’Arabie Saoudite et par Israël. Israël, d’accord. Mais l’Arabie Saoudite joue un jeu dangereux, chez elle, dans sa région et dans le monde musulman. Un jeu qui lui coûte cher, regardez son déficit budgétaire ! Elle devait mettre en bourse, dans ma City, 5% d’Aramco, sa société royale pétrolière. C’était génial pour eux, et pour moi. Maintenant, il est question qu’elle en vende directement un bout aux Chinois !

Macron : Trump nous affaiblit et renforce ses opposants. Comment croire à sa signature ? Avec la Corée du Nord, il ne s’agit pas de convaincre Kim Jong-un, mais Xi Jinping. Va-t-il se mouiller ? Et, pour l’Iran, c’est tout aussi grave, car il met Rohani en danger chez lui, s’il accepte de ré-ouvrir le dossier.

Merkel : La loi du plus fort l’est d’autant moins qu’il l’est moins, surtout s’il change d’idée. Et il nous entraîne avec lui. Emmanuel, vous avez eu Xi Jinping au bout du fil ?

Macron : Oui : il attend que Trump lui demande plus nettement d’agir sur Kim Jong-un lors de sa prochaine visite chez lui… pour lui demander alors de sortir ses armes nucléaires et ses fusées de la péninsule.

Les deux autres : Pas facile ! Et pour l’Iran ?

Macron : C’est plus tordu encore : Xi Jinping attend que Trump devienne plus fragile pour en obtenir plus dans les prochaines négociations, mais pas trop fragile, pour qu’il soit tout de même réélu en 2020 !

May : 2020, c’est vrai qu’il sera toujours là ! Il faut renforcer nos liens…

Merkel : Mais le Brexit, ma chère !

Macron : La méthode Trump est celle du dealer fou : ça passe, avec toujours plus de concessions d’un côté, ou ça casse. Il veut pousser l’Iran au bout, comme pour acheter un terrain !

May, Merkel : Et si ça casse ?

Macron : Il change de registre, puis revient. Regardez sa réforme fiscale : les Républicains ne peuvent lui refuser. Puis il revient sur la santé. Puis sur l’immigration. Il gagnera, ou ils perdent les élections de 2018 !

Les trois : On doit faire front commun.

Macron : Je soutiens Total pour produire plus en Iran, avec et pour la Chine.

Merkel : J’achète plus de leur gaz. Il faut en parler aux Polonais.

May : Je le fais : ils sont inquiets de leurs plombiers chez moi ! Je vais les rassurer : j’en ai besoin.

Les trois : Empêchons la hausse du prix du pétrole. Pesons sur le Congrès. Méfions-nous de notre grand allié. Discutons avec nos ennemis ! Merci Donald !

Macron : Il veut le Nobel de la Paix, comme Obama !

Les autres : Mais par la guerre !