– Salmane (roi d’Arabie saoudite) : « Vous avez vu ? Après la chute du prix du baril, où j’ai montré que je n’allais pas réduire ma propre production pour arranger tout ce beau monde, il remonte gentiment… Entre 30 et 40 dollars le baril, je m’en sors, pas l’Algérie, le Nigeria, le Brésil ou le Venezuela. Que voulez-vous ? Au moins, leur plongeon fera remonter le prix du brut… bientôt ; pas sûr qu’ils en profitent tous. Surtout, l’Iran, qui se met à exporter, sera quand même assez ennuyé à ce prix-là, et pendant des mois. Puis j’annonce, avec le Venezuela et les Russes, que je bloque désormais ma production au niveau de janvier. Je fais même proposer à l’Iran de nous rejoindre, et l’Iran dédaigne, bien sûr. On ne pourra rien me reprocher ! Autant donc vous le dire : je suis assez content de moi ! »
– Janet (Janet Yellen, Présidente de la Banque centrale américaine) : « Je n’en doute pas, mais ça ne m’arrange pas tout à fait. Regardez : j’ai encore pas mal de croissance chez moi, plus le plein emploi qui fait monter les salaires, plus le pétrole qui revient, même doucement. Je vais être forcée d’augmenter mes taux d’intérêt. Je compte sur une première hausse d’ici fin juin et sur la deuxième fin décembre. Donc le dollar va quand même monter et raboter cette « reprise » à 2 % ! »
– Mario (Mario Draghi, Président de la Banque centrale européenne) : « Moi, ça me va à moitié ! La moitié, c’est un peu plus d’inflation importée partout, avec le pétrole à 40 dollars, sachant que j’ai un peu à attendre avant de m’inquiéter des salaires, avec 10 % de taux de chômage dans la zone ! L’autre moitié, celle qui m’embête, c’est la remontée des taux américains. Je la ressens déjà, plus celle du dollar qui peut attirer l’euro vers 1,2 euros pour un dollar, alors que je me bats pour le tenir à 1,1 ! Je me tue à répéter que « toi, Janet, c’est toi », autrement dit que les Etats-Unis sont les Etats-Unis, et pas la zone euro. Je parle même de jeter des euros par hélicoptère, pour le faire baisser ! Ça marche, mais seulement un temps. Au fond, j’ai peur que tu ne m’attires vers le haut ! »
– Salmane : « Si la croissance repart chez vous deux, alors le prix du pétrole monte : bien. Mais si les taux US montent, alors le dollar suit et le prix du pétrole baisse ! »
– Les trois (ensemble) : « On est coincés ! »
– Les trois (après réflexion) : « Et si on se mettait d’accord, au lieu de se plaindre, et on se répartissait les rôles ? »
– Janet : « Ok, moi, ce que je peux dire et répéter (on me le reproche déjà assez), c’est que je suis très soucieuse de l’extérieur. Cette volatilité qui m’entoure m’effraie, avec ces pays émergents fragiles qui s’endettent en dollars ! Donc je vais dire que je veux renforcer encore la reprise américaine, même avec le plein emploi. Je veux plus de demande interne, grâce à des hausses de salaires des ingénieurs en big data. Ceci me permettra d’avoir une l’inflation vers 2,3 – 2,5 %, au-delà des 2 % de mon mandat, avant de monter les taux courts et sans trop me faire critiquer. Mais pour les taux longs, je ne puis que parler, pour inquiéter tout le monde ! »
– Mario :«D’accordo. Moi, je puis te rejoindre sur les inquiétudes mondiales, histoire de calmer les ardeurs. Une étude de la BRI ou du FMI va bien sortir annonçant une grande crise mondiale et Christine Lagarde nous demandera alors, à tous deux, d’attendre pour hausser nos taux. Et la France est là pour ralentir le peloton de la zone euro. »
– Salmane : « Wakha ! »
– Les trois : « Vous savez quoi ? Il faut mettre les Chinois dans la boucle ! »
– Les trois : « Mais comment ? »
– Mario : « Moi, je peux demander à Zhou Xiaochuan, notre collègue de la Banque centrale, de parler plus, maintenant qu’il vient de commencer à s’y mettre. Il doit dire qu’il veut stabiliser le Yuan « à moyen terme » (c’est notre formule magique) par rapport au dollar et soutenir ainsi sa croissance. Il comprendra bien d’où vient ma demande et on lui renverra l’ascenseur… à moyen terme ! »
– Salmane : « Moi, je peux lui proposer un prix sympa sur très long… terme. »
– Janet : « Et moi, mener des études conjointes et des rencontres, pour calmer ce que j’entends ici sur la manipulation du Yuan, avec Trump et Sanders. Ca pourra aider à y mettre un… terme. »
– Les trois : « On est bien d’accord, mais ces échanges n’ont pas eu lieu ! »
– Les trois : « Bien sûr, mais attention à ne pas perdre vos portables cryptés ! »
– Les trois : « Ah, Ah, Ah. »
Ils n’auraient pas dû rire…