Merkel et Macron, épuisés et (intérieurement) radieux

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 Merkel et Macron, épuisés et (intérieurement) radieux

La scène se passe au siège de la Commission européenne. Le café circule. Des heures pour trouver quatre noms acceptables pour la vaste majorité des 27 chefs d’état et de gouvernement et pour le futur Parlement européen. Tout le monde est nerveux, deux surtout.

 

Angela Merkel (AM) : On y est arrivé ! On les a eus ! 4 noms, deux filles, deux garçons : c’est toi qui y tenais ! Des heures à tourner en rond, autour de cette table ronde… pour les fatiguer !

 

Emmanuel Macron (EM) : Nous aussi, on est fatigués ! Mais c’était mal parti ! Pour la Commission, il fallait quelqu’un d’expérimenté, au moins ministre pour discuter avec nous. Et si c’était le leader du parti qui a le plus d’élus au parlement : parfait !

 

AM: Mais tu sais bien que le leader du parti qui a eu « le plus d’élus au Parlement », c’est Manfred Weber, de mon PPE, sans expérience nationale.

 

EM: J’ai vu le Bavarois. Je sais que tu l’as pris pour conforter là-bas ta position personnelle : je ne te reproche rien. Et je comprends pourquoi, aussi, il n’avait pas l’étoffe d’un ministre allemand !

 

AM: Oui, et c’est le coup de génie que ce « Pacte d’Osaka au G20 ». On l’a vendu partout, sans nous exposer, et le leurre a marché ! Timmermans Président de la Commission, Weber du Parlement quel couple glamour ce devait faire ! Ce Timmermans néerlandais, anglophone et germanophone ce qui ne gâte rien, ancien ministre des Affaires étrangères du Pays-Bas et actuel Vice-Président de la Commission, ce n’était pas mal. Mais socialiste !

 

EM: Socialiste, et francophone !

 

AM: Francophone je m’y ferai (sourire), mais socialiste, alors qu’ils sont loin derrière au Parlement ! La provoc. !

 

EM: Le leurre ! Mais Weber Président du Parlement, c’était inespéré pour lui ! Alors notre truc a marché : les Italiens sont vexés de n’être pas dans la boucle alors qu’ils étaient à Osaka, mais toi, moi, les Premiers ministres néerlandais et espagnol, Juncker et Tusk.

 

AM: Les Italiens ne digèrent pas ce socialiste, moins encore ce qu’il a dit sur les « manquements à l’état de droit ». Ils ont rameuté Polonais, Hongrois, Tchèques et Slovaques ! Et moi, tout le monde voit que je suis politiquement plus fragile et physiquement fatiguée ! Donc, ils ont tiré sur Timmermans, l’ont tué, et après ils ne pouvaient plus rien dire ! Plus de cartouches !

 

EM: Même pas la peine d’agiter Jens Weidmann, le patron de la Buba, pour succéder à Draghi ! Tu en as, des épouvantails !

 

AM: Je fais avec ceux que j’ai !

 

EM: Un ou deux « gilets jaunes » ?

 

AM: Garde les (ils rient), mais avançons.

 

EM: Donc on a cramé Timmermans, on verra pour le dédommager. Mais on a cramé aussi Salvini l’italien et les illibéraux de l’Est ! Alors je t’ai proposé de commencer par les femmes : ta ministre allemande de la Défense Ursula, von der Leyen, à la Commission pour cinq ans, et la française Christine Lagarde, que tout le monde connaît (et que tu apprécies), du FMI à la BCE pour huit. On passe alors aux hommes : l’actuel Premier ministre libéral belge Charles Michel, qui va bientôt ne plus l’être, à la présidence du Conseil européen et, aux Affaires étrangères, un social-démocrate modéré de l’Est, ce Slovaque Maros Sefcovic, ou bien du sud, le ministre socialiste espagnol des Affaires étrangères Josep Borrell.

 

AM: Weber n’a plus le choix, en tout cas plus de poste. Le PPE verra qu’on a un Allemand à la Commission, et pas facile d’attaquer une femme. Mais les autres vont dire qu’on a pris les gros postes !

 

EM: Mais avant, il y avait un Luxembourgeois à la Commission, un Polonais au Conseil, une Italienne aux Affaires étrangères, un Italien au Parlement et un autre, et quel autre, à la Banque centrale ! On a patienté !

 

AM: Et s’ils s’énervent, on va dire aux italiens et autres que tout ça ne tient que par la force de l’Allemagne et la crédibilité de la Buba ! Même toi, tu en profites : ton déficit public augmente et tu le payes avec des taux négatifs !

 

EM: Oui tu y es pour quelque chose, mais la crise de 2008 et la révolution technologique aussi !

 

AM: On ne va pas se disputer !

 

EM: Si ça marche, c’est un miracle. Pas sûr qu’il se reproduise !

 

AM: Nous sommes au bord de l’explosion, Salvini en Italie, Brexit, Orban en Hongrie, j’en oublie, et Trump !

 

EM: Ils veulent la mort de ce qui les soutient et, pour certains, les a sauvés. Et Trump veut détruire son empire !

 

AM: À qui profitent ces crimes ?

 

EM: À Xi ?

 

AM: Même pas, je l’ai bien vu à Osaka : il ne comprend plus rien !

 

EM et AM : Nous non plus, mais : motus !